The Square // De Ruben Ostlund. Avec Claes Bang et Elisabeth Moss.
Ce n’est pas toujours facile de comprendre comment une Palme d’or est choisie au Festival de Cannes mais voici The Square, la dernière Palme d’or. On doit The Square à Ruben Ostlund (Snow Therapy) dont j’avais beaucoup aimé le dernier film. Mais The Square pose des questions, interroge le spectateur et propose un message intéressant sur la liberté d’expression et ses limites. Ruben Ostlund est là pour faire grincer des dents et parvient à le faire dans sa réflexion. Il ose des choses et propose de ne pas rester dans un esprit étriqué mais d’aller au delà de ce que l’on pourrait imaginer. The Square est là pour dénoncer pas mal de choses sans pour autant donner des leçons à la bourgeoisie qui se sent bien dans son côté et qui ne veut pas vraiment que l’on change son confort. Le film est aussi là pour parler des limites et des ambiguïtés du modèle suédois sans jamais vraiment le défendre ou le détester. En choisissant aussi de se moquer du milieu de l’art et des artistes (ici incarné par Dominic West), créant des moments au bord de l’absurde pour justement mieux dénoncer ce qu’il veut dénoncer. Avec intelligente, on reste happés par ce que le film a à nous raconter sans jamais vraiment nous en détacher.
Christian est un père divorcé qui aime consacrer du temps à ses deux enfants. Conservateur apprécié d’un musée d’art contemporain, il fait aussi partie de ces gens qui roulent en voiture électrique et soutiennent les grandes causes humanitaires. Il prépare sa prochaine exposition, intitulée « The Square », autour d’une installation incitant les visiteurs à l’altruisme et leur rappelant leur devoir à l’égard de leurs prochains. Mais il est parfois difficile de vivre en accord avec ses valeurs : quand Christian se fait voler son téléphone portable, sa réaction ne l’honore guère… Au même moment, l’agence de communication du musée lance une campagne surprenante pour The Square : l’accueil est totalement inattendu et plonge Christian dans une crise existentielle.
Mais pour faire un tel film il fallait sortir des sentiers battus, de l’académisme que veut l’art finalement. On mélange les gens de façon audacieuse , passant de la comédie à quelque chose de plus dramaturgique de façon intelligente. Voilà que The Square est alors là pour questionner la place de pas mal de choses dans nos sociétés actuelles et inégalitaires. Le film prend le sujet des mendiants par exemple comme une sorte de fil rouge et ça fonctionne plutôt bien. Ce qui est finalement très étonnant là dedans c’est la capacité du scénario à nous faire rire constamment pour se moquer de nous, notamment. Visuellement, le film est encore une fois excellent. Ruben Ostlund maitrise le cadre, la lumière et n’a pas peur des clichés afin de mieux les défaire. A certains moments, The Square ressemble à une sorte de farce et pour le coup elle est séduisante. Car cet humour caustique que l’on ressent de façon sous jacente est peut-être bien l’une des plus grandes forces de cette comédie dramatique. On est là pour dénoncer certes, mais aussi pour questionner l’art moderne et son influence sur le monde. Voilà donc une agréable surprise qui mérite sa Palme d’or.
Note : 9/10. En bref, étonnant et drôle.