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Coming out : je suis pauvre.

Publié le 02 décembre 2017 par Mister Gdec

je ne parle jamais de moi ici. Le sujet ne m’intéresse guère. Mais l’heure est grave.  je ne sais pas pendant combien de temps encore je pourrai maintenir ce blog en l’état, avec ses publications quotidiennes, depuis 2008. Je me bats en effet depuis 2014 contre une terrible maladie, un véritable cancer social : le chômage. Pour celui ou celle que la naissance n’a pas avantagé.e,  et qui ne s’est pas exclusivement préoccupé de son seul enrichissement personnel, je ne connais pas d’autre moyen légal pour faire face à ses dépenses les plus modestes (manger, se vêtir, se loger, se laver, se chauffer ¹) que de vendre sa « force de travail » à un employeur ². Lequel veut visiblement, de manière de plus en plus étriquée au fil du temps, un employé bien formaté : ni trop jeune, ni trop vieux, ni trop diplômé, ni pas assez, avec de l’expérience, mais pas trop, le bon diplôme, la motivation sans faille adéquate, et surtout bien obéissant, n’ayant pas trop de connaissances sur ses droits, qui d’ailleurs s’amenuisent depuis ces dernières années (et ce n’est pas fini). Pour résumer : sujet taillable et corvéable à merci ne présentant aucune aspérité rédhibitoire.

Il semblerait hélas que je ne sois pas tout à fait conforme aux normes en vigueur en matière de mise sur le « marché » de l’emploi,  si j’en juge par le peu d’entrain des décideurs.ses à m’employer, même pour des postes pour lesquels j’étais pourtant il y a seulement quelques années si efficient, moi qui ai tant donné. Mes employeurs en ont pourtant toujours eu pour leur argent. Mais je crois pouvoir écrire que je paie à présent un engagement syndical au prix fort, sanctionnant mon incroyable témérité… Aussi, me voilà dans une situation je l’avoue assez pénible où je me vois contraint depuis peu à demander des aides sociales, de l’aide alimentaire, à la mobilité, ce que mon apparence ne dit pas. Je crains de perdre mon logement, que je ne peux plus financer. Et alors que j’ai consacré toute ma vie professionnelle à en aider d’autres, voilà que je me sens passer à présent de l’autre côté de la ligne… Un peu difficile à digérer, je l’avoue. Voilà voilà… Passons sur les détails en un revers d’écriture.

Dans ce magma d’angoisses qui me réveillent parfois sur une peur compréhensible du lendemain, il se trouve cependant que,  sans que je ne demande rien, une main s’est tendue,  tout à fait spontanément, me faisant un don de 60 euros. Une somme importante à mes yeux, qui m’a permis de boucler au moins ce mois ci, et de remplir mon frigo. Aussi, je tenais à remercier publiquement cet incroyable lecteur dont le visage m’est inconnu, mais qui lui se reconnaitra. Voir qu’il y a sur cette terre des gens pour qui le mot solidarité n’est pas vain, et qui m’a fait ce cadeau de Noël avant l’heure, simplement parce qu’il a noté au détour d’une phrase que j’étais… dans la difficulté, comme on dit, voilà qui me fait un bien fou, indescriptible, terriblement revigorant.  je suppose que sa pudeur n’apprécierait pas forcément que je le nomme, ou le mette trop en lumière. Mais j’espère, à charge de revanche, que je pourrai un jour, le plus proche possible, mettre un visage sur cette main là. Et lui rendre à ma façon ce qu’il m’a si généreusement donné, sans rien attendre en retour, force du don véritable.

Sa générosité personnelle et sa solidarité réelle ne s’est pas limitée à un chèque. Il est allé bien plus loin, mu par je ne sais quelle révolte intérieure contre l’injustice, ce qui me fait me reconnaitre un peu en lui, mon semblable. Il a voulu à sa façon alerter d’autres blogueurs, dans l’espoir de lever je ne sais quelle mobilisation générale à mon endroit, ce qui je l’avoue m’a quelque peu gêné, peu habitué que je suis à me battre pour moi-même, plutôt que pour d ‘autres, comme je l’ai toujours fait. Il m’a même proposé de lancer un appel à dons pour… moi seul ? Horriblement gêné.  Larme à l’œil.  je ne savais pas que cela existait, des gens comme ça. Son idée est qu’avec le nombre de lecteurs/ices abonnées à  ce blog, si un nombre suffisant me versait un peu d’argent en retour de mon bénévolat depuis toutes ces années, me finançant comme ils paieraient leur journal quotidien, cela me permettrait peut être de survivre. je ne sais qu’en penser. Un crownfounding pour moi-même, ou une adhésion payante à mon blog, peut-être ? Voilà qui est horriblement gênant.  je ne suis pas très à l’aise avec l’argent, je l’avoue. Mais je me dois à moi-même et aux autres de survivre, tant bien que mal. Et comme j’ai essayé par tous les moyens possibles et imaginables de me sortir de cette impasse sans que cela ne débouche sur l’emploi tant désiré, je me dis qu’après tout, peut-être a-t-il raison, je ne sais qu’en penser. Mais le pire ne serait-il pas de ne rien faire, de se laisser embourber ? Mais que dois-je faire ? j’ai ma dignité… je me vois mal simplement vous dire  :

« à vot’bon coeur, M’sieurs, dames »

(je l’ai fait. je m’en vais. J’ai ma pudeur quand même. je ne vais pas non plus vous montrer la couleur de mon slip (rouge).

A bientôt. je vais manger. Grâce à lui. Chapeau bas, le savoyard.  A la revoyote, comme disent les vosgiens.

..

¹ A l’heure où j’écris ces mots, c’est pas pour faire pleurer dans les chaumières, mais je décris factuellement, juste : il fait très exactement 14 degrés dans mon petit appartement, je suis sous une couverture, et j’écris sur mon canap avec mon blouson chaud… On ne dira jamais assez les ravages de la précarité énergétique, et de la difficulté de plus en plus courante de se payer du chauffage. Si seulement mon simple exemple pouvait servir à quelque chose aussi…

² ce que d’aucun.e.s appellent plus habituellement « travailler ». Comme si je ne travaillais pas… bien que non rémunéré. Mais ceci est un autre sujet.


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