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Sa préférée, de Michaël Perruchoud

Publié le 02 décembre 2017 par Francisrichard @francisrichard
Sa préférée, de Michaël Perruchoud Il y avait l'aînée, la plus solide, la plus habile, et puis la cadette toute frêle, avec sa foulée légère et son sourire. Pourquoi aime-t-on toujours la plus fragile? Parce que l'amour est l'inverse de la sélection de l'espèce.

Au moment de la grande famine, pourtant, c'est la cadette, une gamine courageuse, douce, Sa préférée, que la mère abandonne dans la rue, ne lui laissant que son amour, tout son amour, jusqu'à ce qu'on se revoit...

La mère et l'aînée vont vivre ensemble pendant des années, avec le souvenir empoisonné de la cadette disparue. Une mère peut-elle expliquer à son aînée, qui aimait tant sa soeur, qu'elle l'a sacrifiée pour elle?

Oui, elle le peut: Si je t'avais laissée toi, je n'aurais jamais pu me pardonner. Elle, c'était me punir, elle, c'était parce que je ne pouvais pas faire autrement. Toi... Mon Dieu, toi, j'aurais été plus coupable encore...

Quand la vie reprend le dessus, la mère se met en quête de retrouver sa cadette. Et cela dure pendant des années, avec pour conséquence de compromettre l'existence de l'aînée, sûrement promise à un bel avenir.

Alors qu'elle a fait de brillantes études, elle épouse Roman bien qu'elle ne veuille pas se réfugier dans son ombre; devient, malgré qu'elle en ait, sa femme au foyer; lui fait des enfants, quatre, pour calmer ses peurs.

La cadette n'est pas morte. La mère le sait au fond d'elle-même. Tout ce qui s'est passé avant qu'elle ne soit abandonnée par la mère à cinq ans, elle l'a effacé de sa vie et ne veut surtout pas le savoir: elle n'en a pas besoin.

La cadette, après sa rencontre avec la musique, à sept ans, s'est obstinée, en dépit de sa faible constitution, à faire du chant son travail, si bien qu'au bout de quelques décennies la réputation qu'elle a acquise la fait vivre.

La cadette est devenue une dame. Elle s'en est sortie toute seule, comme la mère le pressentait. Or, un jour, l'aînée, gagnée par l'obsession de la mère qui se meurt, la croise et, cette fois, elle n'a plus de doute:

Je t'ai vue entrer chez la couturière. Comme les autres fois, les images se superposaient à quelques instants d'enfance. Mais là, il y avait quelque chose de plus, ce n'était pas juste une ressemblance. [...]C'était toi ...

Les trois femmes du livre de Michael Perruchoud s'aiment. La vie les a cruellement séparées. Le lecteur, jusqu'au bout, se demande si les deux, que le passé tourmente depuis, retrouveront celle qui veut surtout l'oublier...

Francis Richard

Sa préférée, de Michaël Perruchoud, 152 pages, L'Âge d'Homme

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