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Capitaine Tilkhomiroff, la chronique enneigée...

Publié le 03 décembre 2017 par 7bd @7BD
Capitaine Tilkhomiroff, la chronique enneigée... Titre : Capitaine Tikhomiroff Auteurs : Gaëtan Nocq (scénario et dessin) d'après le témoignage d'Alexandre Tikhomiroff Editeur : La Boîte à Bulles Année : 2017 Pages : 192 Résumé : En 1917, Alexandre Tikhomiroff est capitaine dans l'armée blanche, l'armée impériale qui défend le Tsar. La lutte prend une tournure étrange, il erre avec ses hommes et son corps d'armée dans une Russie dévaste par la guerre civile qui oppose les blancs et les rouges, c'est-à-dire les troupes bolchéviques. Mais les choses ne sont pas aussi simples que cela. Mon avis : Ce récit intrigant et dense se base sur les souvenirs d'Alexandre Tikhomiroff. Une lecture à deux niveaux. En effet, Alexandre Tikhomiroff se souvient de sa carrière militaire pendant la révolution Russe de 1917. Et, à certains moments, il raconte et partage ses souvenirs avec son fils, Alexandre (Tikhomiroff, du coup, mais junior). Ce dernier écoute ses histoires et a compilé tous ces souvenirs. Une fois adulte, il est parti en Russie, ou en URSS à l'époque, pour tenter d'en savoir plus, de retrouver les lieux qu'avaient traversés son père. Et c'est donc les souvenirs du fils écoutant les souvenirs de son père qui nous sont contés ici. Nous passons donc entre deux temps, entre deux Alexandre. Cela n'enlève rien à la force du récit, au contraire. Ces niveaux temporels se heurtent et se renvoient les uns aux autres. Par certains détails, comme la confiture avec le thé, par certaines mises en scène aussi. Mais le plus poignant reste ce parcours incroyable du capitaine Tikhomiroff. Ce soldat sans conviction, comme tous ceux qui l'entourent, qui errent entre les blancs, les rouges, les anarchistes « noirs », les troupes étrangères allemandes, anglaises, françaises... Et tout ce monde se bat ou se croise dans une Russie exsangue ,où la seule valeur chère et rare devient la nourriture. Le conflit perd tout son sens. On ne se bat pas pour un camp ou un autre, pour une butte ou une prairie, on tente juste de survivre. On veut seulement trouver à manger. Quitte à changer de camp un temps, pour ne pas se faire tuer, ou à faire profil bas pour ne surtout pas se faire remarquer.
Tikhomiroff, à côté de ce voyage sans but et sans fin, retrouve de temps en temps sa famille, pour un temps seulement, pour se rendre compte que la faim frappe tout le monde. Cela montre aussi que ce voyage ne va pas vers l'avant, il tourne en rond, sur lui-même, autant dans l'espace que dans le temps. Dans ce récit, il n'y a pas de contraste entre les privilégiés qui se remplissent la panse et les pauvres qui se la crèvent, la panse ! On ne suit et ne voit que les pauvres. Car ce sont eux que croise et recroise sans cesse le capitaine. Et ce thème de la faim, de la fuite, ne tourne jamais en rond. Toujours la même, la faim se renouvelle de plusieurs manières différentes. Elle hante le déroulé de l'histoire sans jamais se répéter. Tant et si bien que la phrase de conclusion de cette BD tombe comme une pierre, nus faisant réaliser quelque chose que nous avons tendance à oublier... Capitaine Tilkhomiroff, la chronique enneigée... Et voilà le son... du silence ! Gaëtan Nocq manie aussi le pinceau pour adapter et dessiner ces mémoires, ces souvenirs. Et il choisit un style bien particulier. Un style frôlant l'inachevé. Un style crayonné, jeté sur la feuille non pas comme une colère, mais comme un instant saisi. Et à ces traits de crayons se mêlent une peinture, créant un univers mixte mixte. Les personnages sont ainsi simplifiés mais gardent toute leur force de silhouette bloquées dans une guerre qui les dépasse, les entraîne et les rejette comme une mer invisible. Les décors peints, esquissés dans des teintes aquarelles, posent facilement un champ, une ville lointaine. Mais en regardant bien, on sent que rien n'est facile dans ce choix graphique. Le tout se mélange avec une composition particulière, qui laisse une place incroyable au silence. À l'espace vide de corps et de sons. Tous ces choix rendent Capitaine Tikhomiroff étrange et même envoutant. Le volume épais se termine par un court cahier présentant des éléments de la famille Tikhomiroff, papiers d'identité, cartes militaires, autant de documents qui ont tendance à faire froid dans le dos, tant il nous rappelle que tout ce que nous venons de lire n'est pas une fiction... Ne ratez pas cette BD inhabituelle, autant par son dessin que par son récit, et venez découvrir ce que pouvait être la Russie en pleine révolution, en pleine marasme et comment l'ont sans doute vécu des millions de gens. Zéda rencontre Alexandre Tikhomiroff ! Capitaine Tilkhomiroff, la chronique enneigée... David
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