Ainsi, cet homme que j'avais côtoyé pendant des mois ne s'appelait pas Philippe de Pacheco. Il s'agissait d'un certain Charles Lombard, ancien garçon de café, qui fréquentait les refuges de l'Armée du Salut et en particulier la péniche amarrée quai d'Austerlitz. Pourquoi m'avait-il laissé sa valise ? Voulait-il me donner une leçon en me montrant que la réalité était plus fuyante que je ne le pensais ? Ou bien, tout simplement, il avait abandonné ces dépouilles, sûr de faire peau neuve, à Casablanca ou ailleurs.
Où et à quelle époque Lombard avait-il usurpé l'identité de Pacheco ? La carte d'identité datait de 1955. Donc, cette année-là, Pacheco était vivant. La photo qui figurait sur cette carte était celle de l'homme que j'avais connu à la Cité universitaire, de son vrai nom Charles Lombard, et il l'avait habilement substituée à la photo de Pacheco puisqu'elle portait le tampon de la préfecture de Police. Ce soir-là, je suis allé au 183 de la rue Belliard, près de la porte de Clignancourt, et la concierge m'a dit qu'aucun habitant de l'immeuble n'avait jamais porté le nom de Pacheco.

À propos de Bernard OBADIA
Biographie : Bernard OBADIA, vit et travaille entre Marseille, la Ciotat et Aix en Provence. A créé le site : LittératureS & CompagnieS ainsi que le site RE PRESENTATIONS Ecrit de façon discontinue "AU TEMPS, Dictionnaire Patrick Modiano"
Cette entrée a été publiée dans Patrick Modiano, Séries. Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien. |