Les coordonnées cartésiennes
Les coordonnées cartésiennes constituent le principal instrument utilisé pour occulter l’irréversibilité du temps. Quine nous l’a dit depuis longtemps : « Une fois que nous apparentons l’étendue temporelle du cours d’eau à son étendue spatiale, nous cessons de juger plus difficile de mettre le pied deux fois dans le même cours d’eau que de le faire à deux endroits différents » (Quine, 1999 : 244).
Les coordonnées cartésiennes constituent un moyen élégant de localiser un objet mais l’usage de ce procédé dépasse largement ses capacités. Il est mis à contribution à tout propos, hors de son domaine. Pire il est un instrument de communication qui par son évidence suspend la réflexion : c’est une chose qui ne se discute pas, une évidence.
Ces errements s’appuient aussi sur des cadres institutionnels – l’histoire s’occupant du temps, la géographie s’approprie l’espace – alors que la symétrie est absurde – seul le temps est irréversible – même si la banalité du propos cache sa stupidité.
Bernard Traimond
QUINE, W.V.O., Le mot et la chose, Paris, Flammarion, Champs, 1999.