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Par Julien Leray @Hallu_Cine

Dans les limbes de l’infiniment petit, le vivant est animé d’une forme de perfection. Ce n’est pas nous qui l’affirmons, mais David Sénéchal, directeur du département de physique de l’Université de Sherbrooke, au cours de l’un des vingt-quatre témoignages que convoque Céline Baril dans 24 Davids. À cette conception du parfait, s’oppose le chaos régnant à la surface du globe. Inégalités sociales, économiques, surconsommation des ressources naturelles, conflits armés, et pauvreté systémique jamais résorbée. Un constat amer, d’une extrême gravité. Puis, vient l’infiniment grand. L’Univers dans tout son mystère et toute sa majesté. Celui que des armées de physiciens et de scientifiques essaient tant bien que mal depuis Einstein d’unifier, autour d’une théorie universelle qui synthétiserait les forces à l’œuvre sur Terre n’ayant plus droit de cité passées ses frontières.

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Comment donc appréhender ces contradictions, lit de la complexité humaine et du sens de son existence, résistant encore et toujours à la logique seule de la science ? À cette question, Céline Baril répond par une narration chorale, en donnant la parole à vingt-quatre David, d’origines culturelles, ethniques, sociales, professionnelles totalement différentes. Un camaïeu aux multiples facettes et aux multiples points de vue, donnant corps à une conviction voulant que l’appréhension des défis auxquels fait face l’humanité ne pourra se faire que par la conjugaison de la science, des lettres, et de la philosophie. Par le haut (les institutions étatiques et universitaires), ou par le bas (les initiatives populaires de quelques individus, à l’échelle de quartiers ou de régions), lorsque l’État, dans des pays rongés par la pauvreté ou meurtris par les conflits, n’est justement plus là.

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Une union de la théorie et de la pratique, du Nord et du Sud, des privilégiés et des laissés-pour-compte, que Céline Baril met un point d’honneur à mettre en valeur, en accordant une place de choix à chacun de ses intervenants, tous porteurs d’une idée ou d’un concept clé à même d’alimenter la réflexion quant au défi que représente, peut-être plus que jamais, le vivre-ensemble.

Hélas, la force et l’émotion qui auraient dû émerger de ces témoignages et de pareils sujets peinent à exister face à la mise en scène étonnamment démonstrative déployée par la réalisatrice québécoise. En compagnie de Julien Fontaine, son directeur photo, cette dernière a choisi de troquer les atours naturalistes constitutifs de nombre de documentaires pour une approche mettant l’emphase sur l’esthétique. Cadre soignés, volontiers contemplatifs et superbement éclairés, mouvements de caméras fluides et élégants. À l’instar de son sujet pourtant, c’est certes ce qui participe à sa valeur, mais l’empêche par là-même de toucher réellement au cœur. 24 Davids, en se voulant raffiné, a tendance à privilégier le beau à l’approfondissement de ses sujets. Comme si Céline Baril avait sciemment placé une barrière, aussi agréable visuellement soit-elle, entre le spectateur et son propos. Une approche faisant de 24 Davids une proposition davantage théorique (voire académique) qu’empathique, un travail plus cérébral qu’immersif d’un point de vue émotif.

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En résulte un documentaire au potentiel certain, à la narration ambitieuse, originale par son prisme et ses motivations, dont les idées ne trouvent cependant jamais l’aboutissement émotionnel qu’elles auraient mérité. Comme si la fin n’arrivait jamais vraiment à justifier les moyens. 24 Davids ressemble ainsi à s’y méprendre à ces exercices de style aguicheurs sur le papier, mais qui, bien qu’ils se suivent sans déplaisir, n’ont finalement rien de foncièrement neuf et novateur à ajouter…

… Même si à l’heure de fausses nouvelles et d’une désinformation globale toujours plus effrayantes, l’idée de répéter une énième fois ce qui devrait confiner à l’évidence n’est en soi peut-être pas si aberrante.

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