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Libération inattendue d’Ingrid Betancourt : le show médiatico-sarkoziste débute dans la précipitation

Publié le 03 juillet 2008 par Lozsoc
juillet 3rd, 2008 Posted in Europe et International, France, Sarkozisme et bling bling, Vie des médias et parisianisme

Au cas où il se trouverait encore quelqu’un qui ne le saurait pas, Ingrid Betancourt est libre et en bonne santé. Réjouissons-nous tous de cette bonne nouvelle !

On voudra bien noter cependant que le Vatican n’a pas encore parlé de canonisation de l’ex-otage. Normal, Ingrid Betancourt est vivante. Pourtant, certains semblent vivre déjà dans l’attente d’un miracle de Sainte-Ingrid : faire remonter le Leader Minimo dans l’opinion publique, lui qui croupit, depuis des mois, dans les profondeurs de l’impopularité.

Libération inattendue d’Ingrid Betancourt : le show médiatico-sarkoziste débute dans la précipitation

Au moment où son gouvernement s’attaque aux 35 heures, remet en cause les acquis sociaux, gère pitoyablement l’accident de Carcassonne, est incapable de juguler la hausse des carburants, et s’apprête à faire main basse sur l’audiovisuel public, la libération d’Ingrid Betancourt fait partie de ces bonnes nouvelles que Sarkozy aurait tort de ne pas exploiter politiquement.

L’émotionnel est son registre favori. C’est celui qui lui a permis de bercer les Français de douces illusions et de se faire élire à la présidence de la République. Pour l’instant, l’Elysée avance avec prudence. D’abord parce que la libération de Betancourt a surpris le pouvoir exécutif qui n’y a jamais été associé par les autorités colombiennes. Ensuite parce que les Français sont échaudés par un an de fiascos ininterrompus. Une récupération trop voyante de la libération de Betancourt par l’Etat UMP serait assurément très mal ressentie.

Seulement voilà, si Sarkozy et sa bande s’emploient à freiner difficilement leurs ardeurs, les zélateurs du pouvoir, par contre, ne se retiennent plus et en font des tonnes. Depuis hier, ils n’arrêtent pas dans leurs commentaires dithyrambiques, larmoyants, voire mystiques qui sidèrent même les journalistes colombiens en poste à Paris. Les comparaisons incongrues abondent. Les médias ont ainsi conféré à Ingrid Betancourt un statut politique équivalent à celui de Nelson Mandela, Andrei Sakharov, Aung San Suu Kyi, etc. Quant aux analyses politiques sur la Colombie, elles demeurent toujours aussi sommaires que caricaturales (mais, de toute manière, la Colombie n’a jamais été un centre d’intérêt dans cette douloureuse affaire qui, fort heureusement, s’est bien terminée).

Il ne faut surtout pas mettre ce qui va suivre sur le compte d’on ne sait quel esprit chagrin ou négatif, mais dans cette atmosphère d’hystérie médiatique, qui forme comme un écran de fumée sur la dureté des mesures gouvernementales, il est difficile de ne pas se dire qu’il est utile d’être issue de la bonne bourgeoisie colombienne, femme de diplomate, et copine de promo de Villepin à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris. Forcément, cela a permis à ses parents, ses enfants et ses proches d’ouvrir quantité de portes. Les portes du pouvoir. Les portes du mécénat pour soutenir la cause de l’ex-otage. Et celles des médias.

La lucidité oblige à dire que si notre compatriote Ingrid Betancourt avait été une anonyme, on peut être sûr que la diplomatie française n’en aurait rien eu à cirer, et que l’on ne ferait pas pleurer les chaumière sur son sort.

Libération inattendue d’Ingrid Betancourt : le show médiatico-sarkoziste débute dans la précipitation

Prenons deux exemples. Prenons deux exemples. Celui de Michaël Blanc qui, dans la quasi indifférence générale, croupit dans une geôle dans l’île de Bali (Indonésie) pour un trafic de drogue qu’il conteste et celui de Florence Cassez qui a été condamnée au Mexique il y a quelques mois à 96 ans ( !) de prison pour avoir, elle aussi, participé à un trafic de drogue et à quatre enlèvements. Tous deux crient leur innocence et dénoncent une absence de procès équitables.

Si les motifs de leur calvaire ne sont pas comparables, ils ont le même effet : la privation de liberté. Sauf que là, ce sont des Etats qui séquestrent et non une guérilla. A priori, les moyens de pression sont beaucoup plus étendus que lorsqu’on a pour interlocuteurs des milliers de soldats disséminés au fin fond de la jungle. En face, il y a des pouvoirs publics, un appareil d’Etat, une diplomatie, etc.

Parle-t-on de Florence et de Michaël ? Très peu. C’est con à dire, mais s’ils étaient issus du même milieu social qu’Ingrid Betancourt, avec le même réseau relationnel, s’ils avaient été des intimes de Sarkozy ou de Villepin, peut-être aurait-on pu envisager pour eux une édition spéciale sur TV Bouygues ou sur France2 ?


Lire aussi : La Colombie et le brouillage médiatique sarkoziste.


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