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Le songe d’une nuit d’été

Par Madame Charlotte

Auteur : William Shakespeare
Titre original : A Midsummer Night’s Dream
1ère édition : 1600
Ma note :

Résumé :

Les elfes s’éveillent quand les humains s’endorment.
Comment ces deux mondes peuvent-ils alors communiquer ? Contre les lois irrationnelles des bois s’affrontent celles, anti-naturelles, de la cité d’Athènes. Hermia en est une victime. Égée, son père, veut la marier à Démétrius, lui-même convoité par Hélène. Hermia se réfugie dans la forêt, royaume des esprits et des lutins… Comédie légère en cinq actes, en vers et en prose, écrite en 1595, Le songe d’une nuit d’été est un hymne baroque et féerique au pouvoir de l’imagination.

Mon avis :

William Shakespeare, ça fait peur … C’est tout de même un très grand nom de la littérature, une figure mythique : ce n’est pas pour rien qu’on parle de “la langue de Shakespeare” pour désigner l’anglais. Du coup, je n’ai pas encore osé commencer une de ses tragédies, ça me paraissait peut-être trop grand, trop insurmontable, je ne sais pas trop. Cependant, j’ai (re)découvert une pièce comique qui porte également son nom en couverture, Le songe d’une nuit d’été et ce fut un réel plaisir.
Le songe d’une nuit d’été est une pièce étrange et complexe,mêlant plusieurs intrigues, faisant cohabiter deux à trois mondes que tout oppose : la noblesse d’Athènes, la troupe de rustres qui s’improvisent acteurs et le royaume des fées. L’intrigue, surprenante et changeante, est par là très difficile à résumer. Shakespeare nous conte l’histoire d’un triangle amoureux qui vivra de nombreuses péripéties … Il met en scène également la querelle d’Obéron et de Titania, souverains du royaume des fées, les facéties du lutin Puck également appelé Robin Goodfellow ou encore la répétition d’une pièce pour le mariage de Thésée, de la part d’artisans de la Cité peu au fait des conventions théâtrales.

A travers cette pièce, l’auteur se moque des conventions littéraires et des clichés poétiques : le lieu commun du coup de foudre, de l’amour naissant d’un simple regard y est particulièrement malmené ! En effet, à cause d’une petite fleur d’Occident, le triangle amoureux se voit totalement renversé tandis que la reine des fées tombe éperdument amoureuse d’un rustre affublé d’une tête d’âne. Tout en faisant de nombreuses fois référence à la littérature de l’Antiquité (particulièrement aux Métamorphoses d’Ovide et d’Apulée), Le songe se joue des traditions poétiques avec beaucoup d’humour.

Il s’agit en effet d’une pièce très drôle, émaillée de jeux de mots et autre pointes, usant et abusant de quiproquos et d’extraordinaires facilités de scénario. L’auteur puise dans les traditions médiévales et le folklore populaire mais aussi dans la mythologie et les codes littéraires : par conséquent, l’humour du Songe est de deux types, on trouvera dans la pièce les allusions et sous-entendus les plus grivois (c’est en tout cas ce que mon édition ne manquait pas de souligner) à côté d’un humour plus fin et portant souvent sur le thème de l’écriture et du théâtre.
Le plus important dans cette œuvre semble finalement se trouver là, dans la réflexion qui est livrée à propos de l’art théâtral et de l’illusion. Le titre même de la pièce, en créant une certaine attente, semble vouloir (la formule est lourde, mais je tenais à ce “semble”) nous faire privilégier une interprétation par rapport à une autre. L’essentiel de la pièce se passe en une seule nuit, le temps y est figé ou, comme dans les rêves, considérablement allongé ; au réveil, tandis que l’acte V commence de la même façon que l’acte I, les incidents de la nuit apparaissent comme un songe. Le réel semble alors encadrer ce qui n’était peut-être qu’un rêve fantaisiste et rien de plus. Mais cette interprétation est loin d’épuiser les ressources de la pièce … Derrière la fantaisie, l’inconstance et la parodie se trouvent les bases d’une réflexion sur le théâtre et l’écriture. Dans cette œuvre où le vraisemblable est volontairement mis de côté au profit de l’imaginaire, Shakespeare interroge sans cesse son lecteur : jusqu’où est-il prêt à aller dans le pacte théâtral ? Toute pièce n’est-elle pas à l’image de cette mise en scène de Pyrame et Thisbé, cette “drôlerie très tragique” jouée par des artisans et longuement commentée par les spectateurs ?

A priori légère mais source de réflexions sur l’illusion, Le songe d’une nuit d’été est une pièce qui brouille volontairement les pistes et mêle les genres avec une grande virtuosité. A découvrir !

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