Dans mes " Mémoires " en cours d' écriture, j'extrais en avant-première pour vous ma première rencontre avec Philippe Geluck. (On enregistre prochainement une nouvelle saison de " Monsieur Dictionnaire " !
en deux parties, avec une tranche d'information d'une demie heure à 8 heures, je décidai d'y intégrer une séquence de poésie. C'est encore Alain Bosquet qui proclama un jour : " La Belgique est le pays où il y a le plus de poètes au kilomètre carré. " Ce devait être vrai, au vu des monceaux de textes que je recevais. Je les lisais à l'antenne sur un fond de musique choisie. Je continuai à diffuser cette séquence, une fois installé dans l'après-midi.
Et c'est alors que je rencontrai Philippe Geluck dont le me passionnait depuis peu dans (Le premier album sortirait chez Casterman en 1986). Je le connaissais, sans jamais l'avoir rencontré, par ses émissions de télévision : , la plus récente, mais surtout , avec Malvira, marionnette d'une vieille dame acariâtre. Cette émission de fin d'après-midi était censée s'adresser aux enfants, mais élargissait son public grâce à un second degré dingue et pour tout dire qu'on ne trouve que chez nous. Ils n'avaient pas trop d'ennuis car leur productrice, Pauline Hubert, les défendait becs et onges et surtout parce que c'était une heure où les responsables politiques ne regardaient pas la télévision.
, (le 15 novembre, jour de la saint Léopold) où je recevais quant à moi des instructions très strictes sur ce que je pouvais ou ne pas dire dans mon émission phare du matin, en rentrant j'ouvris ma télé et regardai Lollipop. A ma grande stupéfaction (et amusement, cela va sans dire), Philippe et Malvira se trouvaient dans un décor de tapis rouge d'honneur, des enfants de part et d'autre remuant des petits drapeaux belges, avec au fond du décor un trône vide. Ils disaient, sans citer de nom : " On l'attend. Il a promis sa visite pour sa fête. Il ne devrait plus tarder... " Entre chaque séquence, ils en remettaient une couche : " Pourtant on dit que l'exactitude est la politesse des rois ! " Je n'aurais pas pu dire le centième de leur bavardage à la radio le matin. Lorsque leur émission allait se terminer, on vit arriver un quidam en loden vert, affublé d'un ridicule petit chapeau tyrolien, qui dit " Me voilà ! - Mais qui êtes-vous ? - Vous m'avez invité, je m'appelle Baudouin Leroy. " C'était donc Leroy Baudouin !
J'interviewai Philippe et comme il était aussi comédien ( au Théâtre National) et avait triomphé au Théâtre de Poche dans de Henri Michaux, je lui proposai d'utiliser ses talents pour ma séquence de poésie. Nous étions en fin de course pour cette séquence ; les meilleurs poèmes avaient déjà été lus. Celui que je glissai devant Philippe n'était pas terrible. Il se lança pourtant et je ne pus résister au sourire, puis au rire et enfin au merveilleux fou rire. J'étais par terre pour m'éloigner du micro et Philippe resta seul et muet, sans pouvoir prononcer un mot. Cette lueur complice qui s'était éveillée dans nos regards ne nous quitta plus jamais. Nous aurions l'occasion de rire ensemble durant de longues années dans le privé comme sur antenne, en radio comme en télévision ou sur scène. "