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Sur quelques absurdités quotidiennes dans les sciences sociales (12)

Publié le 23 février 2018 par Antropologia

Le lecteur et le chercheur

Une recherche sérieuse fournit au lecteur les preuves de ses affirmations. Il s’agit d’informations rassemblées, critiquées, discutées et classées selon le crédit que le débat a permis de leur attribuer. Pourtant, plusieurs procédés ont été imaginés pour se dispenser d’une telle contrainte. En particulier, il a été conçu l’établissement d’une « méthodologie » posée a priori, qui, respectée, fournirait des résultats vrais. Des informations « déduites » de séries statistiques ou de modèles peuvent aussi être utilisées pour attester d’une réalité.

Dans tous les cas, le chercheur ne devrait pas présenter une information qu’il ne pourrait prouver. Mais cette indispensable exigence limite inéluctablement le champ des affirmations. Ainsi,  les images qui décrivent les périodes ou les groupes sociaux ou culturels relèvent surtout de présomptions auxquelles nous nous livrons quotidiennement. Nous avons le sentiment que Menocchio incarne les meuniers du XVIème siècle, et Montaillou, la vie des villages occitans du XIVème. Mais ni Ginzburg, ni Le Roy Ladurie ne le disent, n’ont le droit de le dire, même si leurs recherches nous conduisent à le penser. Les contraintes du chercheur s’opposent à la liberté du lecteur.

Bernard Traimond

GINZBURG, Carlo, Le fromage et les vers. L’univers d’un meunier du XVIème siècle, Paris, Flammarion, 1976.

LE ROY LADURIE, Emmanuel, Montaillou, village occitan, Paris, Gallimard, 1975.


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