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Chroniques de l’ordinaire bordelais. Épisode 266

Publié le 11 mars 2018 par Antropologia

Pharmaciens de mère en fils…

Interminable journée comme chaque samedi : la banque de France est fermée, le rideau du cours de langues mitoyen également abaissé…. la chaussée de rue des lois affiche complet mais le trottoir désespérément désert….

La croix verte lumineuse, habituellement là pour aguicher le badaud, déprime. A l’intérieur, le pharmacien pantalon à velours mille raies élimé, pull col en v sur une chemise à manche longue n’en peut plus… Il est en bout de course… L’affichage de l’horloge à led indique 18h30… Pas encore l’heure de fermer mais tout de même le moment de déboutonner le bouton du col de sa chemise et deux de sa blouse blanche. La retraite est à portée de main mais Dieu que ces samedis lui pèsent. Voilà 25 ans qu’il a repris la pharmacie de sa mère. Et depuis, pour conserver l’esprit de famille il n’a fait que les modifications réglementaires. Il bénit les laboratoires qui lui fournissent l’essentiel de la décoration de son unique vitrine….

Son comptable va encore tordre le nez à la vue de son chiffre de la journée. Cela fait quelques années qu’il lui demande de réagir, d’évoluer avec sa clientèle. « Jouer les pharmaciens de famille aux conseils avisés n’est plus de mise, il faut pousser à l’achat » lui assène-t-il chaque fois qu’ils se voient…. Il avait espéré que la rénovation de Grand Hôtel lui apporterait une clientèle le weekend mais ce ne fut pas le cas. Les touristes préféraient arpenter la rue Ste Catherine avec sa profusion de vitrines alléchantes dont celles de quelques pharmacies. D’un pas résigné, il avait été voir …Il avait vu : le royaume de la parapharmacie avec ses promotions affichées sur pancartes vertes fluo pour dépoussiérer la relation client, les vendeuses dans les allées prêtes à tous les conseils pour stimuler les ventes, les petits caddys à disposition à l’entrée du magasin pour libérer les mains des clients potentiels, et le pharmacien perdu au bout du labyrinthe qui terminait la vente avec éventuellement une prescription médicale à délivrer. Non, finir en vulgaire épicier derrière son tiroir-caisse c’était trop pour lui! Alors tant pis pour sa retraite… elle sera ce qu’elle sera… Allez courage plus qu’une demi-heure à tenir !

Virginie Perchais


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