Titre:
Sérum
Auteurs :
Cyril Pedrosa (scénario), Nicolas Gaignard (dessin)
Editeur :
Delcourt
Collection
: Hors collection
Année :
2017
Pages
: 160
Résumé :
Paris,
la nuit. Un homme raconte un souvenir à une femme. Enfin, on les
entend parler alors que l'on découvre un Paris nocturne étrangement
désert et surtout éteint. En fait, des panneaux annoncent une union
nationale veillant à réduire les dépenses énergétiques. Et ce
Paris semble bien futuriste, par ces zones de transit sombres et
métalliques. Le lendemain, un homme, Kader, sort de la ville pour
examiner les éoliennes et constate de la corrosion. Un rapport et il
continue sa tournée. Le soir, un nouvel employé, Nils, propose à
Kader de se joindre à son pot de bienvenue. Kader refuse rudement et
s'en va. Il parcourt la ville où les gens regardent les écrans,
achètent illégalement de l'eau, se font tabasser par la police.
Indifférent à tout cela, Kader atteint son but, un centre où il
pourra voir sa fille. Mais son ex-femme est aussi présente et lui
demande des comptes. Kader, sous traitement de Zanédrine, suite à
un passé houleux, ne peut faire autrement que dire la vérité. A sa
femme, à sa fille, à tout le monde. Combien de temps pourra-t-il
contenir sa colère sous ce masque d'indifférence ?
Mon
avis :
Sérum
est une bonne surprise. Un monde d'anticipation étrange, un sérum
de vérité encadré et un personnage principal errant dans une vie
qu'il rejette et qu'il doit supporter au jour le jour, pour sa fille.
Kader peut se confier uniquement à Déborah, une femme holographique
qu'il trouve sur le site Holoporn. Elle l'écoute et un lien d'amitié
semble s'être tissé entre eux. Ce monde aseptisé se révèle plus
cruel qu'il n'y paraît. Ne fut-ce que par ses traitements à la
Zanédrine, ce médicament qui vous force à dire la vérité. Du
coup, quand on vous demande si vous appréciez vos collègues de
travail et que vous les détestez secrètement, ben, comment dire,
les choses se compliquent...
L'histoire
évolue lentement, très lentement, pour s'accélérer vers la fin.
Ce qui donne, à mon avis, un temps de flottement vers le milieu du
récit où on ne sait pas trop où on va. Un petit ventre mou. Où
l'on pressent les événements à venir qui, du coup, ne sont plus
des surprises. Mais en-dehors de cela, cette fiction fait froid dans
le dos et atteint son but. On peut se demander si on ne va pas se
rapprocher doucement de ce type d'univers avec les problèmes de
ressources qui nous pendent au nez.
L'administration
inhumaine est bien toujours présente. Et la chute de l'histoire
n'augure pas spécialement des jours meilleurs. Et du coup, ce récit
d'anticipation lorgne soudain vers la politique-fiction. Là aussi
avec une touche bien pensée qui fait froid dans le dos par son
réalisme.
Cyril
Pedrosa se fend donc d'une tranche de vie dans un Paris de 2050 qui
ne nous laisse pas de marbre. Il touche juste par ce monde glacé et
par ce personnage, Kader, qui subit beaucoup et dont les rebellions
ne semblent pas le mener bien loin.
Paris la nuit, mais pas n'importe quel Paris...
Nicolas
Gaignard prend les pinceaux pour dresser la toile de cette capitale
qui part lentement à la dérive. L'horreur clinique, rendue par des
couleurs ternes, sombres, par un trait réaliste mais dans un style
aux tracés apparents, renforce encore plus les faits se déroulant
sous nos yeux. Ces images régulières, ce cadrage étouffant, ce
rythme ralenti par la composition des pages, créant une lenteur
artificielle qui laisse le temps de s'appesantir sur ce qui se passe
autour de Kader, tout cela renforce encore plus le scénario.
Sérum
est une BD dont le titre pose la problématique à différents
niveaux. Le sérum est le problème, alors qu'il est utilisé comme
la solution. Et de quel sérum ce monde a besoin pour parvenir à
guérir ? Si vous aimez l'anticipation, ne passez pas à côté de ce
sérum.
Zéda
croise Kader !
David
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