
Concentrons-nous sur deux contrevérités, rabâchées en boucle. Premier mensonge: nous entendons partout que «l’Europe impose l’ouverture à la concurrence». L’expression se veut trompeuse, biaisée. Certes, la Commission a édicté des directives pourries, mais toujours avec l’aval des gouvernements nationaux, au premier rang desquels celui de la France. La droite comme la fausse gauche au pouvoir, l’une après l’autre, ont collaboré à ce processus. Ayons un langage de vérité: évoquer l’Europe, c’est, en fait, parler des gouvernements «légitimes», appuyés par des majorités élues. Leur jeu pervers consiste juste à se servir de l’Europe comme d’un bouc émissaire. Second mensonge: à la suite du rapport Spinetta sur la SNCF, il a été dit partout et sur tous les tons que le statut et la dette étaient la cause de tout les maux de notre chemin de fer national. Qui rétablira la vérité? Une vérité exprimée notamment par le cabinet Degest, cette semaine. Et que déclare cet organisme de référence en questions ferroviaires et sociales? Citons dans le texte: «Loin de l’approche dominante qui fait du réseau secondaire et du statut des cheminots les principales sources de dérives financières, nous montrons que c’est plutôt le coût du capital qui pose problème. L’absence de financement de l’État à la hauteur des enjeux du rééquilibrage modal contraint SNCF Réseau à s’endetter toujours plus, et finalement à s’endetter pour rembourser sa dette. Sur 100 euros de dette, 41 euros seulement vont au réseau, le reste va au secteur financier.» Et que conclut le cabinet Degest? Simple: «Ce système est inefficace.» Les cheminots, taxés de «privilégiés», ont-ils une quelconque responsabilité dans cette histoire, sinon d’être de bien utiles boucs émissaires, eux aussi?
[BLOC-NOTES publié dans l’Humanité du 6 avril 2018.]