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La saison de Gérard Garouste

Publié le 20 avril 2018 par Les Lettres Françaises

La saison de Gérard GarousteEcole des Beaux-Arts, Musée de la Chasse, Galerie Templon… Indiscutablement, Gérard Garouste est sur tous les fronts. Il est possible qu’il profite du fait qu’après une longue traversée du désert, la peinture en général a fait un retour dans les musées. Ce n’est que justice pour un créateur qui détonne dans le paysage artistique français. Son œuvre, figurative, entre baroque et maniérisme, est tout sauf une peinture classique faisant appel à la narration. De fait, elle ne raconte pas des histoires, mais propose plutôt des fables décomposées, « hachées », qui rejettent toute linéarité. Certes, l’homme ne facilite pas sa « défense » en déclarant : « ma peinture est un alibi pour un sujet ». Pour autant, on défie les connaisseurs de la Bible ou de la mythologie, de Dante ou de Rabelais, de Cervantès ou du Talmud, de reconstituer ces récits d’après les toiles de Garouste. Si l’œuvre est chargée de connotations culturelles, elle évite toute illustration et, surtout, elle garde une puissance picturale impressionnante.

En toute logique, Diane et Actéon, tiré des Métamorphoses d’Ovide, est le sujet traité au Musée de la Chasse. Actéon, fasciné par la chasse, a le malheur de surprendre Diane dans son bain. La déesse, n’appréciant pas d’être dévisagée par un simple mortel, le transforme en cerf qui se fait dévorer par ses propres chiens. Le mythe, bien entendu, renvoie au voyeurisme érotique et artistique, ses jouissances mais aussi son danger. Autour d’un tableau de grand format, Garouste développe une série de variations qui mettent en scène différentes bribes de cette histoire.

A l’école des Beaux-Arts, c’est en quelque sorte une rétrospective des travaux de l’artiste, quatre pièces monumentales réalisées entre 1987 et 2003 : Les Indiennes, La Dive Bacbuc, Ellipse et Les Saintes Ellipses. Puis, chez Templon, son galeriste attitré, ce sont les tableaux les plus récents, dont le titre, Zeugma, signifie le lien en grec. Selon Garouste, il s’agit d’un travail sur la mythologie biblique. De fait, rien de nouveau, car depuis longtemps son œuvre, qui se nourrit des lectures de la Bible et du Talmud, propose une lecture basée sur ces sources.

Pour autant, tout semble fictif, car le peintre invente un univers imaginaire où les personnages, figures distordues, vrillées sur elles-mêmes, dont les mains forment des gestes déroutants, semblent sortir directement des toiles d’El Greco. Dans cet univers entre rationnel et irrationnel, la folie n’est jamais loin. Mais déjà Diderot a déclaré : « il n’est pas de grand artiste sans un coup de hache à la tête ». Quoi qu’il en soit, avant tout, Gérard Garouste accorde une place essentielle à la transformation des idées et des concepts en images. Autrement dit, il pense en peintre.

Itzhak Goldberg

Gérard Garouste, Diane et Actéon
Musée de la Chasse et de la Nature, jusqu’au 1er juillet

Gérard Garouste, Zeugma, le Grand œuvre drolatique
Galerie Templon et Beaux-Arts de Paris, jusqu’au 15 avril


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