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Prométhée

Publié le 07 juin 2018 par Christophefaurie
Les mythes sont des révélateurs. On les interprète à la lumière de nos préjugés. Voilà ce que j'ai pensé en écoutant une émission de France Culture sur le mythe de Prométhée.
Déjà, il n'y a pas une histoire de Prométhée, mais plusieurs. Par exemple Prométhée aurait donné le feu aux hommes ou il le leur aurait rendu. Les hommes pourraient ne rien avoir demandé. Il semble aussi que, généralement, l'histoire se termine bien : le supplice de Prométhée n'est pas éternel...
Prométhée est revenu à la mode au 18ème siècle. Il a été récupéré par Goethe, qui en fait une sorte de premier "self made man". Puis l'Allemagne, qui se construit alors en imitation / rejet de la France, voit en lui un créateur de nation. Ensuite, l'ingénieur devient un nouveau Prométhée. Il apporte le progrès à l'homme, en particulier la maîtrise du feu. Tout le projet du socialisme serait prométhéen : ce serait une adhésion enthousiaste au progrès, mais en cherchant à ce que tout le monde en profite. Le nazisme est aussi prométhéen. Il se veut la seule conclusion logique de la science. La lumière, c'est la science, et la science (Darwin) dit que la meilleure espèce gagne. L'homme doit être cette espèce. Et le Germain entraîne l'humanité dans un combat pour la domination de la nature. Pour cela, il doit se débarrasser des lois sociales fausses, et revenir 1500 ans en arrière, à l'époque où les Germains originels vivaient selon les lois de la nature.
L'émission ne parlait pas d'aujourd'hui. Peut-être retiendra-t-on du mythe que l'homme pourrait n'avoir rien demandé à Prométhée. Prométhée peut alors devenir la figure de l'utopiste totalitaire qui fait le mal en voulant faire le bien. Il peut aussi être un certain type d'entrepreneur, dont parle la littérature anglo-saxonne depuis la Révolution Industrielle. Son mobile n'est pas l'enrichissement. Il est engagé dans une lutte contre l'obscurantisme. Il est convaincu que ceux qui ne comprennent pas l'intérêt de ses innovations sont condamnés par Darwin. C'est probablement une idée répandue dans la Silicon Valley actuelle. Plus étrangement, c'est aussi devenu une idée de gauche. (Les "deplorables" de Mme Clinton.) Une partie de la société serait fermée au progrès (qui devient plus social que technique). On ne pourrait rien faire pour elle.

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