Magazine Régions du monde

Cinéma sous les étoiles : la passion Van Gogh

Publié le 11 juin 2018 par Aicasc @aica_sc

Désormais la Fondation Clément propose pour chacune de ses expositions une séance de cinéma sous les étoiles. Le film est choisi par l’artiste exposé et devrait tisser quelques liens avec sa propre démarche. Raymond Médélice a sélectionné La Passion Van Gogh. Raymond est un passionné de cinéma et a lui-même créé plusieurs petits films d’animation même si en ce moment il se consacre surtout à la peinture. Son choix s’est porté sur un film récent qui expérimente pour la première fois une technique d’animation très novatrice. De plus, le suspens est au rendez- vous puisque c’est la mort mystérieuse de Van Gogh que les protagonistes du film tentent d’élucider.

 

Cinéma sous les étoiles : la passion Van Gogh

Vincent Van Gogh
Portrait du docteur Gachet

Cinéma sous les étoiles : la passion Van Gogh

Le docteur Gachet dans le film

La mort mystérieuse de Vincent Van Gogh est elle un suicide ? un meurtre ? un accident ? Si c’est un suicide, quels en sont les motifs ? La source de son mal-être est – elle liée à son enfance et à la souffrance de sa mère qui lui a donné le même prénom qu’un premier fils mort né qu’il s’est senti incapable de remplacer ? Ses échecs professionnels répétés et la déception causée à son père en sont – ils plutôt la cause ? A t – il été désespéré par son idylle contrariée avec Mademoiselle Gachet ? Adeline Ravoux était – elle jalouse de son intérêt pour la fille du médecin ? Quel est le motif de sa dernière dispute violente avec le Docteur Gachet ? Etait – il déçu que son frère Théo ne lui envoie pas le matériel de peinture attendu ? S’est – il supprimé pour ne plus être un fardeau financier pour Théo ?

A-t – il délibérément mis fin à ses jours alors qu’il se sentait calme et apaisé, guéri selon ses dernières lettres et qu’il avait commandé toiles, couleurs et pinceaux pour peindre ? S’il s’est suicidé, pourquoi s’est – il tiré une balle dans l’estomac plutôt qu’à la tempe ? Pourquoi ne s’est – il pas achevé sur place, dans le champ, plutôt que de se traîner ensuite jusqu’à sa chambre ? Mais peut – on attendre un comportement cohérent d’un homme excentrique, cyclothymique, dépressif, qui à la suite d’une dispute avec Gauguin, se coupe l’oreille et l’offre à une prostituée ?  Comment un homme mortellement blessé a – t il pu marcher aussi longtemps ? Pourquoi n’a t – on pas retrouvé son matériel de peinture ? Pourquoi le Docteur Gachet, médecin militaire appelé à son chevet n’a pas tenté d’extraire la balle et de le soigner ?

D’où vient le pistolet ? Est – ce lui du Docteur Gachet ? Ou celui de l’aubergiste Ravoux ? Le voyou René Secretan qui le persécutait sans cesse et avait acheté le pistolet de l’aubergiste lui a t – il tiré dessus ? Accidentellement ou volontairement ? La trajectoire de la balle correspond – elle vraiment à un coup de feu tiré à bout portant ou ne suggère-  t – elle pas plutôt une certaine distance entre le tireur et la victime comme le croit le Docteur Mazery ?

Sous le prétexte de remettre la dernière lettre de Vincent à son frère Théo, décédé peu de temps après son frère, le fils du facteur Roulin  part en quête d’un destinataire de substitution et finit par se livrer à une véritable enquête policière. Le suspens est soigneusement entretenu et révèle progressivement  le sentiment de culpabilité de chacun : l’indifférence affichée par Marguerite Gachet sous l’influence familiale en dépit de son attirance pour Vincent ; la violence du Docteur Gachet accusant Vincent, sous le coup d’une jalouse d’artiste médiocre, de ruiner Théo et de le détruire à petit feu ; les gamins du village qui le martyrisaient sans répit.

Deux Américains, Steven Naifeh et Gregory White Smith, récompensés du prix Pulitzer pour leur biographie sur Jackson Pollock et  auteurs d’une nouvelle biographie de Van Gogh, affirment après dix ans de recherches qui leur ont donné accès à la totalité des archives du Musée Van Gogh d’Amsterdam, que ce dernier a été tué par deux adolescents, René Secrétan et son frère. Ils ont consulté quelque vingt-huit- mille  notes, dont des lettres jusque-là inconnues de Vincent à son frère Théo et ses proches et ont travaillé avec une petite armée de documentalistes et traducteurs. Voilà qui bouleverse l’histoire de l’un des peintres les plus célébrés au monde aujourd’hui.

On suit donc pas à pas la passion de Van Gogh, son supplice, ses épreuves, son désespoir et sa solitude que le titre assimile au martyr du Christ, collant au plus près à l’étymologie grecque et latine du mot passion. En dix ans de carrière, de 1880 à 1890 – Van Gogh commence à peindre tardivement à l’âge de vingt-sept ans – ce génie incompris dont les toiles atteignent  aux enchères des sommes colossales aujourd’hui, a réalisé huit- cent- quarante  tableaux et plus de mille  dessins sans réussir à les vendre. Une toile unique, la vigne rouge a été acquise de son vivant.

Cinéma sous les étoiles : la passion Van Gogh

Vincent Van Gogh La vigne Rouge

Mais l’intérêt essentiel de ce  film atypique ne se situe pas là.  Le film est lui-même une œuvre artistique. Par la magie du cinéma, les toiles de Van Gogh prennent vie. Ce film d’animation transforme l’image filmée en image peinte à la manière de Van Gogh. Après un tournage classique avec des acteurs sur fonds verts, des tableaux de Van Gogh ou « à la manière de Van Gogh »  ont ensuite été incrustés par compositing, puis animés en infographie.  Chacun des cent – neuf  plans du film a nécessité la composition de quelques soixante mille tableaux peints à la main par une équipe d’une centaine d’artistes. Et chaque personnage du film a été peint par Van Gogh. C’est comme si le Docteur Gachet, sa fille, René Secretan, Adeline Ravoux, le facteur Roulin et son fils abandonnaient leurs cadres pour vivre sous vos yeux.  On retrouve ainsi dans le film quatre- vingt – quatorze  toiles du maître presque à l’identique et trente et une  autres reproduites en grande partie ou partiellement. Comme un  refrain d’angoisse digne d’Hitchcock, le  vol lourd et funeste des corbeaux de la toile Champ de blé avec corbeaux ponctue le film. Les barques au bord de l’Oise oscillent doucement , le semeur lance ses graines à la volée.

Cinéma sous les étoiles : la passion Van Gogh

Vincent_van_Gogh Champ de Blé aux corbeaux (1890)

De multiples tentatives culturelles tentent depuis peu de rendre l’art et l’histoire de l’art attrayantes. L’Atelier des lumières  propose Rue Saint – Maur une immersion dans les œuvres de Klimt. Ce film d’animation, La Passion Van Gogh,  vous familiarise avec bonheur avec l’œuvre picturale et la vie de Van Gogh, vous en imprègne et contribue à mieux faire percevoir sa personnalité torturée :

Que suis-je aux yeux de la plupart des gens ? Une nullité, un original, un homme désagréable ; quelqu’un qui n’a pas de situation sociale et qui n’en aura jamais, bref un peu moins que la plus grande nullité.

Dans la vie du peintre peut-être que la mort n’est pas ce qu’il y aurait de plus difficile. Toujours la vue des étoiles me fait rêver aussi simplement que me donnent à rêver les points noirs représentant sur la carte géographique villes & villages. Pourquoi,  les points lumineux du firmament nous seraient ils  moins accessibles que les points noirs sur la carte de France ?

Si nous prenons le train pour nous rendre à Tarascon ou à Rouen, nous prenons la mort pour aller dans une étoile. Ce qui est certainement vrai dans ce raisonnement c’est que étant en vie nous ne pouvons pas nous rendre dans une étoile. Mourir tranquillement de vieillesse serait y aller à pied.

 Cette approche novatrice du film d’animation, cette prouesse technique,   est un évènement. Voilà pourquoi, ne pas manquer de découvrir ce film lors de cette projection exceptionnelle pourrait être votre priorité le samedi 21 Juillet à 19H

Dominique Brebion

 


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Aicasc 12249 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte