Pour que la récente hausse des taux se transforme en tendance structurelle à long terme, il faut avant tout que les perspectives de croissance nominale s’améliorent. Et pour cela, deux conditions doivent être réunies, entre hausse du potentiel de croissance réelle et hausse de l’inflation.Sur le plan de la croissance, la faiblesse de la productivité et le vieillissement de la population dans les pays développés continuent de peser sur la croissance réelle. D’autres facteurs qui freinent ce potentiel de croissance incluent : moins de nouvelle main d’œuvre disponible ; peu de signes de progrès technologiques capables de se traduire en une productivité plus élevée. En d’autres termes, l’Amazonification de l’activité économique n’a pas rendu la main d’œuvre plus productive, dans l’ensemble. Du côté de l’inflation, le vieillissement de la population contribue à maintenir les salaires à des niveaux relativement bas, en raison d’un effet négatif sur la productivité, tandis que les niveaux élevés d’endettement limitent également l’inflation. Au même titre que la hausse récente de la croissance, le raffermissement de l’inflation est essentiellement de nature cyclique, et non structurelle. Dans ces conditions, le potentiel de hausse des taux est donc limité. Pour un investisseur obligataire, les niveaux actuels des taux américains font figure de points d’entrée attrayants. Potentiel de rendement réel et statut de valeur refuge En termes de rendement absolu, il est clair que la hausse des taux équivaut à des niveaux de valorisation meilleur marché et donc à des rendements attendus plus élevés. Fait important, les rendements réels se sont améliorés, malgré la hausse récente de l’inflation. Au plus fort du creux cyclique, les obligations souveraines américaines à 2 ans ont dégagé un rendement réel négatif de -2,1%, aujourd’hui celui-ci s’établit à +0,6% ! De leur côté, les rendements à long terme n’ont pas augmenté autant. Il n’est donc pas nécessaire aujourd’hui d’augmenter le risque de duration pour obtenir des rendements réels positifs.
En relatif, le spread entre les obligations souveraines allemandes et américaines est à son plus haut niveau depuis les années 90. L’économie mondiale est en train de passer d’un cycle de reprise synchronisé, en 2017, à un ralentissement de la croissance désynchronisé en 2018 : l’activité économique en Europe est en décélération, tandis que la croissance américaine devrait se maintenir à ses niveaux actuels.
Autres articles
-
Loi PACTE : des changements positifs pour les plateformes de financement participatif
-
M&A : des signaux d’alerte dans un climat toujours dynamique
-
La banque privée traditionnelle est-elle vouée à disparaître ?
-
Le retour du risque politique perturbe les marchés
-
Les marchés actions européens devraient rester bien orientés à court terme
Une analyse rapide de la sensibilité apporte de riches enseignements : il faudrait que le taux de rendement des obligations américaines à 2 ans (aujourd’hui à 2,5%) s’élève d’environ 150 points de base en un an, pour que la chute des cours anéantisse l’intérêt des coupons. En somme, il faudrait un scénario très « hawkish » de la Fed, peu envisageable, pour faire disparaître ce coussin de rendement.
A propos de l'auteur : Witold Bahrke est stratégiste chez Nordea Asset Management.
