Ces jours-ci, quand l'étincelante Vénus s'enfuit sous l'horizon ouest, son amant Mars (dans la mythologie gréco-romaine) se hisse au-dessus du sud-est. Attendait-il qu'elle s'en aille pour se montrer ? Ou au contraire, tente-t-il de la rattraper pour lui dire son amour ? En tout cas, on pourrait penser que c'est nous qu'il essaie de rattraper car, dans sa danse orbitale autour du Soleil, la planète portant le nom du dieu de la Guerre (fils de Juno et père de Romulus, Mars fut d'abord dieu de l'agriculture) n'a pas cessé en effet de se rapprocher de la Terre au cours des derniers mois. Si bien qu'il est impossible de la manquer en fin de soirée, lorsque l'astre fait son entrée dans le ciel étoilé. Une entrée fracassante, cette année. Quel éclat ! Une fois n'est pas coutume, Mars la rouge est désormais plus brillante que son aîné Jupiter (certes plus éloigné, mais tellement plus grand). Cela va durer encore plusieurs jours.
Mais alors, pourquoi Mars brille-t-elle autant cette année ? Tout d'abord, précisons que le 27 juillet sera le jour de son opposition. Autrement dit, la Planète rouge sera alignée avec la Terre et le Soleil. Entre parenthèse, ajoutons que la Lune aussi : ce même soir, la Pleine Lune nous fera l'honneur du belle éclipse totale, et cela, à côté de Mars ! Mais, revenons à Mars. L'opposition ne serait-elle pas le moment où la distance entre nos deux planètes devrait être la plus petite ? Eh bien, pas tout à fait. En raison de l'excentricité de son orbite, cela n'aura lieu que quelques jours plus tard, le 31 juillet. L'espace entre Mars et la Terre ne sera que de 57,6 millions de kilomètres seulement. Un excellent cru. Plus exactement, le meilleur depuis 2003 qui est resté dans les annales pour être la plus petite distance entre Mars et la Terre depuis... 60.000 ans. L'écart entre les deux planètes n'était alors que 55,7 millions de kilomètres, soit deux millions de kilomètres de moins.
#Mars on July 10th. https://t.co/22o5idEnlU Some vague markings are visible through the extensive dust blanket. pic.twitter.com/N40iK9qG9W
- Damian Peach (@peachastro) 15 juillet 2018
Observer Mars
Naturellement, ce rapprochement augmente la taille apparente de notre voisine. Ce qui se traduit donc par une luminosité plus généreuse à rendre jalouses Jupiter et Vénus, ainsi que bien des étoiles qui règnent sur le ciel de l'été (Véga, Deneb, Altaïr, Arcturus, etc.). Au fait, saviez-vous que Mars a une rivale dans le ciel ? Vous pouvez la voir scintiller en cette saison, à quelques encablures à l'ouest de la planète rouge, non loin du centre de la Voie lactée. C'est Antarès, l'anti-Arès (nom grec de Mars), une étoile rouge qui palpite au sein du Scorpion. De prime abord, on pourrait la croire cette étoile petite et faible, mais en réalité, c'est une supergéante rouge qui, un jour ou l'autre (dans quelques siècles ou quelques millénaires...), explosera en supernova. Et là, inutile de vous dire que sa luminosité dépassera de très loin toutes celles des autres astres du ciel terrestre (Soleil et Lune exceptés).
Avec une taille apparente plus importante que de coutume, cela veut donc dire que c'est le meilleur moment d'observer Mars ? Alors, oui, mais... cela ne sera pas évident. En fait, cela dépend de l'endroit où vous êtes et aussi de la tempête de poussière qui sévit en ce moment à sa surface. Apparue fin mai, la petite tempête est devenue monstrueuse au point d'englober toute la planète ou presque. Le ciel s'est considérablement obscurci ce qui n'est pas sans poser de problème au rover Opportunity, très dépendant de la lumière solaire. Les éclaircies se font attendre et comme souvent, avec de telles tempêtes, la poussière se dissipe lentement. En clair, la météo martienne n'est pas de notre côté et ne nous favorise pas l'observation des reliefs emblématiques, si vous possédez une lunette ou un télescope. Car hélas, la tempête tend à gommer ses taches sombres et à uniformiser la surface martienne. La calotte polaire sud toutefois peut être observée. Et comme l'été approche dans l'hémisphère sud, on devrait voir sa taille diminuer au fil des semaines.
Mars brille en ce moment dans le Capricorne. En France métropolitaine, quand l'astre passe le sud (donc, quand il est au plus haut dans le ciel), il n'est guère plus élevé d'une vingtaine de degrés au-dessus de l'horizon. Ce n'est donc pas beaucoup. Les couches de l'atmosphère sont encore épaisses et en conséquence, non dénuées de turbulences. Autrement dit, la Planète rouge apparaît assez floue et fluctuante dans un instrument. Des conditions qui pénalisent l'observation aux latitudes moyennes. Pour en profiter au maximum, il faut donc se diriger vers les latitudes plus basses. Au passage, signalons que le meilleur endroit pour observer l'éclipse totale de la Lune du 27 juillet - la plus longue du siècle - est l'île de la Réunion. Et Mars brille à côté.
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