Lors de la bulle Internet, notre élite gouvernementale disait "le débit créera les usages". Je ne sais pas si Internet a créé beaucoup de nouveaux usages bien glorieux.
En tout cas, Youtube m'en a fait découvrir un. C'est un moyen d'entrer dans la vie d'un homme. En particulier d'un artiste. On peut le voir jouer de près, et je n'avais pas compris jusque-là que la façon de jouer est particulière à une personne. Elle exprime une personnalité. Il y a le virtuose, qui joue pour la galerie, et celui qui exprime son âme. Et on peut les entendre parler de ce qui compte pour eux. Au fond, je ne les vois pas comme des gens admirables, mais comme des extra terrestres. Ils ont eu une obsession, qui les a amenés à devenir uniques. Pour le reste, ils ont généralement eu une vie déglinguée. Ils étaient mal finis.
Dans ma liste, il y a Glenn Gould et Scott Ross. Ils n'ont pas été des interprètes. En particulier Glenn Gould. Ils ont fait sonner les partitions d'une façon qui aurait déconcerté leurs auteurs. Ils ont fait ce que dit Borgès. Ils n'ont pas interprétés Bach ou Scarlatti. Ils ont inventé à l'identique leur oeuvre. Et cette oeuvre, écrite au vingtième siècle, n'a rien à voir avec l'oeuvre, identique, écrite au dix-septième.
Il y a aussi Martha Argerich et Claudio Arau, chacun pour des raisons différentes. Mais en particulier parce qu'ils ont une façon de jouer qui a transformé mon appréciation de celle de leurs collègues. Il y a des gens qui sont des pianistes. Et d'autres qui imitent des pianistes.