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586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoir

Publié le 28 juillet 2018 par Juan

586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoir

Ils voudraient faire croire à une "tempête dans un verre d'eau", mais l'affaire des barbouzes de l'Élysée a pris une tout autre ampleur.`Cette affaire est politique: elle revalorise le parlement, elle dévoile les dangers de l'autocratisme jupitérien, elle détruit le mythe du "Nouveau monde" auprès de certains de ses soutiens.


L'une des véritables révélations de cette affaire concerne les travers de la gestion du pouvoir, autocratique comme jamais, sans contrôle et en roue libre. Macron lui-même plaide l'erreur humaine. Comment corrige-t-on l'erreur humaine dans nos systèmes démocratiques ? Avec des contre-pouvoirs. Macron justement a affaibli, et continue d'affaiblir les contre-pouvoirs de notre régime: il attaque la presse dans son ensemble, il réduit les pouvoir de l'Assemblée avec son projet de révision constitutionnelle. Il fustige les syndicats, met au pas sa majorité godillot qui n'en demandait pas tant.

La gestion de pouvoir d'Emmanuel Macron est autocratique, opaque et dangereuse. Il est heureux qu'elle soit dévoilée, et cette révélation, la vraie de cette affaire, a frappé tous les observateurs politiques, de gauche comme de droite.

"Tout d'un coup, nous nous rendons compte qu'Emmanuel Macron dirige la France de manière assez opaque" Ariane Chemin, journaliste au Monde.

586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoir

"Barbouze: membre d'une police secrète ou parallèle, ou d'un service d'espionnage (parfois nom masculin en ce sens)." Source: Larousse.
Alexandre Benalla faisait partie d'une police parallèle: il détenait une arme au nom d'une prétendue"mission de police", comme la commission sénatoriale l'a prouvé, un logement de fonction et une voiture équipée de matériel de surveillance, un badge du GPSR sans en être membre, et pouvait se procurer des attributs (casque et brassard) pour assurer la sécurité du président de la République sans faire partie des forces assermentées pour cela ni même leur rendre des comptes. Vincent Crase, le second homme, partageait une partie de ses mêmes avantages. Vendredi après-midi, Libération publie une video avec de nouvelles violences des deux barbouzes contre des manifestants, trois heures avant les faits de la Contrescarpe.

En cherchant bien, la presse trouve un autre proche de Benalla, un conseiller "secret" et ancien agent secret. Ludovic Chaker, cet " ami d'Alexandre Benalla occupe un poste inusité, celui de chargé de mission auprès du chef d'état-major particulier du président de la République" écrit le journaliste Jean-Dominique Merchet. "Sauf erreur de notre part, c'est la première fois qu'un tel poste est créé au sein de l'un des institutions les plus confidentielles du pays. " Nous sommes hors-sol ", juge un bon connaisseur de ces milieux."

Il y avait des barbouzes à l'Elysée, démasqués quand ils ont été identifiés par la presse sept semaines après des actes de violence.

Bestimage
L'Elysée soutient Alexandre Benalla. Des éléments de langage lui ont été préparés. L'interview chez TF1 semble avoir été dictée, aux mépris des faits, par la cellule de com' de l'Elysée: au Monde, Benalla déclare"Je n'ai pas le sentiment d'avoir trahi le président de la République, j'ai le sentiment d'avoir fait une grosse bêtise". A TF1, il reconnait au contraire la " trahison".

Mieux, l'agence privée Bestimage, qui a l'exclusivité de la communication photographique élyséenne, aurait été mandatée pour s'occuper également de Benalla. Mimie Marchand, la patronne de l'agence, dément tout rôle alors que les journalistes du Monde la surprennent au moment de leur interview :"J'étais venue donner des clés d'une maison de vacances à Biarritz."

Plus c'est gros...


586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoirContradictions
Au second jour des auditions parlementaires, Macron parle devant les députés de son camp, des ministres et le président de l'Assemblée nationale. Ah la séparation des pouvoirs... Sarkozy aussi avait pris l'habitude hypocrite de parler aux députés de sa majorité par troupeau entier pour les revigorer le moment venu. Macron s'exprime, il est filmé, il braille cette formule désormais célèbre : "Le responsable c'est moi, qu'ils viennent le chercher!".

Le lendemain, lors d'un déplacement en province, il poursuit, et se contredit: il se dédouane, tiens donc: " ce n'est pas le président de la République, c'est le cabinet de l'Elysée, ils ont pris leur responsabilité. "

Il provoque aussi au sujet de Benalla: tantôt " fier de l'avoir recruté" (" parce qu'il avait un parcours différent"), tantôt honteux d'avoir été " trahi". C'est un " baiser de l'araignée", une manière de dire que ce "Benalla" 'n"est pas du sérail. Il minore ensuite l'importance des faits. Où est passé le candidat Macron qui réclamait des sanctions contre les violences policières ? Il en appelle au sens de la sanction proportionnée, niant les faits premiers: un barbouze a frappé. L'IGPN a confirmé ne pas avoir jugé bon d'ouvrir une enquête après le visionnage de la vidéo, cette normalisation des pratiques de nervis ne choque donc plus.

Convergence
C'est la revanche du parlement. La Macronista est au centre, au centre de la tenaille, celle de la vérité. Et voici que et la gauche, et la droite s'allient. Macron devrait se réjouir de cette démarche " transpartisane".

Curée
586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoirAlexandre Benalla est une cible facile. On évite de parler de son acolyte, dont le statut intermittent est plus surprenant encore (cf. " Intermittent"). On évite de s'interroger sur le système de pouvoir, la gestion du pouvoir, le rapport aux contre-pouvoirs.

L'affaire Benalla est une belle diversion.

On oublierait presque cette présidence des riches, la reprise du chômage, le trou d'air de la croissance malgré cette politique de l'offre si favorable aux entreprises.

On oublierait la prochaine mise en examen de Muriel Pénicaud, soupçonné de favoritisme dans un contrat de 13 millions d'euros.

"C'est à une véritable fête qu'Emmanuel Macron a convié cette année les gros patrimoines." Capital, juillet 2018.


D'après le Canard Enchaîné, toute cette affaire Benalla/Crase serait une vengeance de la police, jalouse des passe-droit de ces barbouzes de l'Elysée. Après cette seconde semaine, et les interventions publiques de Macron, Collomb et Benalla, la réaction des syndicats policiers, tous grades confondus, témoigne l'ampleur du mépris et de la défiance à l'égard de Macron, Collomb et le gouvernement.

Ainsi le Syndicat CFDT des Cadres de la Sécurité Intérieure s'étonne-t-il que "tout citoyen puisse venir interpeller des manifestants." Celui des commissaires de police abonde: "Alexandre Benalla se répand dans les médias alors qu'il est mis en examen. La justice appréciera."

Faute
Cette affaire d'Etat repose sur plusieurs fautes. Bizarrement, les responsables de la Macronista, Alexandre Benalla, et Jupiter lui-même, sont peu précis sur la " faute".

De quelle faute parle-t-on ?

Quand Benalla sort de son silence, il se contredit. Dans les colonnes du Monde, mercredi, puis sur TF1, vendredi, l'ancien chargé de mission de Macron reconnait une " grosse faute"... ou pas: il ne voit pas de faute dans les violences, mais dans le tort qu'il a causé à Macron:"J'ai le sentiment d'avoir fait une grosse bêtise. Et d'avoir commis une faute. Mais cette faute, elle est plus d'un point de vue politique : je n'aurais jamais dû aller sur cette manifestation en tant qu'observateur, puis j'aurais, peut-être, dû rester en retrait." .En fait, la faute qu'il reconnait n'est pas d'avoir frappé un homme au sol, bien au contraire. Il revendique le droit à frapper un homme au sol. Il excuse son geste par deux raisons.

Primo, le couple victime de ses coups avait commencé quelques instants plus tôt en jetant deux projectiles en verre sur les forces de l'ordre. Deuxio, les CRS, pourtant nombreux, ne parviendraient pas à maitriser le garçon et sa compagne. le premier argument met en rage les syndicats de policiers (cf. plus bas). Le second est démenti par le commandant de la compagnie de CRS auditionné dans la semaine.


Hypocrisie
Macron est hypocrite. Il en appelle au devoir de responsabilité avec autant de grandiloquence qu'il se sait intouchable.

"S'ils veulent un responsable, il est devant vous ! Qu'ils viennent le chercher". Emmanuel Macron


Que cela serve de leçon sur la limite institutionnelle de ce régime que Macron pratique avec outrance. Un chef d'Etat britannique ou allemand n'aura pas pu avoir ce mépris.

Inquiétudes
Ce n'est pas une affaire d'Etat ("une tempête dans un verre d'eau" commente Macron), mais bizarrement Jupiter-tout-puissant est resté 5 jours silencieux sur les ondes et les réseaux sociaux. Quand on connaît l'ampleur habituelle du trollisme présidentiel sur Twitter et Facebook, parfois en plusieurs langues pour être sûr que partout en Europe la grandeur de notre jeune monarque soit appréciée à sa juste valeur, ce silence de quelques jours vaut cure de quelques mois. Ce ramadan présidentiel est stupéfiant. Il témoigne de l'importance accordée par l'Elsyée et Macron lui-même à cette affaire, et qu'importe son numéro d'acteur la semaine passée.

Dès les premières heures suivant les violences du 1er mai, les patrons de la Macronista - Macron, Philippe, Collomb, Castaner, et les hiérarchies policière et de l'Elysée - sont au courant que les deux hommes pris en flagrant délit sont des collaborateurs du Palais. Mais silence, secret et discrétion. L'inquiétude est grande. Pour preuve, révèle BFM, Ismaël Emelien, le conseiller politique du président de la République, a eu en sa possession les images de vidéosurveillance des manifestations du 1er mai obtenues de manière illégale par Alexandre Benalla.

C'est du recel.

L'inquiétude est encore palpable quand Macron sort de son silence. Il a la trouille de la dislocation de sa majorité. La trouille encore quand il refuse son audition parlementaire au nom de la séparation des pouvoirs lors qu'il tient une réunion " interne" avec les députés de son camp. La trouille toujours quand il braille " venez me chercher " à l'abri de son château.

Intermittent
Il y a un homme qui s'en sort " bien". Vincent Crase, le second homme des violences de la place de la Contrescarpe à Paris, rapidement dégagé de l'Elysée puisqu'il n'y collabore aux dires de l'Elysée qu' " occasionnellement". C'est le statut de cet homme qui interroge: militant marcheur, salarié de En Marche, il donne aussi des coups de main ponctuels à la sécurité du palais présidentiel et s'affiche avec des brassards de police dans les manifestations du 1er mai.

On croit rêver.

Pourtant les commissions d'enquête parlementaire ne se sont pas encore penché sur son cas.

Parce qu'il est intermittent sans doute...


Irresponsables
Ils ont un modèle, Jupiter, celui-là même qui crie au chat perché bien à l'abri de son statut. le hashtag AllonsChercherMacron fait le régal des internautes. Au total, plus de 3 millions de tweets sont publiés sur cette "tempête dans un verre d'eau" en 7 jours.

Lundi, Gérard Collomb, ce ministre de l'intérieur qui pérore depuis 16 mois sur sa maitrise de tous les sujets sur le front de la sécurité du pays, apparaît bien naze et incompétent devant les députés puis les sénateurs: il ne sait rien, n'a rien fait, n'a rien entendu. Et quand il a parlé avec Macron trois jours après l'explosion médiatique, il a "surtout évité de parler de l'affaire Benalla".

De qui se moque-t-on ?

Devant la commission sénatoriale d'enquête, au Sénat, Alexis Kohler, Secrétaire Général de l'Élysée, et à ce titre le véritable directeur de la présidence, apparaît paumé, hagard, brouillon. Il explique que Benalla "n'a jamais été en charge de la protection du président. "

De qui se moque-t-on ?

Lâcheté
Du temps de Sarkofrance, nombre d'antisarkozystes d'hier devenus macronistes aujourd'hui auraient braillé de tout leur corps avec autant d'énergie qu'ils sont aujourd'hui silencieux contre les faits du moment. L'acharnement de certains d'entre eux à recycler les arguments sarkozystes d'antan - critique de la presse dans son ensemble, dévalorisation du parlement, complotisme - est aussi lâche que cette macronista savait être arrogante.

Lâcheté aussi à l'Elysée. Quand les faits sont révélés, c'est sauve-qui-peut: sanction anecdotique et couverture. Même le couple de victimes, dont les rageux macronistes ont rapidement dénoncé les actes précédents leur interpellation musclée, n'ont-ils pas été arrêtés comme tant d'autres ce 1er mai ? Pour éviter que la présence de Benalla et Crase ne soit révélée également.

"Le vrai courage c'est de prendre ses responsabilités avant que la presse ne révèle le scandale et avant que la commission d'enquête ne découvre chaque heure des versions contradictoires." Olivier Faure, 24 juillet 2018

Lâcheté inquiétante car il s'agit de responsabilité d'État.

"Avez-vous compris, monsieur le Premier ministre, qu'il n'y a pas de pérennité ni de légitimité à l'État républicain quand les ministres se défaussent sur les fonctionnaires qui exécutent les ordres qu'ils donnent ?" Jean-Luc Mélenchon au premier ministre, 24 juillet 2018.


Mensonges
Quand Macron se décide à parler, il ment. Il relaye des canulars pour faire croire que la presse ment (cf. " Presse""). Il répète que la sanction contre Benalla a été " proportionnée" à cette " trahison". Vraiment ?Aucune retenue de salaire, un poste maintenu auprès du Président, et en prime, un appartement de fonction le 9 juillet quai Branly... Sans rire ?

Benalla se décide à faire de de même, il parle. Et il ment. Ses actes du 1er mai ont tout de la préméditation: il a demandé à être observateur un jour de " congé". Il a rodé durant la journée avant de s'en prendre au couple désormais célèbre de la place de la Contrescarpe. Il a frappé ses victimes.

Il minore aussi son importance auprès de Macron. Le nombre incroyable de photographies les présentant ensemble durant cette seule première année du quinquennat, tout comme la communication au Journal officiel de sa nomination témoigne d'un rôle plus important.

Il ment enfin sur les violences qu'il a commises, elles ont été filmées. Il ose expliquer avoir chercher à ceinturer une victime déjà à moitié assomé par un coup matraque. Il a été inculpé pour 5 faits: "violences en réunion", "immixtion dans l'exercice d'une fonction publique", " port et complicité de port prohibé d'insignes réglementés", .", "recel de détournement d'images issues d'un service de video-surveillance de police."

A l'Assemblée ou au Sénat, on se demande également si certains ont bien compris qu'ils ont prêté serment: Collomb, Kholer, les hiérarques policiers se défaussent les uns après les autres sur à peu près tous les sujets.

Voir " Pieds Nickelés"

Mythe
Seconde victime de l'affaire, le mythe du nouveau monde. Macron candidat promettait d'être exigeant en matière de violence policière. Boum, pif, paf, patatras... Quand l'un de ses proches participe à des violences policières, il estime que la sanction - suppression de 15 jours de congés payés (lol!) - est " proportionnée" (selon ses termes). La République " exemplaire", qui a pris le relais de la " République irréprochable" de Nicolas Sarkozy, révèle ses zones d'ombre et ses barbouzes: des gens non qualifiés, parfois intermittents, qui court-circuitent les forces de sécurité et confondent leur statut avec un permis de baffe contre des opposants.

Cette Macronista justifie les violences policières.

A la faveur des auditions sénatoriales, on découvre aussi que l'équipe de Macron à l'Elysée n'a pas jugée bon de faire de déclaration de patrimoine... C'est béta.

Jeudi soir, alors que quelques supporteurs macronistes se déchainaient contre la France insoumise accusée de collusion politique et idéologique avec le Front national, d'autres macronistes votaient la loi Asile et Immigration en seconde lecture. Le Projet de l'extrême droite " enfin " devenu loi grâce à la Macronista, merci Macron.


Cette affaire n'est pas un scandale d'Etat, expliquent à longueur de journées les officiels et les officieux de la Macronista. Bizarrement pourtant, les députés macronistes de la commission d'enquête, la présidente Yaël Braun-Pivet en tête, font tout pour torpiller l'instruction.

Cette affaire n'est pas une affauire d'Etat mais >Benalla a été protégé, et l'affaire cachée.

Lundi, le directeur de l'ordre public et de la circulation à la préfecture de police de Paris (DOPC), Alain Gibelin confirme à trois reprises avoir vu Benalla pendant sa période de sanction. Mardi, après une protestation de l'Elysée, il revient en audition et plaide l'erreur de bonne foi.

Macron abime ainsi les institutions: la REM avait presque réussi à redresser l'image d'un régime aux contre-pouvoirs efficaces avec la création de commissions parlementaires. Patatras ! Macron se fait filmer avec le président de l'Assemblée nationale en train de brailler à la résistance et la responsabilité. Jupiter montre qu'il reste maître des ficelles et des pantins LREM. Et la commission d'enquête de l'Assemblée nationale implose. Jeudi, la gauche et la droite se désolidarisent. Quelques trolls macronistes, relayés par Castaner et quelques autres primaires, fustigent l'alliance"rouge-brun", faisant mine d'ignorer que républicains, socialistes, communistes, insoumis ont aussi quitté la commission de l'Assemblée.

Macron refuse de comparaitre devant les député(e)s. Il interdit aussi à ses proches de se rendre à l'Assemblée. Mais au Sénat, pas le choix. Pas assez de sénateurs aux ordres pour faire obstruction.


Sous la pression médiatiques, après la révélation des faits par le Monde, la Macronsita craque et accepte à contre-coeur que deux commissions d'enquête, l'une au Sénat l'autre à l'Assemblée, soient constituées. Mieux, la révision constitutionnelle en cours d'examen par les député(e)s godillots LReM qui prévoyaient la suppression d'un tiers des élus et la réduction de leur pouvoir d'amendement et de propositions, est suspendue. La convergence des oppositions pour comprendre et mettre à jour comment Macron gouverne surprend les macronistes.

Au Sénat, les supporteurs jupitériens sont quasiment inexistants, la commission auditionne quasiment qui elle veut. A l'Assemblée, les auditions virent au pugilat. La présidente macroniste censure autant qu'elle peut. Les députés de l'opposition massacrent les auditionnés. Jeudi, la commission des députés explose. Les auditions reprennent le lendemain avec uniquement les macronistes dans la plus grande indifférence.

On peut railler cette revalorisation du parlement. Elle est une joyeuse surprise, et sacrément efficace à jouer un rôle de "révélateur", à défaut d'être un réel contre-pouvoir faute d'une opposition suffisamment volumique. Elle révèle a minima les réflexes autocratiques rageux de l'équipe macroniste. Plutôt que de faire preuve d'un peu de recul, puisque le fond de cette affaire serait " anecdotique", sa rage démontre le danger qu'il y a à la voir au pouvoir affaiblir la République et nos droits fondamentaux.

La macronista est un danger. Elle l'a prouvé toute la semaine.

"Le cœur de la réforme institutionnelle, c'est de dire que l'exécutif doit avoir plus de contrôle du législatif. Ma bagarre [...] c'est de dire qu'au contraire il faut un législatif qui contrôle mieux l'exécutif. (...) On a un président de la République qui concentre non pas les pleins pouvoirs, mais plein de pouvoirs, et qui n'est absolument pas contrôlé." François Ruffin

586ème semaine politique: l'abécédaire d'un scandale d'Etat qui devient une farce du pouvoir

Cette affaire rappelle aussi combien les ficelles tirées par Macron sont tenues au plus près.
Primo, des relais macronistes sur les réseaux sociaux publient dès les révélations du Monde des images volées à la préfecture de police pour minorer les accusations contre Benalla: " Selon les documents obtenus par Mediapart" explique le site d'information, " plusieurs comptes Twitter soutiens de LREM ont diffusé, jeudi 19 juillet, les images de la vidéosurveillance de la place de la Contrescarpe, avant de les effacer."

Secundo, les portes-flingues de la Macronista apparaissent en temps réel pour ce qu'ils sont des perroquets des éléments de langage élyséens.

Macron se tait 5 jours durant, même silence du côté des Griveaux, Bergé, Castaner et autres Schiappa. Macron se décide à parler, ils se réveillent. Quand Benalla parle sur TF1, voici Marlène Schiappa, Aurore Bergé et un député LReM qui répètent simultanément les mêmes mots ("Cette interview montre un homme qui ne ressemble pas à la petite frappe").


Deux des plus fidèles sortent du lot: Christophe Castaner, qui refuse d'être auditionné bien qu'il soit l'employeur direct de l'un des deux barbouzes, Vincent Crase. Cet homme se planque quatre jours durant,"pour ne pas gêner", la trouille au ventre. Il attend les éléments de langage élyséens. Puis le voici à l'attaque. Il éructe sur les réseaux sociaux. Il explique que la sanction de Benalla a été réelle et sérieuse. Quand on l'interroge sur la présence du garde du corps dans le bus des Bleus de l'équipe de France de football vers l'Elysée, il justifie que Benalla était là pour s'occuper des bagages.

Plus c'est gros...

Quand les oppositions de droite comme de gauche votent des motions de censure, il les accuse de sédition, rien de moins.

L'autre Pied Nickelé exemplaire est une femme, Marlène Schiappa. La sous-secrétaire d'Etat alibi au droits des femmes explique sans rire que les Français n'en ont cure de cette affaire. La preuve, dans son charmant bled familial de Bourgogne, elle n'en a pas entendu parlé. Quand le canard du coin publie un article sur le sujet, la voici qui insiste et sélectionne les quelques passages allant dans son sens. Mais elle se voit publiquement contredite par l'auteur de l'article. Et se trompe sur le titre du journal.

Ces Pieds Nickelés n'ont pas compris la force et la violence des réseaux sociaux.


La police s'est abimée. Elle s'est sans doute aussi vengée. Les versions contradictoires de certains de ses responsables ont révélés des failles et, surtout, une soumission inquiétante aux actes illégaux de l'Elysée.

Cf. " Défiance."

Port d'armes
Alexandre Benalla avait un port d'armes.

Quand le secrétaire général de l'Elysée est interrogé sur le nombre d'employés de l'Elysée qui ne sont pas membres des forces de sécurité mais possèdent une arme, il bégaye: il ne " sait pas" si d'autres collaborateurs de l'Elysée ont un port d'armes, ni même comment Benalla a été recruté.

Le port d'armes à l'Elysée mériterait davantage de précaution, non ?


Quand le Monde révèle l'identité du casqué violent, le 18 juillet, le scandale éclate. Puis les révélations s'enchaînent. Et Macron s'énerve. Filmé devant ses proches députés et ministres, puis lors d'un déplacement en province, Macron se trumpise: hier, autoritaire et donneur de leçons de comportement à l'encontre de celles et ceux qui l'interpellent publiquement (lycéen, grévistes, infirmières etc), il se montre aujourd'hui agressif contre les médias qui réclameraient "du sang et des larmes". Il mêle des vrais canulars et des vraies révélations pour abimer la crédibilité de la presse. A moins qu'il n'ait rien compris lui-même.

Et il blague tout sourire pour déminer cette affaire d'État. Cette légèreté quand l'heure est grave dévoile un homme hors sol, et une autre forme de mépris. Il attaque les médias et l'opposition dans son ensemble. Que reste-t-il ? Le bonapartisme à la petite semaine.

Ridicule
Le ridicule ne tue plus, sinon l'hécatombe aurait été sévère. Macron qui joue à l'exil à Baden-Baden pour si peu, ses ministres tétanisés qui racontent n'importe quoi, la hiérarchie policière et ministérielle qui défile et se défausse, les supporteurs macronistes qui relaient sans recul ni honte le moindre arguments, toutes les rumeurs même les plus complotistes.


Sur l'antenne de TF1, Alexandre Benalla explique combien tout ceci n'est qu'une tempête dans un verre d'eau. L'interview est enregistrée quelques minutes avant une autre révélation: Benalla et son compère Crase ont été filmés en train de brutaliser d'autres manifestants trois heures plus tôt avant les violences de la place de la Contresca

Dans la cascade de révélations sur les avantages et passe-droit de ce chargé de mission si proche d'Emmanuel Macron, il y a ce badge d'accès permanent de l'Assemblée nationale. L'intéressé se justifie, c'était uniquement pour accéder à la salle de sport de l'hémicycle, l'une des plus pourries et moins dotées de ces lieux de pouvoir à proximité de l'Elysée. Ce grand foutage de gueule continue sur d'autres sujets: après sa rétrogradation, 15 mois après son installation à l'Elysée, Alexandre Benalla récupère un appartement de 80 mètres carrés quai Branly. Un appartement dont le Secrétaire Général ne sait rien: " je ne suis pas intervenu et je n'interviens pas sur l'attribution des logements à la résidence de l'Alma."

Violences (policières)
Les forces de l'ordre sont soumises à forte pression. Par exemple ce 1er mai, la confrontation avec des Black Blocks, a été violente. Et largement rappelée, et à dessein, lors de ces auditions d'enquête parlementaire dont l'objet a été circonscrit aux " évènements du 1er mai" pour éviter tout remous au sein du pouvoir.

La difficulté du maintien de l'ordre tient pourtant à l'exemplarité que l'on attend des forces de sécurité en pareille situation de tension. Le recours excessif au gaz, les frappes de femmes et d'hommes sans défense sont des fautes qui méritent sanction. Et que dire d'AdamaTraore, tué par la police il y a deux ans jour pour jour ? A-t-il fait l'objet de pareille couverture médiatique ? Non.

"À qui veut se donner la peine de simplement regarder, les réseaux sociaux offrent depuis deux ans des tombereaux de vidéos de brutalités policières proprement ahurissantes" Frédéric Lordon.

" Grâce" à l'affaire Benalla, les violences policières sont enfin révélées à des gens qui fermaient les yeux et détournaient le regard. Mais à cause du danger que causait cette affaire pour leur mentor, nombre de macronistes ont préféré minoré et excusé ces violences illégales.

"La mise au débat public des manières réelles de la police via les méfaits d'un séide de seconde zone fait irrésistiblement penser à Al Capone, tombé pour fraude fiscale." Frédéric Lordon.

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