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Tribunaux pour étrangers et quotas : résistance administrative ?

Publié le 08 juillet 2008 par Juan
Tribunaux pour étrangers et quotas : résistance administrative ?
La commission sur "le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration" présidée par Pîerre Mazeaud considère les quotas migratoires contraignants mise en place par Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux "irréalisables ou sans intérêt."
«Une politique de contingents migratoires limitatifs serait sans utilité réelle en matière d'immigration de travail, inefficace contre l'immigration irrégulière.»
Le Figaro et Libération se sont procurés des exemplaires dudit rapport, quelques jours avant sa remise officielle (vendredi) au Ministre de l'Identité Nationale. Des fuites opportunes qui ont permis à Pierre Mazeaud de déclarer dans les heures qui ont suivi que le rapport n'était "pas terminé."

Le rapport serait plus indulgent avec la création de tribunaux pour étrangers : il soulignerait «la légitime interrogation sur la dualité de juridiction», un point qui nécessite une modification constitutionnelle. Les services de Rachida Dati ont en effet alimenté les membres de la commission de statistiques sur l'engorgement des tribunaux par les affaires, et les recours, ne concernant que des étrangers: on dénombrait 40 000 de décisions ainsi rendues en 2007 contre moins de 30 000 en 1996. Le nombre total de saisines des seuls tribunaux administratifs est passé de 30 000 en 2003 à 46 480 à 2007. Le nombre d'affaires d'«étrangers», rapporte LE FIGARO, pèse plus du quart de la totalité des affaires enregistrées chaque année devant l'ensemble des juridictions administratives du premier degré.
«La commission a été frappée par la multiplicité des actes administratifs susceptibles d'être pris à l'encontre d'un étranger […] chaque mesure pouvant faire l'objet d'un, voire de plusieurs recours.»
La commission a préféré botter en touche, et renvoyer au niveau européen toute évolution législative: «Il est impossible d'imprimer aujourd'hui de profonds infléchissements de la politique d'immigration hors de ce cadre.» les mesures techniques proposées par le rapport Mazeaaud sont les suivantes :

Registre de population. Améliorer la connaissance statistique sur l'immigration en créant notamment des registres municipaux tenant à jour la liste de tous les habitants de la commune. L'idée de «fichiers» obligeant un administré à s'enregistrer lors de son installation dans une municipalité a toujours soulevé une grande méfiance en France. Ce dispositif existe dans de nombreux pays européens dont la Belgique.

Éloignements. Réorganiser le système des reconduites. Seuls les étrangers contrôlés en situation irrégulière pourraient faire l'objet d'une mesure d'éloignement.

Outre-mer. Maintien et renforcement des mesures dérogatoires adaptées à la situation particulière de Mayotte, de la Guyane et de la Guadeloupe. Une restriction du droit du sol pour Mayotte a été envisagée au cours des débats mais ne figure pas dans le rapport.

Renforcement du rôle du Parlement. Instaurer un débat sur l'immigration et l'émigration organisé lors du dépôt du rapport d'activité sur l'immigration. À l'issue, vote d'une loi-programme pluriannuelle à caractère économique et social avec des objectifs chiffrés.

Formation. Le rapport préconise une meilleure formation des personnels des préfectures afin de limiter les erreurs de procédure qui génèrent du contentieux.

Vidéo-audiences. La commission souhaite des audiences tenues au plus près des centres de rétention, dans des tribunaux ad hoc, afin d'éviter les escortes et les déplacements inutiles ou la généralisation des «vidéo-audiences». Les magistrats et les avocats y sont opposés. Créé en 2003, dans la zone d'attente de l'aéroport, le tribunal de Roissy n'a jamais été utilisé.

Juge . Afin d'éviter les contradictions entre l'administration et le juge des libertés, la commission propose d'allonger la période pendant laquelle ce dernier doit se prononcer pour lui permettre de mieux connaître le dossier.

Recours. Création d'une commission départementale chargée d'examiner les décisions contestées par les étrangers pour éviter l'engorgement des tribunaux.

(source LE FIGARO)

Brice Hortefeux et Nicolas Sarkozy l'ont bien compris: la présidence française de l'Union est l'occasion unique de mettre en place au niveau européen un cadre contraignant qu'ils n'ont pas réussi à faire accepter totalement en France.
Commentaires :
1. Personne ne s'est étonné que cette commission fut essentiellement composée de magistrats du Conseil d'Etat, sans représentant du milieu associatif de défense des immigrés. Le spectre d'analyse de ce groupe dépassait largement des sujets proprement institutionnels.
2. L'engorgement de tribunaux à cause de contestation d'étrangers ne légitime aucunement la création de juridictions spécialisées. Il légitime le renforcement des moyens de la justice. Surtout, il est la conséquence directe du durcissement administratif et policier contre les étrangers. Expulsions => Recours => engorgement.

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