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[Critique] Mektoub, My Love – Canto Uno

Par Wolvy128 @Wolvy128

[Critique] Mektoub, My Love – Canto Uno

[Critique] Mektoub, My Love – Canto Uno
Sète, 1994. Amin (Shaïn Boumedine), apprenti scénariste installé à Paris, retourne un été dans sa ville natale, pour retrouver sa famille et ses amis d’enfance. Accompagné de son cousin Tony (Salim Kechiouche) et de sa meilleure amie Ophélie (Ophélie Bau), Amin passe son temps entre le restaurant de spécialités tunisiennes tenu par ses parents, les bars de quartier, et la plage fréquentée par les filles en vacances. Fasciné par les nombreuses figures féminines qui l’entourent, Amin reste en retrait et contemple ces sirènes de l’été, contrairement à son cousin qui se jette dans l’ivresse des corps. Mais quand vient le temps d’aimer, seul le destin – le mektoub – peut décider.

Près de 5 ans après le fabuleux La Vie d’Adèle, couronné d’une palme d’or à Cannes, Abdellatif Kechiche revient sur le devant de la scène avec Mektoub, My Love – Canto Uno, le premier volet d’une saga familiale réalisée sur plusieurs années. Ce qui frappe immédiatement avec cette nouvelle réalisation du cinéaste franco-tunisien, c’est le réalisme avec lequel il conte cette tranche de vie estivale plutôt ordinaire au demeurant. D’un naturel désarmant, le long-métrage immerge en effet rapidement le spectateur dans son histoire, le rendant complice de moments de vie troublants, perturbants, mais aussi enivrants et bouleversants. En plaçant sa caméra au plus près des protagonistes, et en étirant à l’extrême ses scènes, le réalisateur transcende littéralement la banalité/beauté de ses plans, faisant par exemple d’une simple séquence de discussion sur la plage un instant de fascination absolu. Au-delà de la fascination, le film exerce aussi, à l’instar de ses personnages, un formidable pouvoir d’attraction. Pas étonnant, dès lors, que les 2h55 passent à une vitesse folle, rendant finalement extrêmement douloureuse la séparation avec Amin, Ophélie, Tony, Céline, Charlotte et toute la bande. On aurait tant voulu que cet été 1994 ne se termine jamais.

[Critique] Mektoub, My Love – Canto Uno
Avec Mektoub, My Love, Kechiche n’aborde pas seulement les premières amours adolescentes, mais traite plus généralement de la notion de désir, et de tout ce qu’elle implique en termes de jeux de séduction, de regards complices ou encore de frustrations cachées. Finement écrits, les rapports humains sont aussi parfaitement décortiqués et représentés à l’écran, allant bien au-delà de la seule esthétique des corps auxquels certains spectateurs semblent s’être arrêtés. A travers le regard d’Amin, véritable projection autobiographique du réalisateur, le récit dépasse effectivement la superficialité apparente des personnages pour leur offrir, à tous, une belle complexité. Une complexité également retranscrite dans le jeu incroyablement naturel des acteurs. Outre Shaïn Boumedine, superbe dans la peau de cet artiste sensible aux sentiments étouffés, on retiendra surtout ici l’interprétation solaire d’Ophélie Bau. Pour un premier long-métrage, elle irradie littéralement l’écran à chacune de ses apparitions. C’est peu de dire que l’un comme l’autre risquent de ne pas manquer de projets au regard de leur magnifique performance. A leurs côtés, on soulignera aussi le travail de Lou Luttiau, jeune actrice à la présence indéniable.

Aussi troublant que bouleversant, Mektoub, My Love – Canto Uno est donc un drame profondément sincère, abordant les rapports humains avec un naturel déconcertant. Emmené par de jeunes acteurs à la présence magnétique, le long-métrage délivre une formidable tranche de vie de 3 heures qui renvoie inexorablement à nos propres expériences. La preuve parfaite que l’on peut réaliser un grand film avec de petites choses. Prodigieux !


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