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Le Géant de Fer. Désarmer les consciences

Par Balndorn
Le Géant de Fer. Désarmer les consciences
Résumé : Quelque chose de gigantesque se profile à l’horizon. Hogarth Hugues vient tout juste de sauver un énorme robot tombé du ciel. Le jeune Hogarth a désormais un très grand ami et un problème encore plus grand : Comment garder secrète l’existence d’un géant de 15m ? Cette mission se complique encore plus lorsqu’un agent du gouvernement un peu trop curieux arrive en ville pour chasser « l’envahisseur alien » et que les forces terrestres, maritimes et aériennes des militaires américains sont envoyées pour démolir le géant.
L’Amérique des années 50. Sa consommation à outrance, sa guerre apocalyptique contre le communisme, et… son improbable amitié entre un jeune garçon et un robot géant débarqué d’une autre planète. Sorti huit ans après la chute de l’URSS, Le Géant de Fer détonne par la représentation éminemment pacifiste de la Guerre froide qui vient de s’achever, et propose rien de moins que la démilitarisation des imaginaires.
Une autre histoire de la Guerre froide
Consciemment ou non, Brad Bird puise son inspiration chez Hayao Miyazaki. On trouve déjà des robots géants similaires dans Le Château dans le ciel, dont la forteresse volante qui donne son nom au film – Lapiuta – héberge des reliques de cet art militaire robotique. Mais alors que le maître nippon met en scène l’inexorable progression de la violence armée et une image bagarreuse du pacifisme, le cinéaste américain cherche au contraire à désamorcer la spirale du conflit. Sa solution : désarmer les consciences.Le géant de fer que débusque le jeune Hogarth a largement de quoi pulvériser la ridicule armée américaine venue l’assaillir, mais sa rencontre avec son compagnon humain l’a changé. Comme ce dernier le lui a enseigné, et que le robot reprend à son compte non sans humour, il vaut mieux imiter Superman et sa puissance mise au service du Bien qu’Atomo et sa force à l’état brut. En somme, Hogarth se charge de l’éducation morale du robot, à qui il offre rien de moins qu’une âme.Dit ainsi, Le Géant de Fer ressemble à n’importe quel banal dessin animé hollywoodien, où le Bien et l’amour des autres priment sur le reste. Or, replacé dans ses contextes de production et de narration, le film prend un autre sens. Dans les années 50, en pleine croisade contre les Rouges, comme dans les années 90 marquées du sceau de la victoire, les États-Unis se rêvent en va-t-en-guerre, et l’imaginaire cinématographique dominant nourrit l’ivresse belliciste. De ce point de vue, oser franchement sortir un film d’animation qui tourne en dérision l’armée nationale (paranoïaque et stupide, au point qu’elle détruise la petite ville de Rockwell) et propose un autre regard sur une civilisation étrangère, en voyant dans le géant un être à aimer plutôt qu’un Spoutnik à abattre, tient de la gageure. Pari réussi. À sa manière, Brad Bird contribue à démilitariser l’imaginaire cinématographique, et à substituer aux dessins animés guerriers de la Guerre froide (pensons à Duck and Cover, œuvre de propagande où la tortue Bert enseigne aux jeunes Américains comment se protéger de la bombe…) une invitation à l’altruisme.
Sympathie 3D
Ce qui se traduit dans l’animation même. Le Géant de Fermarque en effet une date importante dans l’histoire du cinéma d’animation : il s’agit d’un des premiers longs-métrages à faire un usage massif de la 3D, en particulier pour l’animation du géant proprement dite. Le traitement en volume le distinguant du reste de l’image en 2D, il n’en ressort que plus gauche, et donc plus sympathique aux yeux du jeune spectateur.Cet usage spécifique que Brad Bird fait de la 3D – qui cherche le contraste plastique plus que le photo-réalisme – singularise d’autant plus son œuvre que par la suite la technologie 3D servira majoritairement à une représentation dite « réaliste » du monde, là où Le Géant de Fer s’amusait, avec poésie, à sculpter en relief les pièces métalliques du robot, sans chercher à lui conférer une quelconque once de réalité.
Le Géant de Fer. Désarmer les consciences
Le Géant de Fer, Brad Bird, 1999, 1h26
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