Le 5 juillet les
délégués de l'UDC, réunis à Brigue en assemblée, se sont donc rangés à l'avis de Christoph Blocher. Ils l'ont fait par 326 voix contre 166 (voir le communiqué de l'UDC (ici)) . C'est-à-dire de manière nette. Ils ont donc choisi la voie de la raison de préférence à celle de l'émotion. En effet, le premier moment de
colère passé, à la suite de Christoph Blocher, ils ont compris le piège qui leur était tendu par leurs ennemis. Car il est difficile de parler d'adversaires quand les armes employées
contre vous sont celles de la désinformation systématique.
Ce piège Christoph Blocher l'a très bien expliqué dans le service de presse de l'UDC du 23 juin (ici) : "En votant non, on rejette aussi le projet que l'on souhaiterait soutenir; en votant oui, on approuve également le projet dont on ne veut pas. Si
le paquet global est rejeté en votation, on ne saura jamais ce que le peuple voulait vraiment; s'il est accepté, on ne saura jamais ce que le peuple ne voulait pas." Le 21 juin déjà
j'avais expliqué cette position dans mon article Christoph Blocher ne joue pas le jeu et c'est tant
mieux .
Après avoir reconnu qu'est pertinent l'argument de fond selon lequel "répondre en un seul vote à deux questions différentes" est "une entorse grave à la
démocratie", Serge Gumy, dans "24 Heures" du 7 juillet (ici) ne croit pas que cet
argument explique le revirement de l'UDC : "Car s'il s'agissait vraiment de défendre les droits populaires, quoi de mieux que d'en faire usage ?". En somme les dés sont pipés mais vous devriez
tout de même jouer avec. Serge Gumy prend vraiment ses lecteurs pour des imbéciles.
Serge Gumy imagine donc une autre explication plus conforme à son délire anti-UDC : "Si l'UDC se renie, c'est parce qu'elle se sent prise au piège. Elle rêvait
d'une victoire facile sur l'extension à la Roumanie et à la Bulgarie, en surfant sur la peur des Roms. Elle s'est retrouvée à devoir torpiller l'entier de l'accord sur la libre circulation, et
peut-être, par effet domino, tous les accords bilatéraux. Le peuple aurait-il suivi ? Sans doute pas. L'économie non plus, dont l'UDC se targue d'être le défenseur. Et voilà les souverainistes
contraints d'avouer implicitement que pour la Suisse, l'UE est un partenaire incontournable..."
Le problème de Serge Gumy est que pour lui les positions de l'UDC ne peuvent être qu'utilitaires et dictées par la perspective de victoires, que ce soit lors d'élections
fédérales, cantonales ou lors de votations. Si tel était le cas l'UDC chercherait à mettre de l'eau dans son vin et ferait comme les autres partis bourgeois, elle sacrifierait ses
convictions sur l'autel des alliances et elle ne serait pas ostracisée par les autres. Or il n'en est rien. Serge Gumy ne peut l'ignorer. Encore une fois il prend ses lecteurs pour des
billes.
L'UDC, et Christoph Blocher en premier, se sont toujours prononcés pour la voie bilatérale avec l'Union européenne. C'est même bien pourquoi ils se sont toujours opposés, et s'opposent toujours,
à l'adhésion à l'Union européenne. Serge Gumy feint de l'ignorer et de se réjouir que l'UDC soit obligée de reconnaître que l'UE est "un partenaire incontournable". Ce qui est présenté par
lui comme un scoop est en réalité une lapalissade. Serge Gumy n'a pas beaucoup de considération pour ses lecteurs.
La conclusion qu'ose Serge Gumy est située à la même hauteur que ses vues, c'est-à-dire basses : "Mal prise, en perte de vitesse dans les sondages, l'UDC tente de s'en sortir par une
pirouette pitoyable. Elle se pose en dindon de la farce démocratique. Elle en est plutôt le bouffon."
Petites remarques donc sur cette conclusion :
1) Les sondages ne donnent qu'une indication à un moment donné. Ils sont d'autant plus relatifs quand des valeurs de pourcentages absolus sont fournies sans préciser les marges
d'erreur.
2) Il faut du courage pour reconnaître que l'on s'est trompé. Il faut donc saluer l'UDC qui ne persévère pas dans l'erreur qui aurait consisté à tomber tête la première dans le piège tendu par
ses ennemis.
3) L'UDC n'est pas le dindon de la farce anti-démocratique jouée par le parlement puisqu'elle l'a éventée.
Pour parodier Michel Audiard : "Les bouffons, ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît." Les lecteurs de Serge Gumy comprendront...
Francis Richard