S’appuyant sur des recherches et des reportages approfondis, Spy Schools révèle que la mondialisation – l’afflux d’étudiants et de professeurs étrangers et l’exode des Américains pour les études, l’enseignement et les conférences à l’étranger – a transformé l’enseignement supérieur américain en une ligne de front pour l’espionnage international. Dans les laboratoires, les salles de classe et les auditoriums, les services de renseignement de pays comme la Chine, la Russie et Cuba cherchent à comprendre la politique américaine, les recrues pour des opérations clandestines et l’accès à des recherches militaires et civiles sensibles. Le FBI et la CIA font de même, se servant d’étudiants et de professeurs étrangers comme informateurs. Les universités ignorent ou même tolèrent cette ingérence, malgré la tension entre leurs valeurs mondiales et la culture nationaliste de l’espionnage.
Zak Allal
Le redéploiement des services de renseignement dans le contexte actuel est un sujet à suivre avec beaucoup d’attention. Contrairement au contexte de guerre froide où les menaces étaient plus perceptibles et parfois mieux prises en compte par certaines populations étudiantes, le monde de 2018 est beaucoup plus flou. La notion d’ennemi est très abstraite dans l’esprit de la majorité des gens. Si le risque de la violence terroriste de nature islamiste est présent régulièrement dans les médias, les activités d’espionnage sont reléguées au terrain de la fiction. Un tel relâchement de l’attention facilite l’action des services de renseignement étrangers sur le territoire français mais c’est aussi le cas de nombreux pays.
Le monde universitaire est une cible facile. Il est structurellement ouvert aux prises de contact étant donné son besoin de communiquer régulièrement le contenu de ses travaux vers l’extérieur. Il est donc relativement facile pour un agent de renseignement étranger sous couverture diplomatique de s’insérer dans ce milieu.
L’objectif traditionnel d’un service de renseignement porte encore principalement sur le recrutement de sources. Les approches restent classiques. Le représentant d’une ambassade aborde l’étudiant(e) dans le cadre d’un colloque ou d’une conférence. Il entame une discussion pour évaluer le comportement de l’étudiant (e) à son égard. Si il ne perçoit pas de résistance particulière, il lui proposera de le ou de la revoir. Lors de cette rencontre, il proposera éventuellement à l’étudiant(e) de lui fournir des petites notes d’analyse sur des sujets se rapportant à ses centres d’intérêt car il est débordé et il ne peut pas tout appréhender. Si l’étudiant (e) accepte cet échange assez banal en apparence, il crée les conditions d’un relation qui peut l’amener par la suite à être recruté. Il se passera un certain temps avant d’en arriver à cette étape car le modus operandi d’un service de renseignement pour valider la pertinence d’une source est assez laborieux. Sans tomber dans une quelconque forme de paranoïa, il est important de prendre en compte ce type de situation. Il est en fait facile pour un étudiant « tamponné » par un agent de renseignement de ne pas donner suite à ce type d’approche très basique. Il en existe d’autres plus complexes, notamment quand l’agent de renseignement sait qu’il a affaire à une personne avertie ou à quelqu’un qui est déjà sensibilisé par un service de sécurité de son propre pays. En France, la vantardise ou la volonté de se faire reconnaître par un interlocuteur potentiellement intéressant facilite ces approches aléatoires.
L’article Écoles d’espionnage : Comment la CIA, le FBI et le renseignement étranger exploitent secrètement les universités américaines est apparu en premier sur Infoguerre.