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Lecture : Amélie Nothomb - Acide sulfurique

Par Gui10sto
Lecture : Amélie Nothomb - Acide sulfuriqueJ'ai, à propos d'Amélie Nothomb, un avis plutôt neutre ou plutôt, un avis partagé. Ses passages télévisés et ses allocutions me donnent l'impression qu'il s'agit d'une personne intéressante, qui a certainement la tête remplie d'un fouillis d'idées qui partent dans tous les sens. De plus elle a plusieurs fois ouvertement affiché son amour pour la musique de TOOL qui est, comme chacun le sait, le plus grand groupe de rock and roll de l'univers et du reste (Non, la réponse n'est pas 42, bordel Douglas !).En revanche, comme autrice (je milite contre l'usage du mot AUTEURE qui est un étron absolument dégueulasse) je n'ai pas souvent été emballé. Et pourtant j'y reviens souvent. Il faut dire que vu le nombre de romans publiés par la belge qui ne collectionne donc pas que les couvre-chefs, il y a matière à lire. Et aussi matière à remplir les étagères des bourses aux livres et autres bouquinistes où abondent ses romans sur le marché de l'occasion où j'achète une bonne moitié de mes livres. 

Avec Acide Sulfurique, roman paru en 2005 (le quatorzième publié de l'autrice), Nothomb transpose l'idée de la télé-réalité au camp de concentration. Le principe est donc de permettre aux téléspectateurs de choisir les éléments à éliminer du camp. Comme on peut s'en douter, à sa sortie, ce bouquin a déclenché la ire des perpétuels va-t-en-guerre pourfendeurs de tous les petits enculés qui manquent de respect à la mémoire des millions de juifs morts durant la folie hitlérienne. Comme on s'en doute, à sa sortie, tous les gentils petits soldats de la bonne moralité se sont émus d'un tel scandale littéraire. Comment ? Oser banaliser la Shoah ? Mais quelle horreur ! Il est un peu pénible de constater, une fois de plus, que dans la France des années 2000 on en est encore à ne pas pouvoir faire la littérature que l'on souhaite et que l'on aime s'offusquer et se fustiger d'être les collabos d'une soi-disant banalisation, plutôt que de se demander quelles sont les qualités intrinsèques du livre. Mais il est vrai que dans ce domaine, il n'y a pas de quoi pavoiser des heures durant. L'élément le plus réussi du roman réside dans le jeu de l'attirance et de la répulsion de deux femmes que tout oppose : une prisonnière et son bourreau. Un thème qui n'est pas nouveau chez Nothomb et qui fait visiblement partie de ses idées fondatrices. Pour le reste, un bouquin vite écrit (Nothomb confie qu'elle ne corrige jamais ses premiers jets) vite lu et vite digéré.

ExtraitTandis qu’elle peinait au déblaiement des gravats, elle eut une crise de haine en pensant aux spectateurs. C’était une implosion lente qui partait de la cage thoracique et qui montait aux dents, les changeant en crocs : « Dire qu’ils sont là, avachis devant leur poste, à savourer notre enfer, en feignant sûrement de s’en indigner ! Il n’y en a pas un pour venir concrètement nous sauver, cela va de soi, mais je n’en demande pas tant : il n’y en a pas un pour éteindre son téléviseur ou pour changer de chaîne, j’en mets ma main à couper. » Le kapo Zdena vint alors l’arroser de coups de schlague en l’invectivant, puis alla s’occuper ailleurs. « Je la déteste aussi, et pourtant beaucoup moins que le public. Je préfère celle qui me frappe à ceux qui me regardent recevoir sa hargne. Elle n’est pas hypocrite, elle jour ouvertement un rôle infâme. Il y a une hiérarchie dans le mal, et ce n’est pas le kapo Zdena qui occupe la place la plus répugnante. »

Amélie Nothomb - Acide Sulfurique - 198 pages

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