Pas de laitue pour Noël
Veille de Noël, Intermarché, rayon des salades. De l’autre côté du stand, Titie, une ancienne de mon école primaire. Elle s’approche.
Salutations réjouies, nouvelles d’ici et d’ailleurs, tout en discutant je tends une main vers la laitue. Elle m’arrête :
– Oh la! Tu as vu le prix? 2,90 la salade!
C’est vrai, je ne calcule pas trop les prix, déjà que c’est bien pénible les courses, en plus maintenant avec Yuka pour tout scanner… et ce n’est pas la salade qui me ruinera.
– Regarde les endives, deux fois moins chères, et jolies.
Moi je voudrais de la laitue, c’est meilleur, plus tendre et moins amer. Mais je suis bloquée, Titie vient de me dire qu’elle vit avec 1000 euros par mois pension de réversion incluse, « tu sais l’agriculture…». Et 3 chats dont « deux réfugiés ». « Qui ne rapportent pas… ».
Elle compte, « pas comme tous ces riches qui ne savent même plus où mettre l’argent tellement ils en ont » me dit-elle en pleine révolte des gilets jaunes qu’elle m’ a commentée avec un grand sourire. Le sourire de la petite fille d’autrefois.
J’imagine le quotidien avec 1000 euros « tu sais, l’agriculture… », le froid « je mets thermostat 1 », les restrictions, je sais sa vie de labeur autrefois à la ferme, je vois son cabas léger fermé, heureusement mon caddie est loin, décidément la laitue si chère ce n’est pas possible, 1 euro 50 c’est trois baguettes premier prix.
-Oui, c’est vrai, tu as raison, je prends les endives.
Je les ferai cuire, pour après Noël, quand on ne veut plus que du léger.
Et je vais mettre mon gilet, encore, après les fêtes, ah oui, je vais le mettre.
Thérèse Marsan
23/12/2018