Alors que Paris continue à rêver de profiter du Brexit pour s'emparer du titre de capitale européenne de la FinTech, son offre d'accélérateurs, incubateurs et autres structures d'accompagnement spécialisés reste très inférieure à celle de Londres, surtout depuis la discrète disparition du programme dédié de l'Atelier BNP Paribas. Heureusement, La Banque Postale apporte aujourd'hui son renfort [PDF].
Je ne tiens pas de liste à jour, mais les lieux réservés dans la capitale (et autour) aux startups du secteur financier doivent se compter sur les doigts d'une main (le Swave, le Truffle FinTech Incubator, le Plug and Play, le Hub de la FFA…), représentant quelques dizaines de places disponibles. Certes, les nombreux dispositifs généralistes peuvent compléter ce maigre panorama, mais ils ne sont pas aptes à délivrer des services aussi pertinents, notamment des mentors maîtrisant parfaitement les thématiques abordées.
La « platform58 » de La Banque Postale va donc significativement renforcer l'offre actuelle, puisqu'elle sera capable de recevoir chaque année jusqu'à 10 jeunes pousses en phase d'amorçage. Sa promesse de valeur est attractive : hébergement sans limitation de durée (totalement gratuit pendant 2 ans), programme de soutien actif de 12 à 24 mois, avec des professionnels de la banque et de ses partenaires (Visa, KissKissBankBank, 1000 Mercis, Télécom ParisTech…), le tout sans prise de participation.
Les candidates retenues seront sélectionnées par un comité mixte, comportant des anciens entrepreneurs et des collaborateurs issus des différents métiers de La Banque Postale (y compris dans ses filiales FinTech). Les critères appliqués intègrent à la fois le potentiel de rupture des solutions développées et une dimension d'engagement citoyen et/ou social, susceptible de définir la marque de fabrique de la « platform58 ». En tous cas, les 7 premières admises montrent une certaine diversité, entre outil d'épargne et assurance mobile, en passant par la caution locative et la cybersécurité.
S'il faut rester prudent sur l'idée évoquée d'utiliser l'incubateur comme un moyen de rapprochement entre grand groupe et startups (dont une manifestation particulièrement néfaste est l'effet « zoo » des visites organisées), l'initiative de La Banque Postale possède au moins une caractéristique originale, ouvrant des perspectives extrêmement prometteuses : à partir de fin janvier, l'incubateur sera en effet installé – au cœur de Paris – dans les mêmes locaux que Ma French Bank, la future néo-banque de l'institution.
Avec un peu d'imagination et d'audace, la logique pourrait être poussée à l'extrême. En supposant que la nouvelle-née soit conçue – selon la tendance du moment – sur un modèle de plate-forme, elle pourrait être positionnée comme un réceptacle de l'incubation. À ce titre, elle intègrerait les services créés par les jeunes pousses accompagnées (sous conditions, si nécessaire), leur procurant ainsi une opportunité de validation sur le marché tout en accélérant drastiquement l'évolution de Ma French Bank.
Après tout, la raison d'être de la « platform58 » et l'ambition sous-jacente de La Banque Postale sont d'identifier des collaborations possibles avec des acteurs émergents… et de les concrétiser. Or sa néo-banque en gestation est le véhicule idéal pour ce faire et la mise en place explicite d'une telle approche (avec ses règles) représenterait un énorme plus pour toutes les parties impliquées. En d'autres termes, pourquoi les incubateurs s'arrêtent-ils toujours aux moyens mis en œuvre, en oubliant de définir leurs finalités ?