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Jean Paul II, Libération des déterminismes, chemin de maturation

Publié le 11 juillet 2008 par Walterman
59 Grâce à la relation d'intimité avec Dieu dans l'Esprit Saint, l'homme se comprend également lui-même d'une façon nouvelle, il comprend sa propre humanité. L'image, la ressemblance de Dieu qu'est l'homme depuis le commencement est ainsi pleinement réalisée(1). Cette vérité intime de l'être humain doit être continuellement redécouverte à la lumière du Christ qui est le modèle du rapport avec Dieu, et en lui doit être également redécouverte la raison pour laquelle l'homme "ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui-même" en union avec les autres hommes, comme l'écrit le Concile Vatican II, justement en raison de la ressemblance avec Dieu qui "montre bien que l'homme ... (est) l'unique créature que Dieu a voulue pour elle-même" dans sa dignité de personne, mais aussi dans son ouverture à l'intégration et à la communion avec les autres(2). La connaissance effective et la réalisation plénière de cette vérité de l'être adviennent seulement par l'Esprit Saint. L'homme apprend cette vérité de Jésus Christ, et il la met en oeuvre dans sa propre vie, par l'Esprit que lui-même nous a donné.
Sur ce chemin - sur le chemin d'une telle maturation intérieure qui comporte la pleine découverte du sens de l'humanité -, Dieu se rend intime à l'homme, il pénètre toujours plus à fond dans tout le monde humain. Dieu un et trine, qui "existe" en lui-même comme réalité transcendante du Don interpersonnel, en se communiquant dans l'Esprit Saint comme Don à l'homme, transforme le monde humain de l'intérieur, dans les coeurs et dans les consciences. Sur ce chemin, le monde, rendu participant du Don divin, devient, comme l'enseigne le Concile, "toujours plus humain, toujours plus profondément humain"(3), tandis qu'en lui, à travers les coeurs et les consciences des hommes, se développe le Règne dans lequel Dieu sera définitivement "tout en tous" (Cf. 1 Co 15,28), comme Don et Amour. Don et Amour: telle est l'éternelle puissance du Dieu un et trine qui s'ouvre lui-même à l'homme et au monde dans l'Esprit Saint.
Dans la perspective de l'An 2000 après la naissance du Christ, il s'agit de parvenir à ce qu'un nombre toujours plus grand d'hommes "puissent se trouver pleinement à travers le don désintéressé d'eux-mêmes". Il s'agit de parvenir à la réalisation en notre monde, sous l'action de l'Esprit-Paraclet, d'un processus de vraie maturation dans l'humanité, dans la vie individuelle comme dans la vie communautaire: c'est à ce propos que Jésus lui-même, "quand il prie le Père pour que "tous soient un..., comme nous sommes un" (Jn 17,21-22) , ... nous suggère qu'il y a une certaine ressemblance entre l'union des personnes divines et celle des fils de Dieu dans la vérité et dans l'amour"(4). Le Concile redit cette vérité sur l'homme, et l'Eglise voit en elle une indication particulièrement forte et déterminante de ses tâches apostoliques. Si, en effet, l'homme est la route de l'Eglise, cette route pase à travers tout le mystère du Christ, modèle divin de l'homme. Sur cette route, l'Esprit Saint, en affermissant en chacun de nous "l'homme intérieur", fait que l'homme, toujours plus, "se trouve pleinement à travers le don désintéressé de lui-même". On peut dire que, dans ces paroles de la Constitution pastorale du Concile, est résumée toute l'anthropologie chrétienne, la théorie et la pratique fondées sur l'Evangile, ou l'homme découvre en lui-même son appartenance au Christ et, en lui, son élévation à la dignité de fils de Dieu; il comprend mieux aussi sa dignité d'homme, précisément parce qu'il est le sujet de la présence de Dieu qui se rapproche de lui, le sujet de la bienveillance divine, dans laquelle se trouvent la perspective et même la racine de la glorification définitive. Alors on peut vraiment redire que "la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant, et la vie de l'homme, c'est la vision de Dieu"(5): l'homme, en vivant une vie divine, est la gloire de Dieu; l'Esprit Saint est le dispensateur caché de cette vie et de cette gloire. Selon Basile le Grand, "simple par son essence, mais se manifestant par des actions variées, ... il se donne en partage, mais garde son intégrité; ... présent à chacun de ceux qui peuvent le recevoir comme si celui-ci était unique, il répand sur tous la grâce en plénitude"(6).
60 Lorsque, sous l'influence du Paraclet, les hommes découvrent cette dimension divine de leur être et de leur vie, comme personnes ou comme communautés, ils sont en mesure de se libérer des divers déterminismes qui résultent principalement des fondements matérialistes de la pensée, de la praxis et de ses méthodes. A notre époque, ces éléments ont réussi à pénétrer jusqu'au coeur de l'homme, dans le sanctuaire de la conscience ou sans cesse l'Esprit Saint fait entrer la lumière et la force de la nouvelle vie selon la "liberté des enfants de Dieu". La maturité de l'homme dans cette vie est entravée par les conditionnements et par les pressions qu'exercent sur lui les structures et les mécanismes dominants dans les divers secteurs de la société. On peut dire que, dans bien des cas, les facteurs sociaux, loin de favoriser le développement et l'expansion de l'esprit humain, finissent par l'arracher à la vérité authentique de son être et de sa vie - sur laquelle veille l'Esprit Saint - et par le soumettre au "Prince de ce monde".
Le grand Jubilé de l'An 2000 contient donc un message de libération par l'action de l'Esprit: seul celui-ci peut aider les personnes et les communautés à se libérer des déterminismes anciens et nouveaux, en les guidant par la "loi de l'Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus" (Rm 8,2), en agissant dans la plénitude de la vraie liberté de l'homme ainsi découverte. En effet, comme l'écrit saint Paul, là "ou est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté" (2Co 3,17). Cette révélation de la liberté et donc de la véritable dignité de l'homme acquiert une particulière éloquence pour les chrétiens et pour l'Eglise persécutés, soit dans les temps anciens soit actuellement, car les témoins de la Vérité divine deviennent alors une preuve vivante de l'action de l'Esprit de vérité, présent dans le coeur et dans la conscience des fidèles, et il n'est pas rare qu'ils signent de leur martyre l'exaltation suprême de la dignité humaine.
C'est aussi dans les conditions ordinaires de la société que les chrétiens, témoins de l'authentique dignité de l'homme, par leur obéissance à l'Esprit Saint, contribuent de bien des manières au "renouvellement de la face de la terre": ils collaborent avec leurs frères pour réaliser et mettre en valeur tout ce qui est bon, noble et beau dans le progrès actuel de la civilisation, de la culture, de la science, de la technique et des autres secteurs de la pensée et de l'activité humaine(7). Ils le font comme disciples du Christ qui, selon les mots du Concile, "constitué Seigneur par sa Résurrection ... agit désormais dans le coeur des hommes par la puissance de son Esprit; il n'y suscite pas seulement le désir du siècle à venir, mais par là même anime aussi, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à soumettre à cette fin la terre entière"(8). Ainsi, ils affirment davantage encore la grandeur de l'homme fait à l'image et à la ressemblance de Dieu, grandeur que le mystère de l'Incarnation du Fils de Dieu met en pleine lumière, car, dans la "plénitude du temps", il est entré dans l'histoire par l'Esprit Saint et il s'est manifesté homme véritable, lui qui est le premier-né de toute créature, lui "par qui tout existe et par qui nous sommes" (1Co 8,6).

1. Cf. Gn 1,26-27 S. THOMAS D'AQUIN, Somme théol., I 93,4 I 93,5 I 93,8.
2. Cf. Const. past. sur l'Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et spes, GS 24 cf. GS 25.
3. Cf ibid., GS 38 GS 40
4. Cf. Const. past. sur l'Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et spes, GS 24
5. Cf. S. IRÉNÉE, Adversus haereses, IV, 20, 7: SC 100/2, P. 648
6. S. BASILE, De Spiritu Sancto, IX, 22: PG 32, 110.

7. Cf. CONC. CUM. VAT. II, Const. past. sur l'Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et spes, GS 53-59
8. Ibid., GS 38


Dominum et vivificantem

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