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Macron, clown dangereux (619ème semaine politique)

Publié le 23 mars 2019 par Juan

Macron, clown dangereux (619ème semaine politique)
Sont-ils des bleus, des incapables, des clowns dangereux ? La question se (re)pose. Quelques semaines après les élections de juin 2017, la multiplication de boulettes, bêtises, fautes et saloperies des nouveaux élus du Nouveau Monde jupitérien avait créé le trouble. Dans cette majorité pléthorique, il y avait de tant de débutants. Mais passés ces premiers mois de rigolade, d'énervement et de sidération, la mise en œuvre agressive du programme macroniste avait emporté l'attention médiatique.
Vingt mois après l'élection d'Emmanuel Macron, voici une autre histoire qui commence. Les clowns dangereux sont de retour. Et ils sont au sommet.
Macron a trop d'angles morts dans sa (faible) culture politique - il ne comprend pas les exclus en général, confie un ancien conseiller au magazine Society. Comme nombre de monarques autoritaires, il préfère la loyauté à la compétence. Sinon, comment comprendre le maintien en poste de Castaner, Kohler, de Rugy, Parly, Belloubet ou Buzyn, pour ne citer que les plus incapables ?
CRISE
Énervé que quelques dizaines de milliers de Gilets Jaunes l'aient encore défié, et, surtout, que des centaines de casseurs aient pu dévaster nombre de magasins et le prestigieux Fouquet's, Macron a piqué une crise d'autorité.
Une de plus, une de trop.
Samedi 15 mars, la police a encerclé Gilets Jaunes et casseurs. Elle a ensuite laissé quelques violents incendier, détruire, ruiner. On s'est assuré au préalable que les chaînes d’info étaient bien présentes. La casse est plus visuelle que les manifestations pacifistes. Il faut se réfugier sur les couvertures "Live" et régulières du Media TV ou de Mediapart pour sortir de cette nasse médiocratique. Les Gilets Jaunes sont autre chose que les casseurs, mais la Macronie a l'amalgame aussi facile que la répression violente.
On fait ensuite le coup de la réunion de crise. Revenu du ski, le jeune monarque engueule ses proches, mais épargne Rantanplan aka Castaner, ministre de l'intérieur rescapé par sa fidélité, et son secrétaire d'Etat "professionnel" qu'on lui a flanqué pour encadrer, l'incapable ministre, Laurent Nuñez. Il faut faire sauter un fusible, ce sera le préfet. Et tant pis si Laurent Nuñez concède à la radio d’État que Castaner et lui ont été nuls et inefficaces le samedi précédent.
Joli paradoxe, le gouvernement macroniste multiplie les dispositifs liberticides - état d'urgence dans la loi ordinaire, jugement des réfugiés par visioconférence, interdiction de manifestants, fichage de manifestants,  périmètres interdits, marquage chimique, mutilations en grand nombre et sans excuse officielle, amalgame des manifestants avec les casseurs - et pourtant il est incapable de gérer quelques centaines de casseurs pré-identifiés dans Paris. Ces gouvernants sont des clowns; et leur incompétence aggrave leur dangerosité.
Macron est en rage intérieure car ces Gilets Jaunes abiment la théâtralisation de son Grand Débat et, surtout, son image auprès de l'électorat conservateur qui le faisait remonter dans les sondages. Lundi soir, il prend en otage les ondes de France Culture pour de longues heures de débat, à l'heure du dîner, avec 65 intellectuels, aux deux tiers mâles, plutôt âgés. Se sachant filmé, il braille son incompréhension: "On a des gens qui ne savent plus pourquoi ils sont dehors". Il disserte, il "monologue", il s'épanche, il est au théâtre. Tout est filmé. Le lendemain, 350 autres intellectuels signent une pétition de solidarité avec les Gilets Jaunes contre l'autoritarisme macroniste.
 "Face à cette dérive grave d’un pouvoir incapable d’offrir une réponse politique à la contestation des gilets jaunes, alors que pleuvent depuis des semaines les condamnations internationales des violences policières contre le mouvement (Conseil de l’Europe, Nations Unies, Parlement européen), nous, universitaires pour beaucoup spécialistes des questions de mouvements sociaux, de maintien de l’ordre et de violence politique, alertons solennellement la population des graves dangers que la nouvelle politique du gouvernement, de la majorité parlementaire, de la police et de la justice, font peser sur les libertés publiques et les droits humains." (lire la suite).

RÉPRESSION
Dans la plus grande tradition des autocrates à la petite semaine, Macron amalgame manifestants et casseurs. Il fait interdire les manifestations sur les Champs Élysées. Son premier ministre Edouard Philippe promet un marquage chimique des "casseurs" - des "PMC" (Produits de Marquage Codés), et ensuite ?
Est-ce suffisant ? Non. Mercredi, le porte-parole du gouvernement et aspirant candidat à la Mairie de Paris Benjamin Griveaux commet une bourde encore plus grosse: il promet le renfort de l'armée au maintien de l'ordre du prochain samedi. Il faut faire peur. Plus précisément, l'armée sera déployée en protection de lieux sensibles tandis que police et gendarmerie interviendront sur les manifestants. D'après la presse, Macron lui-même a réclamé l'adjonction d'un dispositif militaire pour assurer la sécurité lors des manifestations du 23 mars. La démarche est dingue, et provoque le trouble jusque dans les rangs militaires. Griveaux assure donc la "mobilisation renforcée du dispositif Sentinelle pour sécuriser les points fixes et statiques" contre les Gilets Jaunes. Aussitôt annoncé, aussitôt amplifié: un général, gouverneur militaire de Paris interrogé sur France Info confirme que les militaires pourront "aller jusqu'à l'ouverture du feu (...) si leur vie est menacée ou celle des personnes qu'ils défendent" en cas de contact. Une députée macroniste, Claire O'Petit, qualifie les Gilets Jaunes de terroristes et justifie que les militaires tirent "après 3 sommations".
Revendiquer une intervention militaire est une aberration en République. Elle équivaut à désigner les Gilets Jaunes comme des ennemis.Des militaires et des anciens militaires se désolidarisent: "cet emploi répressif de l’armée est très dangereux" explique un ancien colonel. Le journaliste Jean-Dominique Merchet complète: "Reposant sur la distinction du délinquant et de l’ennemi, le cloisonnement juridique entre la sécurité intérieure et la défense extérieure est l’un des fondements démocratiques de l’usage de la force."
C'est dit, mais la Macronie n'entend pas. Elle est en rage. Et elle est devenue aussi dangereuse que des casseurs vidant le Fouquet's de sa vaisselle.

BARBOUZERIES
A Paris, Macron a nommé un nouveau préfet qui fait "flipper les flics". Il est filmé sur les Champs Elysées dès samedi, avec une casquette trop grande sur sa tête. Flippant, cassant, froid, agressif, il a surtout carte blanche. Castaner lui a demandé de "débrider" l'usage des grenades mutilantes si nécessaires.
Non seulement Macron glisse vers un autoritarisme antidémocratique de plus en plus assumé, mais ses barbouzeries n'ont pas cessé. Après la cascade de révélations sur les mensonges (sous serment), le trafics d'intérêts avec des oligarques russes et le soutien constant de l'Elysée à son son ancien protégé, le Sénat saisit la Justice - Benalla, Crase, Strozda et Kohler - pour faux témoignages ou suspicion de faux témoignage. Des repérages de balises téléphoniques ont aussi convaincu les enquêteurs que Benalla et Crase ont violé leur contrôle judiciaire et qu'ils ont échangé avec la directrice de la sécurité de l'Elysée en pleine affaire l'été dernier (sic!).
Catastrophe !
Jupiter s'agace et minimise la portée judiciaire de la fraude au cœur de l’Élysée, ses sbires dénoncent le "procès politique". Mais enfin ?! De quoi parle-t-on ? Le garde du corps et homme de main de Macron a menti sous serment. Son directeur de cabinet et son secrétaire général ont également menti sous serment devant une commission d'enquête sénatoriale. Et la Macronie ose parler de "procès politique" ...
"Le chafouin Philippe Bas a demandé aux auditionnés de prêter serment de dire la vérité. Patrick Strzoda, Alexis Kohler et Lionel Lavergne ont levé la main droite et juré. Mais voilà, ils ont menti." Raphaël Garrigos et Isabelle Roberts, Les Jours
Ce n'est pas tout. Cette semaine, Mediapart révèle que le remplaçant de Benalla auprès de Macron a été recruté par Benalla, via une procédure de faveur éloignée des exigences de contrôle habituelle des forces de sécurité. Christian Guédon se déclare expert en infraction et infiltration, rien que ça. Et, rapporte Mediapart, "Christian Guédon a continué à échanger avec Alexandre Benalla après son départ de l’Élysée. Il s’est même rendu en sa compagnie, à la fin de l’été, chez un trouble intermédiaire syrien domicilié à Paris."
DESTRUCTION SOCIALE
Macron accuse les Gilets Jaunes dans leur ensemble de "destruction sociale", rapporte le Canard Enchaîné. Il perd son jugement, il perd la mesure. En coulisses, son équipe peaufine la réforme des retraites, tandis que ces députés godillots votent la privatisation d' Aéroports de Paris. Vendre à des investisseurs privés, et sans doute étrangers, la principale porte d'entrée sur le territoire français est une idée lumineuse que seuls quelques libéraux béats dans la Main Invisible du Marché pouvaient avoir. Il faut de la concurrence et de la tune, voici les deux référents de la Macronie: de la concurrence, "parce que c'est mieux"; de la "tune", parce que les caisses se vident à force de cadeaux fiscaux aux grandes entreprises (20 milliards d'euros par an) et aux plus riches (5 milliards par an) qui n'en ont pas besoin. La privatisation d'ADP est économiquement bête, politiquement dangereuse et diplomatiquement inacceptable.
Mais la réelle destruction sera sociale. Après les Ordonnances Travail, le renforcement des sanctions contre les chômeurs, le gel des aides et prestations sociales (à l'exception d'une poignée d'entre elles), voici la fusion et la nationalisation des régimes de retraites. la ministre Buzyn évoque un énième allongement de la durée du travail (rappelons qu'il faut déjà 43 années de cotisations sans interruption). La presse officielle fait croire à une cacophonie car Buzyn et Edouard Philippe expliquent "en même temps" que l'âge minimal ne devrait pas bouger. La belle hypocrisie... Maintenir l'âge minimal, mais allonger le nombre d'années de cotisations pour en bénéficier, voici l'arnaque.
Pour l'heure, comme le relève le Conseil d'Orientation des retraites, déjà 20% des retraités ne partent pas au taux plein. Et, une majorité des retraités part après l'âge minimal légal. Pire,
un quart des retraités - principalement des femmes, des ouvriers/employés, des assurés du secteur privé et les classes modestes) partent plus tard que l'âge pour des raisons économiques.
Macron veut "fusionner" les régimes, pour mieux piloter la réduction générale des pensions ou le cout général des retraites: le projet, assumé, est de permettre une réforme des retraites qui absorbe les 10 milliards d'euros annuels que couterait le nouveau plan pour la dépendance. On retrouve la marque de fabrique de la Macronie: financer une "nouvelle" solidarité en taxant le plus grand nombre tout en réduisant la contribution des plus riches et des grandes entreprises.
La même démarche avait été appliquée pour le plan contre la pauvreté: 8 milliards d'euros dégagés pour 4 ans, quand les exonérations fiscales supplémentaires accordées aux plus riches frôlaient les 5 milliards par an...
FAILLITE EUROPÉENNE
L'Europe à 27 se fait peur. Le Brexit est théoriquement pour vendredi 29 mars, mai, ric-rac, un conseil européen a décidé d'un sursis de 3 mois si le Royaume Uni se décide à re-voter. Le Brexit est peut être une bonne affaire pour les conservateurs: il assure le maintien d'une précarisation du salariat sur la base d'un chantage et la finance britannique se porte très bien.
Sans vote des peuples concernés, les 27 chefs de gouvernement décident d'un sursis à deux vitesses, jusqu'au 22 mai si le Parlement approuve l'accord négocié, jusqu'au 12 avril si le Royaume Uni organise des élections.
Le Brexit, est-ce le seul sujet de ces élections ? Sans doute, puisque l'équipe macroniste n'a toujours pas dévoilé son programme, à 4 semaines du scrutin et ne veut pas débattre de rien.

Macron, clown dangereux (619ème semaine politique)

Blindés sur les Champs Elysées, 23 mars 2019


Le Grand Débat se termine dans l'obscurité des "conférences citoyennes" et la magouille, le pouvoir enrage et tremble devant les Gilets Jaunes et les casseurs, et le débat européen est sacrifié par la Macronie.

Ami macroniste, où es-tu ?



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