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Réseaux sociaux: un outil en santé mentale?

Publié le 27 octobre 2017 par Jeangagnon

Delphine Caubet

Au Canada, les réseaux sociaux ont pris une ampleur considérable. Au point où nous sommes le pays le plus connecté à Facebook. En parallèle se sont développés les groupes de soutien en ligne pour toutes sortes de causes. Dont la santé mentale.

Pour les personnes atteintes de troubles bipolaires, il existe plusieurs plateformes dans la francophonie, que ce soit sur Facebook ou des forums. N’importe qui peut s’y inscrire, qu’il soit un proche, un patient ou juste un curieux.

Pour suivre les informations qui s’y échangent et surtout offrir un lieu sécuritaire aux membres, de nombreux organismes et hôpitaux tentent d’attirer leurs patients sur leur propre plateforme. Des administrateurs y sont présents pour pallier les éventuels dérapages.

Entraide en continue

Revivre (organisme d’aide pour les personnes ayant des troubles de l’humeur) a pris le virage des réseaux sociaux, très tôt, en 2000. D’après son directeur général, Jean-Rémy Provost, c’est à la demande des membres que fut créée cette plateforme pour les personnes avec trouble bipolaire, anxiété et dépression. «Ces personnes sont en recherche, explique le directeur. C’est une bouteille à la mer. Ils peuvent rester longtemps sur le forum sans écrire, puis un jour ils vont raconter leur histoire. C’est un exutoire pour eux.»

Que ce soit des groupes Facebook ou d’autres forums, ces plateformes sont un espace pour échanger avec des pairs. Suis-je normal? Avez-vous ces symptômes? Vos médicaments vous stabilisent-ils? Poser ces questions derrière son ordinateur à des personnes vivant la même réalité, sans le regard de l’autre, aide à s’exprimer. Et pour ceux qui ne sont pas encore suivis par un médecin, c’est l’occasion de mieux appréhender la maladie et d’avoir du soutien pour pousser la porte d’un professionnel de la santé.

Pair aidant

Nathalie a aujourd’hui 45 ans et elle fréquente 2 forums destinés aux personnes bipolaires. Elle y fait son bénévolat, comme elle le dit. Alors qu’elle approchait de ses 40 ans, Nathalie fait une dépression majeure, où le diagnostic de sa bipolarité tombe, quelques mois plus tard.

Contrairement à la majorité des personnes qui écrivent sur ces forums, Nathalie n’y va pas s’exprimer lors de ses phases dépressives. Elle veut trouver une utilité à sa dépression, alors elle écrit ce qu’elle vit et donne des conseils en fonction de son expérience. «Mais jamais sur les médicaments», précise-t-elle. Elle est infirmière et grâce à sa profession, elle a une bonne connaissance de sa maladie. Mais, une autre réalité, ces lieux d’échanges peuvent être propices aux dérapages.

Double tranchant

Un forum comme Revivre a des modérateurs pour éviter des dérapages tels que des conseils sur le suicide ou l’organisation groupée du passage à l’acte. Sur Facebook en revanche, de tels vigiles n’existent pas. Les groupes ont des administrateurs (personnes qui gèrent la page et peuvent supprimer des publications et bannir des membres) qui servent de garde-fous. Mais cette supervision reste entre pairs et non aux mains de professionnels. Et les informations qui y sont être échangées peuvent être plus ou moins fiables.

L’autre problématique de Facebook est que des usagers déversent leurs sentiments en période de dépression. Mais contrairement à Nathalie, peu d’entre eux sont présents lorsqu’ils ont repris le dessus. L’entraide se fait donc entre pairs en situation de crise, et lorsque celle-ci devient majeure, il est très difficile d’intervenir… l’autre pouvant être n’importe où à travers le monde. Des forums comme Revivre ont des vigiles qui supervisent les discussions… chose absente du grand rassembleur Facebook.

Jean-Rémy Provost insiste sur l’entraide que peuvent apporter ces groupes de discussions. Nathalie en voit des effets bénéfiques, mais précise: «Si mon mari n’avait pas été là, je ne serais plus là non plus. Le soutien de proches est différent, ils ne sont pas de la même équipe.» Mais ils apportent une présence physique, une empathie que n’ont pas les réseaux sociaux. «Les mots sur les forums sont froids et ça reste dans le rationnel, ajoute Nathalie. Pendant une dépression, le cerveau ne fonctionne pas très bien. Moi, j’étais au-delà du rationnel, je ne parlais plus, je ne voyais plus de couleurs… les mots sont inutiles dans ces périodes.»

En 2013, les groupes Facebook francophones consacrés aux bipolaires regroupaient pas moins de 42 000 personnes. Ces plateformes permettent de vulgariser les informations médicales parfois très scientifiques en discutant du quotidien entre personnes vivant la même réalité.


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