Le premier ministre l'a dit et répété : ce qui ressort pour lui avant tout du grand débat, c'est la demande impérieuse des Français de payer moins d'impôts.
Il est donc vraisemblable que Macron va annoncer d'ici quelques jours une baisse des impôts.
J'entends d'ici la majorité des Français pousser un ouf de satisfaction, car c'est bien connu en France, on n'a jamais aimé payer les impôts.
Personnellement, j’ai vu tout de suite le piège. Je n'ai pas de mérite : j'ai travaillé dans la fonction publique pendant toute ma carrière dans la comptabilité publique et plus particulièrement dans la gestion et la comptabilité des établissements scolaires ; collèges et lycées. J'étais même comptable public, c'est-à-dire comptable assermenté de l'État, au même titre mais avec un traitement infiniment moindre, qu'un trésorier-payeur général.
Macron va donc baisser les impôts. Etant donné qu'il est prévu une baisse de la croissance plutôt qu'une embellie, cela veut dire qu'il va être obligé de diminuer la dépense publique. Il ne pourra pas faire autrement. Je m'explique.
Les impôts, directs et surtout indirects, c'est la ressource essentielle du gouvernement. Baisser les impôts pour un gouvernement, cela revient à baisser le salaire pour un salarié. Or si votre salaire baisse demain, vous allez être obligé de moins dépenser.
Il se trouve que la baisse de la dépense publique, c'est la motivation principale de Macron. La plupart des réformes initiées par lui, et la plupart de celles qu'il veut encore mettre en chantier, vont consister à baisser la dépense de l'État.
Encore une fois, Macron prend les français pour des cons.
En baissant les impôts il sait qu'il va leur faire plaisir, et que cela va lui permettre tout à fait naturellement de baisser les dépenses publiques.
Mais, évidemment, pour Macron ce ne sont pas n'importe quelles dépenses publiques qu'il va baisser. Ce qu'il va baisser ce sont les retraites qui constituent une grosse charge pour le budget de l'État (16 millions de retraités à payer tous les mois jusqu'à leur mort, je vous le rappelle)
Ensuite, ce qu'il va baisser, c'est le nombre des fonctionnaires et la rémunération des fonctionnaires, qu'il va vraisemblablement continuer à bloquer. Je rappelle que les salaires des fonctionnaires sont bloqués depuis 2010, à part une timide et brève reprise par Hollande avant les élections, auxquelles il n'a pas oser se présenter.
Ce à quoi Macron va s'attaquer aussi, c'est au “pognon de dingue” c'est-à-dire aux aides sociales.
De fait, il va sans doute continuer, voire amplifier ses attaques incessantes contre le “modèle social français” qui se caractérise avant tout par:
- un système de retraites par répartition,
- une sécurité sociale que les Américains nous envient,
- une fonction publique mal payée mais qui bénéficie de la sécurité de l'emploi,
- enfin un État que naguère on appelait “Providence” et qui ne l'est plus depuis déjà un certain temps.
Pour ce qui est du détail de la baisse des impôts, comptez sur Macron pour faire en sorte que cette baisse ne froisse pas les riches mais ponctionne d'importance la classe moyenne. Le système fiscal français est tellement complexe et tellement inégalitaire que la plupart des Français n'y verront que du feu.
Deux remarques. La première : les gilets jaunes, en majorité, ne paient pas d'impôts, ou très peu. Je ne pense pas que la pression fiscale soit pour les gilets jaunes un motif essentiel de descendre dans la rue. Comme dit l'autre, pour payer des impôts, encore faudrait-il gagner de l'argent, ce qui n'est pas trop leur cas.
En revanche, et c'est la deuxième remarque, les baisses d'impôts que Macron va décider vont profiter comme d'habitude, non pas à la classe moyenne, mais encore une fois aux riches et aux très riches.
Pour une raison tout à fait arithmétique : si vous vous baissez les impôts de 10 %, 10 % du salaire d'un gilet jaune et 10 % des revenus d'un membre des 1%, ça n'a strictement rien à voir. Les pauvres ne s'en apercevront pratiquement pas, et les riches pourront festoyer.
Résultats : les gilet jaunes vont être très mécontents : ils vont très vite manifester leur mécontentement.
La classe moyenne va être très mécontente quand elle va comprendre le piège, et elle va le faire savoir. Si elle aussi se lance dans la bagarre, Macron peut faire ses valises.
Les riches et les très riches vont être, comme d'habitude, très contents de leur cher Macron. Il a fait le job. On pourra toujours le fichier dehors, il aura toujours un parachute doré et une grande entreprise pour l'accueillir. Voyez Sarkozy...
Quant à Macron, il compte bien non seulement garder son cap mais accélérer encore, dans l’intérêt de nos finances publiques bien sûr, tout en lâchant encore un peu de lest.
Comme disait Coluche, les baisés, comptez-vous.