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Mobilité : le produit, l’usage, le service #1

Publié le 15 juillet 2008 par Anne-Sophie

Deux chiffres suffisent pour comprendre les difficultés pour se déplacer ou transporter des objets dans un très court avenir. Le premier : 98 % des transports dans le monde dépendent du pétrole. Le second : le cours actuel du baril dont la progression est stupéfiante. Dès lors, c’est une véritable course contre la montre qui s’engage pour répondre à ce défi. La globalisation marchande est remise en cause par la hausse du prix du fret parallèlement à celle du cours du baril. La vie quotidienne est aussi mise à dure épreuve pour celles et ceux qui ont fait le choix de s’installer loin de tout. Course contre la montre car, ni les investissements publics en termes d’infrastructures, ni les bureaux de recherches et développement des constructeurs automobiles n’avaient, semble-t-il, anticipé une hausse aussi subite. En France, il faut reconnaître que l’Etat a largement favorisé la route au rail. Quant aux constructeurs automobiles, ils n’ont aujourd’hui en stock ou en sortie imminente que des véhicules brûlant le précieux hydrocarbure…

Mais la réponse à cette pénurie accélérée peut-elle seulement reposer sur de nouveaux produits ? N’est-ce pas notre approche globale de la mobilité qu’il faut repenser ? Commençons par une approche produit ; une fois posés les problèmes techniques, nous nous pencherons sur les questions essentielles d’usage et de service de mobilité.

Le produit ?

Il existe aujourd’hui certains véhicules qui permettent de se déplacer en consommant peu de carburant et en rejetant peu de gaz à effets de serre et peu de polluants. Les constructeurs français et italiens ont misé sur le diesel pour réduire consommation et émission. Mais le diesel, interdit aux Etats-Unis pour les véhicules particuliers, a le défaut d’être un polluant local majeur avec ses rejets de particules.

Une étude du New England Journal Of Medecine datant de 2007 démontre une corrélation entre les particules fines et les symptômes de l’asthme. Une étude de l’Université de Gand indique que les particules fines seraient responsables de 10 000 cancers du poumon mortels par million d’habitants et que pour les maladies cardio-vasculaires les chiffres seraient du même ordre. Pour terminer, l’Hôpital Karolinska de Stockholm souligne que les hommes exposés à des particules diesel en raison de leur métier (conducteurs de taxi et de bus, camionneurs, mécaniciens, ouvriers) seraient exposés à une probabilité accrue de 63 % de développement d’un cancer pulmonaire. En plus des particules, le diesel rejette aussi de l’oxyde d’azote (les particules NOx, responsables des pluies acides, proviennent à 49 % du secteur des transports). Tout cela peut nous laisser penser que la fin du moteur diesel est proche, ou en tous cas qu’il n’est pas une solution technique. N’oublions pas qu’en 2009, la norme Euro 5 va imposer une nouvelle dépollution sur ce type de motorisation, renchérissant de fait leur coût de production. Le prix des modèles Diesel va rejoindre alors le coût des hybrides essence (non émetteurs de particules fines).

Plus petits et plus légers

L’avenir à court terme repose sur une offre de véhicules plus petits et plus légers. Smart chez Mercedes, IQ chez Toyota, 107 chez PSA ou encore Fiat 500 sont un début de substitution. Mais les progrès sont bien maigres pour le bénéfice réel: que représente un gain de 1 à 2 litre pour 100 km si l’investissement initial a été de 9 000 euros pour ce type de véhicule ? Faut-il s’extasier que sur un kilométrage moyen de 15 000 km par an, la diminution des émissions de CO2 soit de 300 kg par an ? Certains constructeurs ont déjà en concession des gammes vertes. Bluemotion chez Volkswagen, Ford ECOnetic sont des versions optimisées de véhicules existants : meilleure aérodynamique, pneumatiques “verts” à faible frottement (ce qui pose néanmoins un problème d’allongement des distances de freinage) permettent un gain de quelques décilitres. La question est sans doute pourquoi n’appliquent-ils pas ces règles de bon sens, peu coûteuses, à l’ensemble de leur gamme ? Le moteur à explosion nourri à l’énergie fossile a encore une marge de manœuvre avec l’injection directe ou le downsizing (utilisation d’un moteur plus petit dopé par un petit turbo), mais ces technologies ont un coût qui est reporté sur le prix de vente. Ne nous leurrons pas, les jours de ce vieux moteur sont aussi comptés. Chaque hausse du prix du baril le rend plus vulnérable.

Crédits photos (de gauche à droite): Peugeot 107, Smart, Fiat 500, Toyota IQ

Existe-il des alternatives ?

Les agro-carburants ont déjà trouvé leur limite par leur impact sur le court des matières premières agricoles et par leur bilan environnemental, certes meilleur en termes d’émission de CO2, mais mauvais sur la pollution des sols et la consommation d’eau. Et l’hydrogène ? La pile à combustible est, sur le papier, séduisante. L’hydrogène est l’élément naturel le plus présent dans l’univers, mais sur Terre, il n’existe pas à l’état natif. Il faut donc le produire soit par électrolyse de l’eau soit par extraction des énergies fossiles, une manipulation qui nécessite quantité d’énergie. La technique de la pile n’est donc pas, in fine, une substitution de polluants locaux et de GES par de l’eau mais un déplacement de pollution du rejet à la source, car la production d’électricité se fait aujourd’hui soit avec des centrales thermiques, soit avec des centrales nucléaires. Deux voies sont aujourd’hui suivies : celle de Mazda et BMW qui consiste à substituer l’hydrogène à l’essence pour générer une explosion dans la chambre de combustion du moteur et celle de Nissan, Honda ou encore GM qui passe par une pile à combustible comme générateur d’électricité. Sur cette deuxième voie, une nouvelle limite physique apparaît dans l’état actuel des recherches : le platine. En effet, ce métal rare est présent dans les piles à combustible. Or, ses réserves connues sont aujourd’hui estimées à 56 années à consommation constante soit 280 t par an… de quoi faire rouler en utilisant la totalité de ces réserves pour le seul parc automobile à peine 500 millions de véhicules. De nombreux concepts électriques arrivent sur le marché, des véhicules sophistiqués et bien pensés. Ils sont autant de solutions intéressantes, mais là encore on observe un déplacement de la pollution, du rejet à la source.

Crédits photos (de gauche à droite): Zoop, Aptera, Venture, Jetcar, VW 1 liter, Think, Clever car, NMG, Luménéo

La voiture a perdu de sa superbe au profit d’autres véhicules et notamment au profit des bicyclettes et autres véhicules à propulsion humaine. Les vélomobiles sont des vélos couchés carénés à propulsion humaine, équipés d’une assistance électrique et de tout le confort nécessaire pour ne pas subir les intempéries. Les plus aboutis sont aujourd’hui l’Aerorider ou encore le Go One. Les vélomobiles sont une solution durable aux problèmes de circulation, ils prennent d’ailleurs de plus en plus de place sur les chaussées des villes européennes. Il n’est pas encore question de les voir sur les routes françaises, la législation ne leur permettant pas d’y circuler ; il faut en attendant se replier sur nos fidèles bicyclettes.

Crédits photos (de gauche à droite): Go One, Aerorider

Il faut surtout changer notre point de vue que la mobilité. Il n’est plus question de parler de produit, mais plutôt d’usage. Il ne s’agit plus de prendre sa voiture, mais d’aller d’un point A à point B… Nous verrons cela la prochaine fois !

++ Pour aller plus loin ++


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