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La même nuit, le même meurtre, de Jacques Roman

Publié le 02 juillet 2019 par Francisrichard @francisrichard
La même nuit, le même meurtre, de Jacques Roman L'homme est un loup pour l'homme.

Ce n'est guère une conception optimiste, ni humaniste... Mais elle a laissé son empreinte, depuis Plaute, hélas. Particulièrement chez tous ceux qui en sont restés à une morale primitive, celle de la horde, comme celle des loups.

Jacques Roman, lui, met comme sous-titre à son récit dédié à son frère Jean-Pierre disparu: A propos de l'homme et des loups. Peut-être avait-il cette sentence à l'esprit quand il s'est mis en tête d'entreprendre son récit mortel.

Son récit est celui des relations entre Caïn et Hebel, revisité par lui. Car, sans doute pour le comprendre, il se met à la place de Caïn, lequel, après avoir tué son frère avec sa faux de paysan, a livré son corps à la horde des loups.

Ce meurtre, cette nuit-là, s'est traduit par le hurlement épouvanté d'Adam: Qu'as-tu fait de ton frère? : Jamais je ne l'avais entendu crier. Il ne criait pas. Non. Il hurlait comme hurlent les loups. Le mari de ma mère...

Pourquoi les présents de Caïn sont-ils ignorés, tandis que ceux de son frère sont agréés? Comment peut-il admettre qu'il n'est pas le fils de Dieu, comme sa rêveuse de mère le lui a mis en tête, mais celui du mari de celle-ci.

Il ne comprend pas non plus: Pourquoi [...] Adam, lorsqu'il disparaissait durant des jours et des jours, emmenait-il Hebel avec lui, Hebel, mon frère? Pourquoi m'abandonnait-il, me laissant seul avec ma mère?

Après qu'il a d'abord tué un chien, son premier meurtre (que la mémoire orale n'a pas retenu) il tue son frère, son petit frère Hebel, son ami charnel: J'avais fait disparaître la fraternité, fait disparaître le fraternel.

Jacques Roman comble ainsi les trous du récit de la Genèse: il y introduit notamment Harsa, le seul ami de Caïn, le frère de Temech, sa femme, l'énergique, qui lui a dit: Si tu n'avais pas tué Hebel, Hebel un jour t'aurait tué...

Jacques Roman présente Caïn comme quelqu'un qui, après son crime, est frappé de douleur, est devenu sombre, et demande que soient bannis l'agressivité et le crime, tout en ayant une vue pessimiste de l'homme:

Aujourd'hui, je pense que les hommes n'apprennent rien. Ils se cassent la figure, ils gémissent, ils implorent, et, à la première occasion, ils recommencent.

Sauf quand ils acceptent, en adoptant la morale traditionnelle, c'est-à-dire la morale évoluée, de contraindre leurs instincts sans pour autant porter aux nues la raison...

Francis Richard

La même nuit, le même meurtre, de Jacques Roman, 48 pages, Éditions d'en bas

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