Magazine Société

Les enfants de la baie, d'Olivier Papaux

Publié le 05 août 2019 par Francisrichard @francisrichard
Les enfants de la baie, d'Olivier Papaux

Écrire, peindre, des taches, des mots, des signes, peu importe le mode pourvu que vive le désir inassouvi d'un monde toujours dépeuplé.

Le narrateur enseigne le français et les classiques de la littérature, sans conviction. Désabusé sur la valeur des mots, il n'écrit pas, mais, cependant, continue de bouquiner.

Un jour, il tient dans ses mains un livre, Dans la peau d'une vieille, dont un collègue lui a fait l'éloge: le titre, peu attrayant, n'a pas retenu son attention jusque-là. Cette fois, il le lit.

Il n'arrive pas à s'en déprendre: Il ne m'a pas fallu quatre heures pour dévorer ce que je considère aujourd'hui comme le plus grand chef-d'oeuvre de la littérature contemporaine.

Ce qui le bouleverse n'est pas l'histoire somme toute commune d'un amour passionné entre une femme juive et un soldat allemand, c'est l'attente sans espoir de son retour.

Car trente-cinq ans après la disparition d'Helmut, les sentiments de Johanna ne se sont pas érodés. Il y voit, déguisée, la véritable détresse de l'auteure, Helen Svenson.

La fin de l'année approche: Les derniers examens. Les moyennes. Les conseils. Après, il part à sa recherche. Le manque de Franck de l'auteure, il l'éprouve pour elle désormais:

Elle avait rendu si ténue cette frontière entre le monde fictionnel et le monde réel que je me sentais autorisé en tant que lecteur à connaître de sa vie la raison ou la folie qui l'avait contrainte à écrire.

Cette quête pour rencontrer Helen Svenson, nom d'emprunt d'Ann Jäger, le conduit en Écosse, dans une des Hébrides, Islay, où son éditeur lui apprend qu'elle s'est retirée.

Sur cette terre promise, où il fait la connaissance sans lendemain de Kirsteen, il apprend qu'Helen a disparu depuis huit mois. Résigné, il se résout à poursuivre sa quête ailleurs.

Deux femmes lui ont échappé en même temps et lui rappellent un tableau, Promenade à Skagen, d'un peintre danois de ce lieu, Peder Severin Krøyer, reproduit en couverture:

Je revois les empreintes de leurs pas sur la plage dont le sable finit par se confondre au bout avec le gris du ciel. Je repense surtout à l'éclat blanc de leur robe, si net, si proche qu'il rompt avec la déambulation de ces femmes vers une terre mal définie.

Sa quête ailleurs lui donne l'occasion d'une rencontre avec un peintre qui prétend que la peinture est comparable à l'écriture et qu'il doit se couper de ses sens pour écrire:

La copie du réel rend l'imagination paresseuse.

Incrédule, il suit pourtant le précepte du peintre et se met à écrire, une manière de conjurer le manque, avant que d'être à même de chasser vraiment les fantômes du passé:

Les hommes s'épuisent à rechercher sans fin la part manquante.

- On regarde souvent dans la mauvaise direction. C'est dommage quand on a tout sous la main.

Quand on regarde dans la bonne direction, le temps de l'attente peut être révolu...

Francis Richard

Les enfants de la baie, Olivier Papaux, 156 pages, Éditions Encre Fraîche


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine