Magie d'automne
de l'arbre aux mille écus
"La feuille de cet arbre
Qu'à mon jardin confia l 'Orient
Laisse entrevoir son sens secret
Au sage qui sait s'en saisir.
Serait-ce là un être unique
Qui de lui-même s’est déchiré ?
Ou bien deux qui se sont choisis
Et qui ne veulent être qu’un ?
Répondant à cette question
J’ai percé le sens de l’énigme
Ne sens-tu pas d’après mon chant
Que je suis un et pourtant deux ?"
Goethe
"Assieds-toi au pied d'un arbre et avec le temps tu verras l'univers défiler devant toi."
Proverbe africain
"C'est une chanson pour les enfants
Qui naissent et qui vivent entre l'acier
Et le bitume,entre le béton et l'asphalte
Et qui ne sauront peut-être jamais
Que la terre était un jardin
Il y avait un jardin qu'on appelait la terre
Il brillait au soleil comme un fruit défendu
Non ce n'était pas le paradis ni l'enfer
Ni rien de déjà vu ou déjà entendu
Il y avait un jardin une maison des arbres
Avec un lit de mousse pour y faire l'amour
Et un petit ruisseau roulant sans une vague
Venait le rafraîchir et poursuivait son cours
Il y avait un jardin grand comme une Vallée
On pouvait s'y nourrir à toutes les saisons
Sur la terre brûlante ou sur l'herbe gelée
Et découvrir des fleurs qui n'avaient pas de nom
Il y avait un jardin qu'on appelait la terre
Il était assez grand pour des milliers d'enfants
Il était habité jadis par nos grands-pères
Qui le tenaient eux-mêmes de leurs grands-parents
Où est-il ce jardin où nous aurions pu naître
Où nous aurions pu vivre insouciants et nus
Où est cette maison toutes portes ouvertes
Que je cherche encore et que je ne trouve plus?"
Georges Moustaki
"Ne laisse entrer dans le jardin de ta vie que ceux qui ont des fleurs à planter."
Mazout Acène
"Pour faire un jardin, il faut un morceau de terre et l'éternité."
Gilles Clément
"La mort du jardinier n'est rien qui lèse un arbre. Mais si tu menaces l'arbre alors meurt deux fois le jardinier."
Antoine de Saint-Exupéry
"C'est beau un jardin qui ne pense pas encore aux hommes."
Jean Anouilh
"Le jardin, c'est de la philosophie rendue visible."
Erik Orsenna
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"Il
fait beau aujourd’hui. Les érables se dépouillent du froid. La lippe
boudeuse des collines épure l’air ambiant. J’aperçois le sentier saturé
de soleil. Je tète les images avec des yeux gloutons. Je cueille d’une
main la caresse lente du temps. Je vais du pas de l’herbe arpentant les
talus. Je ne sais pas écrire autrement qu’en marchant, en phrases
cahotantes, en images brouillonnes, en mots tachés de boue, en
métaphores mal équarries. De faux pas en faux pas, je cherche ce qui est
vrai et ce qui est vraiment. De la route au ruisseau, je suis chez moi
dans la forêt. Trébuchant entre l’enfance et la vieillesse, j’ai refusé
d’être un adulte, cette chair à canon, cette sueur à gage, cet histrion
gommeur de rêve. Comment a-t-on pu faire d’un érable une croix, d’un
frêne un échafaud ? Je ne veux pas être complice de ces gens-là. Quand
on me demande des comptes, j’écris des histoires de fées, des récits
d’aventure, des essais d’harmonie. Quand on m’ordonne de travailler,
j’égare les outils. Quand on me demande ma route, je consulte un
aveugle. Quand on ne demande rien, je donne tout ce que j’ai. Une table
aurait suffi, un lit de pin, une grange hébergeant des oiseaux. Les
cailloux que l’on jette remuent le fond de l’âme. Ce sont des mots qu’on
lance, des invectives ou des prières. Écrire, c’est au-delà des
phrases, au-delà des lèvres, au-delà des mains, au-delà des larmes. Je
marche pour échapper à la téléphonie mobile, à la lueur des écrans, à
son étreinte électronique. Je touche du bois pour écouter la sève. Mal
planté dans le décor, je cherche mes racines.
Un
peu plus haut, des charognards se posent sur des pylônes, guettant les
musaraignes, les rats d’eau, les cadavres de cerfs affamés par l’hiver.
Le vent froisse maladroitement les feuilles. J’essuie les mots
trébuchant sous la pluie. J’écris avec les chiens, avec les ronces, avec
les fleurs. J’essaie de m’intégrer à la végétation, de mordre à la
chair du paysage, de me couler dans l’eau, de toucher la lumière dans sa
matrice d’ombre. Écrire commence là, pour prolonger le corps, agrandir
les gestes, goûter la chair de l’âme, le sel des blessures ou remuer la
cendre. Je veux rejoindre la fraîche intimité des rivières, la cicatrice
des falaises, la senteur des lilas, l’odeur des feuilles mortes et
celle de l’humus, les vertèbres d’argile qui soutiennent le sol. On ne
guérit pas de l’enfance. On la muselle de croyance, de fard, de devoir. À
tant porter de mots, j’ai gardé une lourdeur à l’épaule, une douleur au
dos. Je l’apaise en ouvrant mon cahier."
Jean-Marc La Frenière