Magazine Cinéma

Palmarès cinéma 2019

Par Balndorn

Palmarès cinéma 2019

Dernière année de la décennie qui aura vu éclore et fleurir ma cinéphilie, 2019 aura également marqué un tournant dans mon approche – au sens littéral du terme – du cinéma.
Comment aller au cinéma
De septembre 2016 à mai 2019, je vibrais au rythme de la carte UGC Illimité. Celle-ci me permettait de couvrir un grand nombre de films : au moins un, voire deux, par semaine. Et surtout, le réseau des cinémas acceptant la carte étant varié, j’accédais à une pléthore de films, aussi bien des grosses productions que des films indépendants distribués dans un seul cinéma à Paris (cf. Battleship Islanddébut 2018).Néanmoins, pour rentabiliser les 18 € mensuels que coûtela carte pour les moins de 26 ans, il faut du temps. Du temps, j’en avais plein lorsque j’étudiais, d’où la production massive et régulière de ce blog entre 2016 et 2018 ; mais à partir du moment où j’ai intégré le monde merveilleux du salariat et que mon temps s’est raréfié, affronter la galère des transports (coucou le RER C qui ferme dès 21h30) pour me rendre au cinéma sur Panameet bidouiller comme je pouvais pour écrire un article par semaine devenait mission impossible.Alors, plutôt que d’emplir inutilement les poches d’UGC, j’ai préféré changer demanière d’aller au cinéma. Au mois de mai 2019, je mis un terme à mon abonnement, après une dernière séance parisienne (Sibyl, en l’occurrence). Pourquoi en effet batailler pour m’asseoir au mk2 Bibliothèque ou au UGC des Halles quand il suffit de traverser à pied le pont de Choisy-le-Roi et de s’installer confortablement dans le petit cinéma-théâtre ? Les tarifs y sont aussi intéressants que la carte UGC, sinon moins chers. Revers de la médaille, la diversité et la quantité de la programmation baissent drastiquement, pour se réduire à trois films par semaine, le plus souvent un film destiné aux enfants, une tête d’affiche (superproduction ou œuvre primée) et un film français (comédie familiale comme film d’auteur). Paradoxalement, débarrassé du stress des transports la nuit – et croyez-moi, ramer pour rentrer chez soi à minuit passéalors qu’on attaque le boulot à 9h le lendemain est la dernière chose qu’on désire –, je retrouvais le temps d’aller au cinéma et d’écrire dessus. Certes, le choix des films et leur tempo (décalé de trois semaines en moyenne par-rapport à la sortie nationale) m’étaient imposés ; il m’arrivait en outre régulièrement de rater la seule séance à laquelle je pouvais me rendre et de rattraper bon nombre de films par des moyens plus ou moins légaux plusieurs mois après la sortie (Grâce à Dieuou Captain Marvelpour ne citer qu’eux) ; mais au moins avais-je retrouvé le plaisir du septième art.Tout ceci pour dire que les analyses et le classement ci-dessous découlent des problèmes évoqués plus haut et qu’en conséquence, mon palmarès sera encore plus partial qu’à l’ordinaire, car nettement plus partiel que les années précédentes.

Un petit âge d’or des cinémas français
Repartons des idées développées dans mon palmarès de l’an dernier. Je notais d’un côté la montée en puissance du cinéma de genre dans le cinéma français et de l’autre celle de nouveaux modes de distribution du cinéma américain (Netflix en tête). Comme depuis deux ans désormais, la première tendance a poursuivi sa voie avec un immense succès. De manière générale, il semble que le cinéma français connaisse une embellie – parce que beaucoup de jeunes cinéastes s’emparent de genres traditionnellement mésestimés ou des auteurs plus âgés recollent à notre brûlante actualité. Quelques chiffres objectifs de mon expérience subjective. Sur Sens Critique, où je note tous les films que je vois depuis 2017 (oui, je suis fou), ma liste des meilleurs films de 2018comportait 11 titres français sur 48, dont 3 dans le top 10, ce qui constituait déjà un record au regard des listes antérieures. En 2019, sur les 30 films mis en avant, 11 sont français, dont 4 parmi les 10 premiers et 3 dans la première moitié du tableau. Comme je l’ai dit, cette proportion doit beaucoup à la programmation de mon cinéma de quartier, mais, étant donné que j’ai rattrapé bon nombre d’œuvres qui n’y passaient pas, je crois qu’elle ne s’y limite pas. Nous vivons actuellement un moment charnière de notre cinéma national. Nos cinéastes s’essayent aussi bien au cinéma de genre (Portrait de la jeune fille en feu, Zombi Child) qu’au naturalisme (Les Misérables, L’Époque), voire aux films hybrides (La Vie scolaire, Proxima). On mesure l’importance grandissante du cinéma français – ou du moins la reconnaissance critique et publique de son caractère tentaculaire – au déclin relatif des productions états-uniennes. Certes, on en compte encore quatre, comme l’an passé, dans le top 10 qui suit. Mais on notera que deux d’entre elles – Midsommar et La Favorite– penchent vers le cinéma européen, qu’une autre, Joker, la seule à occuper la première partie du tableau, tire à boulets rouges sur l’American Way of Life, et que la dernière, Once Upon a Time… in Hollywood, joue à plein régime la carte de la nostalgie et de la réécriture de l’Histoire. Autant le cinéma français expérimente les formats et les genres ces dernières années, autant le cinéma hollywoodien se referme ces temps-ci sur l’auto-célébration de son glorieux passé ou délèguent l’innovation formelle et/ou thématique à des auteurs étrangers ou de nouvelles plateformes. Même des œuvres aussi futuristes qu’Ad Astraet Avengers: Endgamene peuvent s’empêcher de regarder en arrière, ce qui fait par ailleurs tout leur charme. Et lorsque d’autres tâtonnent, elles accouchent de résultats mitigés, où les audaces se noient dans un magma kitsch (témoin Alita: Battle Angel).À propos de ce film, notons tout de même une dernière chose : cette année, les femmes au pouvoir ont envahi les écrans de part et d’autre de l’Atlantique. On les trouve aussi bien dans la science-fiction super-héroïque (Alita, Endgameet surtout, la petite révolution Captain Marvel)1, dans les films historiques (Portrait de la jeune fille en feu, La Favoriteet Mary Stuart, reine d’Écosse) que dans des œuvres ancrées dans notre époque qui repensent les rapports de genres (Proxima, Sibyl). Espérons que la tendance se poursuivra dans les années à venir.
Palmarès cinéma 2019Et maintenant, assez parlé, place aux films !
1) Another Day of Life  : malheureusement passé quasi inaperçu à sa sortie, ce film d’animation est pourtant l’un des chocs esth-éthiques de ces dernières années 2) Portrait de la jeune fille en feu : comment saisir l’insaisissable ? comment dire l’indicible ? Demandez à Céline Sciamma, Adèle Haenel et Noémie Merlant3) Les Misérables : une claque dans la représentation des banlieues populaires, qui marquera durablement le genre 4La Vie scolaire : pendant comique des Misérables, le second film du duo MehdiInir/Grand Corps Malade met à mal la représentation coloniale de l’enseignement en REP 5)Joker : quand le Comité Invisible s’empare d’Hollywood 6La Favorite : et si le pouvoir politique exercé dans les cours européennes du XVIIIesiècle sied davantage aux femmes qu’aux hommes ? 7L’Époque: Joker, mais en documentaire et en France 8Parasite : une Palme d’or méritée pour une aussi frontale confrontation de classes 9Midsommar : plutôt qu’un film d’horreur, il faut voir le second film d’Ari Aster comme une expérience anthropologique et visuelle des plus frappantes 10Once Upon a Time… in Hollywood : Quentin Tarantino poursuit sa réécriture progressiste de l’Histoire en s’attaquant cette fois au sacro-saint Hollywood.
D’autres films auraient mérité de figurer dans ce classement. Au lieude les oublier, en voici quelques-uns, à compléter par ceux déjà cités plus haut- Dragons 3 : Le Monde caché- Vice- Le Daim- Spider-Man: Far From Home- Ma Vie avec John F. Donovan- Bacurau- Sorry We Missed You- J’ai perdu mon corps
Du fait de ma transition du forfait mensuel au paiement à la séance, j’ai volontairement évité les grosses daubes. À défaut d’un véritable tableau des flops de l’année, j’indiquerai quelques films qui m’ont déçu ou qui ont confirmé le peu d’espoir que j’avais en eux :- Glass : g pa compri. Plus sérieusement, quel intérêt de créer tant de méta si c’est pour refaire un film de super-héros comme un autre, le plaisir en moins ?- Triple frontière : j’espérais peu de choses d’un film de quéquettes, vu un soir où je n’avais pas d’idées. J. C. Chandor a confirmé mes attentes. - Mary Stuart, reine d’Écosse : peut-on violer l’Histoire pour lui faire de beaux enfants (Alexandre Dumas) ? Réponse avec ce film- The Dead Don’t Die : ma vraie déception de l’année. J’attendais beaucoup de Jim Jarmusch, mais pas qu’il snobe à ce point le cinéma de genre- X-Men: Dark Phoenix : le plus mauvais de tous, sans être catastrophique pour autant, qui contribue au demeurant à nier le potentiel émancipateur de la violence féminine- Le Roi : d’une belle facture, la production Netflix opère cependant un net virage conservateur au sein des films historiques.
Sur ce, je vous souhaite une belle année riche en expériences cinéphiles !
Palmarès cinéma 2019
Maxime
Si vous avez aimé cet article, n'hésitez pas à me soutenir sur Tipeee !  1 Pour de plus amples informations sur les représentations des super-héroïnes combattantes au cinéma, je vous invite à découvrir mon article « Les super-héroïnes se battent-elles comme des filles ? », paru dans la très bonne revue Genre en séries en novembre dernier.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Balndorn 391 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine