Saint Sébastien (Mittenwald, Haute Bavière)
Saint Sébastien, sa vie, son martyre et son culte. (suite).
Extrait de L'Archer français : journal des tireurs d'arc du 15 février 1857.
(Suite du post précédent : Vie et martyre de Saint Sébastien, intercesseur en cas d'épidémie)
Dans le siècle suivant, sous l'empereur Valentinien, la grande vénération des fidèles pour la mémoire de Saint-Sébastien, engagea le pape Damase Ier à faire construire, sur le tombeau de ce généreux confesseur de la foi la basilique qui porte son nom et qui fut longtemps l'un des sept principaux sanctuaires du monde chrétien.,
Plus tard, au XIIIe siècle, le pape Honoré III fit déposer, dans un sarcophage, de marbre, ce qui, à cette époque, restait encore du corps de Saint-Sébastien aux catacombes.
Nous voyons dans le livre des Cérémonies et Coutumes religieuses de Bernard Picard, que la plus grande partie du corps du saint est encore à Rome, dans l'église de Saint-Sébastien, hors des murs, mais que sa tête est à Saint-Pierre du Vatican. C'est ce qui est en effet consigne dans l'index des reliques de Rome par Pancirole, qui nous apprend de plus qu'un des bras du saint et une des flèches instruments de son martyre,sont conservés à Sainte-Marie d'Equirio.
« La plus célèbre et la plus importante des translations des reliques de Saint-Sébastien, lisons-nous dans la Vie des Saints par Baillet, est celle qui se fit en France du temps de Louis-le-Débonnaire, qui, ayant obtenu ce riche trésor du pape Eugène II, le fit transporter solennellement à Soissons, et placer par l’évêque Rothade dans la célèbre abbaye de Saint-Médard, le deuxième dimanche de l'avent, qui était le neuvième jour du mois de décembre de l'an 826. Le roi espérait être délivré, par la vertu de ces reliques, d'une fièvre et d'une dysenterie dont il souffrait, ainsi que sa femme et ses enfants. Ce fut par suite des démarches d'Hilduin, abbé de Saint-Médard et de Saint-Denis, que ces reliques furent accordées à la première de ces deux abbayes.
Hilduin s'était, en 814, c'est-à-dire l'année de la mort de Charlemagne, rendu à Rome en qualité d'ambassadeur. Au retour de l'abbé, Rodoin, prieur du monastère, sur le récit que faisait Hilduin des objets d'édification qu'il avait rencontrés dans son voyage, le pressa de solliciter du souverain pontife le don de quelques reliques. Celles d'un saint né en France paraissant devoir être plus naturellement offertes à la dévotion d'une population française, le pape accorda une partie des ossements de Saint-Sébastien, et Rodoin se rendit à son tour à Rome, d'où il rapporta le précieux dépôt.
Le transport des reliques à travers les provinces jusqu'à Soissons fut une suite de marches triomphales. Une foule de miracles, disent les chroniques du temps, se manifestèrent sur leur passage.
L'affluence des pèlerins que la présence de ces reliques à St-Médard y fit accourir ensuite, tous les ans, fut immense, et les aumônes qu'elles attirèrent dans le trésor de l'abbaye en firent une des plus riches et dès plus importantes de la chrétienté.
Invoqué dans les fléaux publics, notamment, notamment, Saint-Roch, contre la peste, patron des gens de guerre en général et plus spécialement de ceux qui se servaient de l'arc, Saint-Sébastien vit pendant une longue suite de siècles son culte un des plus populaires de la France catholique. Les historiens décrivent une neuvaine avec procession solennelle qui se fit à Saint-Médard, en 1530, après le retour de captivité du roi François Ier, et à laquelle assistèrent, disent-ils, près de 300.000 personnes.
Les guerres de religion vinrent, dans le même siècle, il est vrai, interrompre cette brillante période du culte de Saint Sébastien. Les huguenots pénétrèrent dans l'abbaye, brisèrent les chasses et violèrent les reliques. Cet événement, d'après le recueil du jésuite Bolland, aurait eu lieu le samedi 27 septembre 1564 ; mais notre savant ami, M. l'abbé Poquet, qui travaille depuis plusieurs années à une histoire de l'abbaye Saint-Médard, place cet événement, non pas en 1564, mais en 1567, s'appuyant d'ailleurs sur toutes les histoires, tant imprimées que manuscrites, delà ville de Soissons.
Les reliques de Saint-Sébastien ne périrent du reste pas dans le sac de l'abbaye. Elles furent sauvées par une veuve nommée Jeanne Hurillon, qui les déposa entre les mains de Catherine de Bourbon, abbesse de Sainte-Marie de Soissons. Après un procès-verbal de vérification dressé, le vendredi 17 janvier 1578, par l'évêque Charles de Roissy, les reliques du saint purent être de nouveau offertes à la vénération des fidèles.
Si l'arme qu'avaient manié les soldats de Saint-Sébastien cessa d'être redoutable sur les champs de bataille, les traditions pieuses des hommes de guerre d'autrefois se conservèrent du moins chez la milice cifique des archers modernes, et le chevalier, de l'arc mit son honnête et salutaire récréation sous la protection de Monseigneur Saint-Sébastien comme le chevalier des croisades y avait mis les exploits de son bras.
Mais la terrible révolution qui, à la fin du siècle dernier, abattit tant de puissances, ne passa pas sans que St-Sébastien en ressentit dans son culte une atteinte. Une nouvelle violation des reliques eut lieu. Une petite-châsse du saint fut inventoriée à la cathédrale de Soissons par les commissaires du district, le 8 octobre 1792 ; mais cette église, bien qu'ayant une de ses principales chapelles sous l'invocation du saint, n'en possède pas aujourd'hui de reliques. On ignore donc ce que sont devenues celles qui se trouvaient à Saint-Médard, à moins que celle que possède le village de Crouy, près de Soissons, et qui consiste en un os du bassin de 26 centimètres de longueur, n'en provienne. La tradition du pays l'admet, et la proximité de Crouy et de l'abbaye donne à la tradition un assez grand degré de probabilité.
Carlier, dans son Histoire du duché de Valois, nous apprend qu'à la Ferté-Milon on avait, au IXe siècle, construit, dans l'enceinte du château, une chapelle sous l'invocation de Saint-Sébastien, où l'on avait déposé une parcelle des reliques du saint. En 1594, le 10 octobre, Henry IV rendit un édit pour faire démanteler le donjon ; toutefois, la chapelle ne fut pas détruite, et les reliques y furent conservées jusqu'à la révolution, époque où les reliquaires furent remis au district avec toute l'argenterie de l'église. Quant aux reliques mêmes, elles disparurent.
La présence de ces reliques avait développé la dévotion à Saint-Sébastien et favorisé à la Ferté-Milon la création de compagnies d'archers, dont la première portait l'uniforme rouge, la seconde l'uniforme bleu, et la troisième, simple compagnie de volontaires, ne portait pas d'uniforme.
La cathédrale de Sens est du petit nombre des églises de France qui possèdent aujourd'hui une relique du patron des archers. C'est un ossement placé dans un reliquaire que l'on expose sur l'autel lorsque l'archevêque officie. Sans avoir de donnée certaine sur la provenance de cette relique, M. l'archi-prêtre de Sens pense qu'elle peut avoir été donnée à l'un des anciens archevêques, Monseigneur Longuet, qui avait précédemment occupé le siège de Soissons.