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Hablas español?

Publié le 19 juillet 2008 par Boebis @bonjoursamba
Plus ça va, et plus je suis attiré par les langues étrangères. Alors que la grammaire me rebutait, je deviens fasciné par ces petites règles tordues qui m'horripilaient. C'est fou ce que ça révèle sur la manière de penser!
Un autre truc intéressant est le rapport qu'on a à une langue et qui nous révèle de façon tout aussi saisissante. Petite illustration en musique avec des artistes non hispanophones qui se sont essayé à la langue de Cervantès.
Au début des années 1950, quand on pense à l'espagnol on pense à l'Espagne du dictateur Franco. Mais dans l'imaginaire français, l'Espagne c'est aussi le pays des anarchistes des années 30. Rien d'étonnant donc à ce que Brassens l'anar offre une version hispanique de son premier succès, La Mauvaise Réputation. Le titre a d'ailleurs été repris avec fièvre par Paco Ibañez.


Georges Brassens - La Mala Reputación



Robert Wyatt, l'homme à la plus belle voix du monde, reprend un tube de sa jeunesse, Hasta Siempre Comandante de Carlos Puebla. L'espagnol renvoie ici à l'imaginaire révolutionnaire des années 1960, au mythe du Che et du Cuba socialiste. Pour info, le titre a aussi été repris par Zebda. Dans la même veine on peut citer ce titre de Doc Gyneco.


Robert Wyatt - Hasta Siempre


Comme son nom l'indique, Mano Solo est attiré par l'espagnol. Il le prouve dans une de ses plus belles chansons, Barbès-Clichy. L'utilisation d'une langue étrangère est surprenante puisqu'il s'agit d'une déclaration d'amour toute parisienne. Les paroles ne sont pas très explicites, mais je l'imagine errant seul, entre Barbès et Place Clichy se remémorant violemment ses amours qui s'embrouillent jusqu'à se fondre avec Paris et qu'il crie «Paris prends moi dans tes bras / de Barbès jusqu'à Place Clichy / c'est là, que j'aime perdre ma vie». L'espagnol est ici dénué de connotation politique mais sert peut-être à donner un parfum de mystère et de romantisme.
Mano Solo - Barbès Clichy



Encore une autre approche de l'espagnol avec le rappeur franco-colombien Rocca. Il a commencé sa carrière en France avec La Cliqua avant de fonder un groupe de rap latino, Tres Coronas installé à New York. Dans le titre El Original, derrière un egotrip classique, Rocca donne un mélange péchu de ses deux cultures avec beat à base de salsa et un flow bilingue qui lui permet de se vanter "demande à tes gars combien de MC rappent en deux langues ?". L'espagnol devient le passeport d'une Amérique latine qui fait rêver les jeunes Français, car comme le chante Rocca « tout ce qui est latino plait aujourd'hui ». Ainsi, même si Rocca contrairement à ses ainés, n'est pas tributaire des mythes révolutionnaire ou de l'exotisme, son utilisation de l'espagnol relève aussi de la mise en scène. La bimbo bronzée a remplacé le barbu rebel sur le trône du cool, et c'est peut-être pas plus mal.

Rocca - El original


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