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Bravery, Un manga dynamique par H2T et Kwalia au FIBD 2020

Publié le 26 mars 2020 par 7bd @7BD

Bravery, un manga français nativement numérique présenté au FIBD

Le festival d'Angoulême nous a offert la présentation d'une petite surprise qui en cache peut-être une énorme !

En effet, Florian Dupas de Kwalia et Yoann Le Scoul de H2T Éditions étaient venus nous présenter un manga Dynamique, nommé Bravery.

Et surtout, ils sont venus nous raconter l'histoire derrière ce manga, toute aussi passionnante que le manga lui-même !

Bon, d'entrée, nous étions tous d'accord pour reconnaître que le titre de la conférence initiale, comment dire, n'était pas le plus attractif du monde.

Regardez donc : Quels outils pour créer en format DiViNa, le futur de l'ePub3 ?

Mais revenons à nos deux intervenants et au projet Bravery. Yoann Le Scoul est formé aux arts numériques et est spécialisé dans le Game Design. Il travaille chez H2T/Pika et y développe des projets de BD.

Florian Dupas, lui, est ingénieur, a œuvré dans l'humanitaire avant de revenir à la technologie. Il a travaillé sur plusieurs projets qui l'ont amené à se lancer dans le développement d'un outil qui permettra de faire de la BD nativement numérique, sous différentes formes, Webtoon, Turbomedia ou autre. Tout cela au travers de la structure qu'il a créé: Kwalia.

C'est avec cet outil que Yoann et lui ont développé Bravery.

Ce manga est accessible en ligne gratuitement sur le site de H2T

A la lecture, vous verrez que ce manga propose une forme Turbomédia, - BD qui se lit case à case sur un cran -, mais qui se révèle plus riche qu'une simple succession de cases rectangulaires. Car vous verrez des enchaînements par superposition de case ou des transitions par volet (la nouvelle case pousse l'ancienne hors du cadre pour prendre sa place), des petits effets d'animation, comme ces feuilles qui tombent dans le vent.

Bref, tout un travail mettant en avant les possibilités de la BD numérique et surtout de l'outil créé par Kwalia !

Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, Florian revient un peu sur le marché de la BD numérique actuel. Avec les diffuseurs de BD numérisées - comprenez les BD scannées et mis au format planches pour le numériques - comme Izneo, Sequencity et quelques autres.

Mais si la BD nativement numérique s'est donc développée, Florian remarque qu'elle se heurte au mur du modèle économique et il arrive à un constat en trois points.

Les budgets des gros projets alloués par la télévision se tarissent. Les nouvelles écritures de France Télévisions, qui avaient soutenu Phallaina, ont disparu et ARTE creative, qui avait soutenu Eté, s'est retiré du projet pour se recentrer sur autre chose.

Pour Florian, la solution viendra de la différenciation des solutions techniques (avoir un outil en amont), commerciales (avoir une plate-forme spécialisée en aval) et la gestion des formats (qui permet la pérennité, l'industrialisation et facilite la diffusion sur une plate-forme).

Mais ces trois solutions ne peuvent être développées sans rien savoir les unes des autres. Il faut penser global en même temps.

Et le DiviNa, le Digital Visual Narrative, regroupe tout cela.

Avec ces idées fortes, Florian a rejoint l'EDR Lab, un groupe de réflexion qui travaille sur la nouvelle version de l'ePub (le format open source des livres numériques) afin de l'adapter au récit visuel (et donc notre bonne vieille BD). Bref, il faut étendre l'ePub au DiviNa ou inclure le DiViNa dans l'ePub. En tout cas, il faut agir ! Et c'est pour cela que Kwalia a développé un logiciel pour faire du DiViNa.

Mais pour comprendre l'ampleur de la tâche, maintenant que le nerf de l'outil était développé, il fallait un projet pilote. Voilà pourquoi Kwalia s'est approché des éditeurs. H2T a été intéressé et a lancé Yoann Le Scoul sur l'idée.

Le projet a été lancé en décembre 2018 et a évolué selon le planning suivant:

Yoann explique que c'était sa première expérience dans le domaine. Il ne savait comment se positionner par rapport à une BD traditionnelle alors il a commencé par le commencement. Une histoire et un story-board. Ce dernier fut réalisé en quelques semaines avec 80 vignettes, certaines animées, d'autres pas.

Pour Florian, Cette collaboration était importante. Suite aux échanges avec Yoann, il devait avancer en parallèle sur l'outil de lecture, le format et l'outil de création pour aider les auteurs.

Il a partagé ces retours d'expérience avec le groupe de Travail sur l'ePub, il y a eu pas mal d'aller retour, au départ pour se mettre d'accord sur le langage. En effet, l'EDR Lab regroupe des participants de corps de métiers différents, et donc des jargons différents. Il fallait veiller à ce que ce soit bien les mêmes idées derrière les mots pour éviter les incompréhensions et faire partir tout le monde dans le même - et bon - sens.

Il y avait des choix clés à faire dès le départ, comme le sens de lecture (à la Japonaise pour Bravery), le choix du Noir et blanc, et le choix d'avoir un seul geste à faire pour progresser dans l'histoire (éviter un coup le scroll, un coup le tap, etc...).

Bravery fait aujourd'hui cent six pages. Une des difficultés a été de le rendre lisible sur tout type de supports.

Il y a aussi les travaux invisibles. Par exemple, nous raconte Yoann, pour les cases qui sont des superpositions de bulles par apparition successive, le DiViNa charge une page complète à chaque apparition. Donc, c'est lourd. L'idée est d'optimiser pour qu'il charge uniquement la nouvelle case ou la nouvelle bulle. Mais cela reste invisible pour le lecteur (vous, hein, pas l'outil de lecture).

Florian ajoute que trois ou quatre formes de transitions (slide, slide out, push, fondu) ont été mises en place, pour les formes plus complexes qui n'ont pu être élaborés, elles sont pour l'instant sous forme de vidéo. Notons que les temps de transition sont modifiables.

En terme de création, il faut tenir compte des effets techniques. il faut penser à dessiner des cases deux fois plus grandes quand on veut une transition par scroll le long d'un paysage par exemple.

Florian retient trois leçons de cette aventure : il faut s'assurer de parler le même langage, il faut savoir dire non, et il faut étudier les comportements (des auteurs, pour voir leurs besoins et pour voir s'ils aiment se servir de l'outil de création, des lecteurs, même s'il y a peu de recul pour l'instant).

Le travail sur le DiViNa se divise en étapes, qualifiées de niveau.

Aujourd'hui, sont passés le niveau 0 (l'outil gère tous les sens de lecture) et le niveau 1 (transition et points d'arrêt). Les étapes suivantes sont le niveau 3 (le son, les calques peut-être) et 4 (le parallaxe ?).

Il faut prévoir aussi le multilingue et le multicase. Bref, un pas a été franchi, mais il en reste encore quelques uns.

Le modèle économique de l'outil sera le freemium. Il sera payant pour les fonctionnalités liées au cloud (les versions commentées et partagées).

Il faut aussi penser à la diffusion, par exemple, il faudrait convertir le Webtoon dans ce format DiViNa pour les plate-formes de diffusion. Les bibliothèques pourraient l'utiliser aussi pour le prêt numérique.

En fait, il va falloir aussi créer les bonnes pratiques côté lecteur, côté diffuseur et côté auteur.

Après la rencontre, un atelier a pris place qui intéressait les artistes présents afin de manipuler le logiciel et voir comment il fonctionnait. Dans les petites salles d'atelier du Pavillon jeunes talents, ce sont bien une douzaine de personnes qui sont venues jeter un œil, intrigués.

Espérons que le jour viendra vite où nous pourrons tous manipuler cet outil de création de BD numérique...

Au-delà d'un manga de qualité et d'une histoire au format intéressant, la collaboration entre Florian et Yoann va permettre, espérons-le, que la BD numérique, ou DiViNa ou quelque soit son nom, fasse un grand bond.

Car si Kwalia et H2T ont débroussaillé un énorme chemin avec Bravery, la route est encore bien longue.


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