L’anthropologue breton Donatien Laurent vient de mourir. Ce fut lui qui réhabilita La Villemarqué (1815-1895) cet inventeur de la Bretagne, membre de l’Académie de Berlin, dénoncé comme faussaire par Marc Bloch parmi beaucoup d’autres. Il avait la réputation d’avoir écrit lui-même les chants bretons qu’il avait publiés. Plus d’un siècle plus tard, Donatien Laurent a retrouvé ses carnets prouvant non seulement qu’il avait enquêté mais était parfois arrivé à retrouver les traces des personnes qui avaient chanté.
Les leçons de sa thèse d’Etat Aux sources du Barzaz-Breiz publiée chez ArMen en 1989 sont multiples. La première nous montre la nécessité de ne travailler que sur des preuves. Au contraire, les critiques de La Villemarqué de Luzel à Marc Bloch s’appuyaient sur des présomptions ou la (mauvaise) réputation. Pour cela, j’avais utilisé le travail de Laurent dans Vérités en quête d’auteurs, consacré aux supercheries. En second lieu, les normes de collecte et d’édition de la « littérature orale » ont profondément changé depuis deux siècles. Enfin, ces textes oraux peuvent être utilisés pour accéder à la connaissance des événements historiques tels qu’ils ont été perçus par « ceux d’en bas ».
Ces quelques mots voudraient rapidement montrer l’importance de l’œuvre de Donatien Laurent même si depuis, l’anthropologie européanisme a eu tendance à s’éloigner du monde rural.
Bernard Traimond