Ce onzième épisode de ma série sur la « créativité en temps de crise » sera un peu plus opportuniste que les précédents, puisqu'il aborde le cas de TrueAccord, une startup dont le modèle profite naturellement de la crise et dont la dernière initiative, bien qu'adaptée à la situation actuelle, était en préparation depuis plusieurs mois.
À l'origine, la mission de la jeune pousse consiste à offrir aux institutions financières des outils destinés à gérer le recouvrement de dettes auprès des emprunteurs défaillants. Tandis que près de 17 millions d'américains ont perdu leur emploi au cours des trois dernières semaines, sans même compter ceux qui sont atteint par l'épidémie de COVID-19 et font face à de fortes dépenses imprévues (en dizaines de milliers de dollars), le besoin en services de ce genre est évidemment en pleine expansion.
La nouvelle plate-forme TrueAccord Engage a donc vocation à répondre à cette attente, en étendant le champ d'action de la solution d'origine, d'une logique B2B vers une approche directe du consommateur. Dans ce but, elle propose aux clients des établissements de crédit qui n'ont pas (encore) adopté son produit de les accompagner, pas à pas, dans leurs négociations avec leurs créanciers, en vue d'ajuster leurs conditions de remboursement quand ils ne parviennent plus à honorer leurs échéances.
En pratique, le visiteur est d'abord invité à fournir une série d'informations sur lui-même et sur le problème qu'il rencontre : identité, statut de la dette, contrepartie (qui peut être une banque mais aussi un fournisseur de services), montant, motif du retard (perte d'emploi ou de revenus et ennui de santé, parmi les principaux) et explications détaillées. Parce qu'il n'est pas question de solliciter une amnistie mais plutôt un délai exceptionnel, il est également appelé à préciser quand il s'engage à régler son dû.
Armée de ce dossier, TrueAccord prépare alors – avec l'aide d'un moteur propriétaire à apprentissage automatique prenant en compte l'ensemble de ses paramètres – une demande de résolution à l'adresse du créancier, qu'elle transmet ensuite par courrier, par téléphone ou par messagerie électronique (le plus courant). L'utilisateur de la plate-forme dispose d'un tableau de bord sur lequel il suit l'avancement des échanges et les éventuelles tractations, jusqu'à l'aboutissement à un accord satisfaisant pour tous.
La soudaineté et la violence de la catastrophe que nous traversons entraîne une explosion des incidents sur les crédits, et les modes de traitement traditionnels sont doublement inadaptés puisque, d'une part, les organismes de recouvrement spécialisés risquent d'être débordés et, d'autre part, les personnes concernées ne méritent pas de se voir soumises à leurs méthodes parfois brutales (de l'ordre du harcèlement, notamment) dans des circonstances déjà suffisamment pénibles et stressantes pour elles.
Dans ces conditions, l'approche des défaillances que défend TrueAccord a de quoi séduire et convaincre. Avec son parti pris de rechercher systématiquement un compromis, à l'amiable, qui prenne en compte le contexte du débiteur sans négliger les intérêts du créancier et privilégie toujours la discussion à la confrontation (et la menace), non seulement le second a-t-il des chances d'obtenir un meilleur résultat mais encore le premier sera-t-il plus serein et focalisé sur ses efforts pour se sortir de ses difficultés.