Aux actrices et acteurs du monde de la CULTURE. A tous ceux et celles qui l’aiment
9 avril 2020
Ce n’est pas une déclaration d’amour de circonstance. On mesure mieux ce qui fait défaut à nos vies dans l’épreuve que traversent notre pays et toute l’humanité, mais on ne le découvre pas.
« Vous me manquez », c’est une manière de vous redire combien la culture, la création, les arts ne sont pas des suppléments pour nos vies. Ce que vous faites nous grandit, nous relie, nous déplace, nous révèle, nous émeut, nous bouscule, nous stimule.
Ce que vous faites nous aide à vivre, et souvent nous en donne le goût. Alors ce que vous faites nous manque quand la source se tarit. Bien sûr, nous n’en avons pour autant fini avec la culture : il y a des livres plein nos étagères, des œuvres dans les tuyaux du net, des spectacles improvisés sur les réseaux…Nous trouvons encore à partager cette nourriture. Mais il y a aussi tout ce qui est empêché, tout ce qui est interrompu, tout ce qui est en suspens. Et nous ne pouvons pas vivre à l’arrêt.
Dans les métiers de la culture aussi, il y a celles et ceux que l’on voit, que l’on connait et que l’on reconnait. Il y a celles et ceux que l’on voit moins et que parfois l’on reconnait moins. Et lorsque dans la société monte l’aspiration à mieux reconnaitre les métiers, tous les métiers, nous voulons qu’elle concerne aussi les métiers du champ culturel. Et que l’exigence de respecter sans discrimination les femmes et les hommes s’y déploie le jour d’après.
Alors « vous nos manquez », c’est aussi une façon de prendre des nouvelles, de prendre soin de vous, de tous les horizons de la culture, de la création, des arts, de l’éducation populaire.
La crise ne doit pas avoir raison des myriades de projets, des compagnies, des éditeurs, des artistes.
Les politiques publiques doivent protéger nos capacités culturelles, et tous ceux et celles qui vivent de la culture et la font vivre. C’est pour cela que nous avons demandé à ce que les institutions maintiennent le plus haut niveau d’engagement sur les projets engagés, que les règles d’indemnisation soient adaptées, que les règles des fonds de soutien intègrent la spécificité des acteurs culturels. Ces mesures sont d’autant plus essentielles qu’il ne pourra pas y avoir de relance pour sortir de la crise sans dimension culturelle.
Nous savons que les œuvres naissent à la fois des esprits et du réel, que certains se nourriront de l’épreuve pour nous permettre de mettre sur elle des mots et des images.
Nous savons que les œuvres, parois à leur corps défendant, disent le monde et que parfois elles nous permettront d’entrevoir celui du jour d’après.
Car nous avons besoin, plus que jamais, que s’ouvrent les champs de l’imaginaire. Nous avons besoin de mettre en évidence les tendances à la décivilisation pour mettre en route des dynamiques de civilisation. Pour une nouvelle étape de l’humanité où l’argent ne dominera plus nos vies, nos relations, nos choix, mais où l’argent sera remis à sa place de moyen.
Sont en cause les politiques libérales qui ont dégradé nos outils communs, nos biens communs, nos liens communs.
L’épreuve que nous traversons ne nous ramène-t-elle pas aux choses essentielles ?
N’appelle-t-elle pas profondément à prendre soin de chacune et de chacun dans toutes les dimensions ?
Ne vient-elle pas aiguiser la quête de sens ?
La culture, son chant général est pour nous une œuvre à laquelle chacune et chacun participe à sa façon.
Alors « vous nous manquez », c’est une façon de redire « nous nous manquons », parce que, humains, nous sommes résolument ces êtres de relation, de passerelles, de partage…Ces êtres de liberté. Appelés à la pleine émancipation.
La culture, nous voulons à vos côtés en prendre soin.
Pierre Dharréville – Délégué national du PCF à l a Culture