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Une autre fin (9)

Publié le 01 juin 2020 par Nicolas Esse @nicolasesse

(Le fil de l’histoire dans la catégorie « Une autre fin » sur la barre de droite)

Nous ne sommes plus jamais retournés dans le grand hall.
Plus tard, beaucoup plus tard, je me suis retrouvé là par hasard. Je m’étais endormi dans le métro, je m’endormais partout, en ce temps-là. Quand je me suis réveillé, j’ai regardé autour de moi. La rame était vide, j’étais presque arrivé au bout de la ligne. Je suis descendu à l’arrêt suivant, les jambes lourdes et l’esprit fripé. J’ai suivi les lignes tracées sur le quai, la sortie sur la droite, la rampe d’escaliers, les murs jaunes, le long couloir où nous comptions les secondes avant d’apercevoir le ciel.
Le ciel était bas, ce jour-là. Bien plus bas que dans mon souvenir. De longues trainées noires maculaient les brumes de l’automne. Un filet de lumière grasse tombait sur le sol jonché d’emballages écrasés, restes de pain passé, frites éventrées et barbouillées de ketchup. Des bouteilles vides, droites ou couchées sur le côté et le faible scintillement des aiguilles tordues au bout de leurs seringues. Manger. Boire. Sortir. J’avais bien trop peur de la piqûre des aiguilles et de voir mon sang épais refluer dans le haut du cylindre gradué. Il y a mille autres façons de partir, mille autres façons de s’échapper, alors pourquoi avaient-ils sali mon ciel et vomi sur ma mère ?
Je suis rentré chez moi. Dans la case soir de mon semainier trois pilules pâles attendaient que je les cueille avant de les avaler. Dans l’eau, j’ai ajouté une cuillère à soupe d’alcool lyophilisé. J’ai tout bien mélangé et bu d’un seul trait, cul sec, comme un homme. L’alcool avait un goût de brûlé. Un nouveau parfum qu’ils avaient recréé, qui devait rappeler l’intensité du café.
J’ai dû me faire violence pour ne pas tout recracher.


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