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Un poème du recueil Orchestres de Léo Larguier, où il est question de Louis II de Bavière et de Helene von Dönniges-Racowitza

Publié le 31 août 2020 par Luc-Henri Roger @munichandco

Nous découvrons aujourd'hui, - un peu tard mais avec le bonheur de l'orpailleur qui vient de découvrir une pépite, - un poème de Léo Larguier qui a échappé à nos recherches.

En 1914, l'écrivain Léo Larguier publiait son quatrième recueil de poèmes intitulé Les souvenirs de la princesse Racowitza furent traduits en francais dès 1910 par Jules Hoche et parurent sous le titre Orchestres. Le poème XLVI, sans titre, rappelle un épisode de l'enfance du futur roi Louis II de Bavière, alors prince héritier, avec lequel Helene von Dönniges avait été admise à jouer. Devenue par mariage princesse Racowitza, elle évoque ce souvenir dans Von anderen und mir. Erinnerungen aller Art qu'elle publia en 1909. On peut supposer que Léo Larguier en avait pris connaissance. Notre traduction de ce passage figure à la suite du poème. Princesse et comédienne, souvenirs de ma vie. On y peut lire, entre autres choses, qu'elle inspira la forme de l' Apollon de Carpeaux, dans l'immortel groupe de la Danse, ce grand ange dionysiaque et féminin qu'entourent les bacchantes, ce que Léo Larguier mentionne vers la fin de son poème.
ORCHESTRES

Comme vous m'émouvez, ô troubles héroïnes,

Aventurières toujours tristes et divines :

Wanda qui méprisiez votre sinistre époux

Sacher Masoch, l'amant des fourrures ; et vous

Hélène de Racowitza, belle et si rousse

Qu'en un parc de Munich aux troncs jaunes de mousse,

L'enfant royal qui devait être Louis Deux

Croyant que le soleil mourait dans vos cheveux,

Prit votre chignon d'or dans sa main potelée,

Tandis que s'effaraient en tunique étoilée

D'Aigles Noirs et de Croix de Fer, les chambellans.

Et que riait à vos cheveux, à vos rubans,

Cette petite altesse en bonnet de dentelles

Qui chérissait déjà les choses les plus belles,

Et qui devait mourir dans le lac de Starnberg

Pour avoir trop aimé les Cygnes de Wagner.

Elisabeth, l'Impératrice vagabonde,

Vous ressemblait, Hélène, et votre nuque blonde,

Votre épaule de marbre et vos bras durs et beaux

Firent pendant des nuits rêver le vieux Carpeaux

Qui se levait plus tôt quand il vous avait vue

Accoudée au balcon d'une loge, mi-nue,

Dans les velours royaux des robes d'apparat,

Par ces soirs de galas fleuris à l'opéra

Qui sentent les gants blancs, les violettes de Parme,

Et ce parfum léger qui, plus que tous, me charme,

D'une robe de soie échauffée au soleil.

Hélène de Racowitza, grand corps vermeil

De princesse allemande et de fille guerrière

De Sparte, j'eus voulu vous voir sous la lumière

D'un lustre, et respirer, parmi les roses-thé,

L'odeur d'œillet poivré de votre bras ganté.

Les souvenirs d'Helene von Dönniges, compagne de jeu du prince héritier Louis II de Bavière et modèle du sculpteur Carpeaux.

Un poème du recueil Orchestres de Léo Larguier, où il est question de Louis II de Bavière et de Helene von Dönniges-Racowitza

Helene von Dönniges, parfois écrit Helene von Döniges (Berlin-1845-1911), était la première des sept enfants du Professeur Wilhelm von Dönniges (plus tard diplomate), que le prince Maximilien de Bavière , le futur Maximilien II, père du futur roi Louis II, appela à sa cour en raison de ses compétences scientifiques en tant qu'historien.

Elle épousa le Valaque Janco Gregor von Racowitza (Iancu Racoviţă) et devint ainsi Princesse Racowitza. Le prince mourut jeune, et la princesse connut encore deux mariages, on la retrouve sous les patronymes de Helene Friedmann puis, après divorce et remariage, de Helene von Schewitsch. Elle fut écrivaine et actrice de théâtre, sous le nom de princesse de Racowitza.

C'est sous le nom de Princesse de Racowitza qu'elle publia en 1909 à Berlin (Gebrueder Paetel) Von anderen und mir. Erinnerungen aller Art, traduit en 1910 en anglais sous le titre An autobiography (New York, The Mac Millan Company). La princesse raconte dans le chapitre III qu'elle fut eut l'occasion de côtoyer la famille princière bavaroise et les jeunes princes royaux, dont elle fut une compagne de jeu.

Voici une traduction libre de ce chapitre:

[...] Ce qui va suivre provient d'histoires qui m'ont été racontées par la suite.

Quand j'avais environ dix mois, mes parents firent un séjour avec le couple royal, le prince héritier Max et la princesse Marie, à Hohenschwangau. Ma mère m'avait laissée avec la nourrice dans le jardin du petit château, mais la nourrice s'était éloignée et m'avait laissée seule.

La jeune princesse héritière se promenait dans une allée voisine, quand les pleurs d'un enfant attirèrent son attention. Elle se précipita vers l'endroit d'où provenaient les pleurs et lorsqu'elle me trouva allongée sur l'herbe, elle me reconnut aussitôt. La grande dame me prit dans ses bras avec compassion, essaya de me réconforter et me porta vers ma mère, qui se hâtait dans notre direction. Avant de me remettre à ma mère, la princesse a pris mon petit poing de bébé, le secoua en direction de maman et lui dit:

"La petite Hélène ne doit pas être abandonnée comme cela, elle est née pour être aimée et elle va pleurer jusqu'à en mourir si on la laisse seule."

Cette petite anecdote datant de ma plus tendre enfance m'a souvent été racontée par ma mère.

Ah! Combien de fois ai-je plus tard pleuré amèrement quand j'étais abandonnée par ceux qui étaient supposé m'aimer; mais alors, aucune gentille princesse ne vint pour m'emmener et me consoler dans ma solitude, et les "princes" qui se proposaient à cette fin comprenaient les termes "amour" et "être aimé" dans un sens tout à fait différent de celui qui avait animé la bonne fée de mes premiers jours.


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