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Radovan Karadzic : Quelques leçons à tirer de l'arrestation du Pol Pot des Balkans...

Publié le 23 juillet 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Mercredi, 23 Juillet 2008 11:33

L'éditorial de RELATIO-EUROPE par Daniel RIOT

Qui, dans l'Europe démocratique, peut ne pas se réjouir de l'arrestation de Karadzic, le psychiatre  fou de nationalisme devenu un Pol Pot des Balkans ? Les réactions au Conseil de l'Europe et dans  l'Union européenne ont valeur d'applaudissements, et de chants d'autosatisfaction. Cette arrestation  « constitue une étape importante dans la voie du rapprochement de la Serbie avec l'Union européenne », déclare  la présidence française de l'Union. Soit Mais les chants de satisfaction entonnés ont aussi valeur de lâche soulagement.

Radovan Karadzic : Quelques leçons à tirer de l'arrestation du  Pol Pot  des Balkans...

Treize ans d'attente, c'est long ! Et Karadzyc n'incarne pas que la folie meurtrière du nationalisme déchaîné. Ce psychiatre fou devenu un Pol Pot des Balkans  symbolise aussi l'impuissance de la communauté internationale , la mauvaise conscience des, Européens  devant une série de faits accablants :  les  tragédies de l'ex-Yougoslavie, les jeux diplomatiques pervers, les effets négatifs des différences de conception sur les applications des  droits de l'Homme et du droit international qui opposent toujours la Russie   et les autres membres du Conseil de l'Europe, les faiblesses d'une justice internationale toujours  plus embryonnaire que majeure et décrédibilisée par le « procès » de Milosevic...

Ingrid Betancourt libre nous fait espérer dans l'avenir de la Liberté. Karadzyc prisonnier nous fait espérer dans l'avenir de la Justice. Une héroïne et un anti-héros. Deux sorties de cauchemars. Deux rêves d'un monde meilleur.

D'un monde où le  mot « valeur » prendrait un vrai sens, comme l'exigent les fondement de la « construction européenn ». Où ‘on cesserait de « marchandiser », « chosiser », « déshumaniser » impunément la nature humaine. Où le droit serait  mis effectivement au service de la justice. Où les criminels de guerre ou de guérilla sont assurés de devoir rendre des comptes, même si, par définition, les crimes contre l'humanité ne peuvent être « ni punis ni pardonné ». Où le devoir (plus que le droit)  d'ingérence serait une éthique d'action contre les dérives des « déraisons d'Etat », contre les dévoiements des nationalismes meurtriers, contre le franchissement de ces lignes rouges que trace parfois (trop souvent) une application non réfléchie de ce précepte si dangereux qui prétend que « la fin justifie les moyens »  
 Cette force symbolique de l'événement mise à part, ne soyons ni hypocrites, ni négatifs.

>>> Le bourreau déguisé dans sa cavale en spécialiste de médecine alternative (douce ?) n'a pas seulement été arrêté par intérêt « européen » du gouvernement serbe issu des dernières élections. La paix , l'état de droit, la rupture avec les fantasmes de la « Grand Serbie », la guérison d'un nationalisme exacerbé, la volonté de marcher vers l'avenir en cessant d'avoir l'œil rivé sur un rétroviseurs où sont gravées les nostalgies du Champ des merles (1389 !) exigeaient ce type d'action. Et une partie de l'opinion serbe (les dernières élections l'ont confirmé) mettent  des idéaux de paix et d'humanité au-dessus de leurs seuls intérêts conjoncturels. C'est courageux. D'autant que cela peut avoir des répercussions difficiles à assumer en Serbie même : le pays est clairement divisé entre pragmatiques modernes assoiffés d'Europe et archéo-nostalgiques. Et la question du Kosovo demeure une bombe à retardement ....Tous auraient préféré que les  héros devenus monstres soient jugés « à la maison » et non devant une instance internationale où la justice risque de n'être que celle des vainqueurs. Et inflige des morsures à la susceptibilité nationale. Mais le prix à payer est toujours très fort après  

>>>>  La perspective d'actes de justice qui fassent éclater la vérité ne doit pas être masquée par  toutes les questions gênantes que posent encore les circonstances des tragédies dont Karadzyc est le principal responsable. Entre autres : la responsabilité des troupes des pays européens (néerlandaises,  notamment) dans le massacre de Srebrenica, les retombées tragiques des mésententes au sein de l'OTAN, les complicités qui lui ont permis de vivre libre à Belgrade malgré  sa localisation par les services de plusieurs pays, les soutiens qu'ont encore d'autres fugitifs, tels Ratko Mladic, ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, et Goran Hadzic, ancien chef des Serbes de Croatie,  

>>> Depuis les accords de Dayton en 1995, la page de la guerre a été tournée. Le conflit est terminé même si les mémoires demeurent sensibles. Il ne faut pas oublier qu'il y a eu plus de 250.000 morts. C'est un devoir de conscience ne pas l' oublier et de transmettre un constat majeur trop souvent  fait dans cette Europe si fréquemment transformée en cimetière de la honte : Les peuples d'Europe ont la capacité de provoquer des violences extraordinaires.

Il n'existe aucune paix définitivement établie. Face aux périls qui avancent toujours « à patte de colombe », restons vigilants. « L'ennemi, c'est la pantoufle », redirait André Glucksmann...Trouvons ici l'occasion de redire l'impérative nécessité de construire une Europe politique de la Défense et de la Justice. Tant reste à faire...

Daniel RIOT

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LES FAITS: Karadzic veut retarder son extradition vers le TPI

Pour gagner du temps, son avocat a annoncé qu'il déposerait vendredi un recours contre son transfèrement. Les juges du tribunal de Belgrade pour crimes de guerre auront alors trois jours pour se prononcer.

Radovan Karadzic, l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie inculpé de génocide, tentait mercredi 23 juillet, deux jours après son arrestation, de retarder son transfèrement devant la justice internationale à La Haye.
Pour gagner du temps, son avocat, Me Svetozar Vujacic, a annoncé qu'il déposerait un recours contre le transfèrement de Karadzic vendredi prochain, au dernier jour du délai prévu par la loi.
De son côté, Karadzic, qui n'a pas eu de contacts avec son épouse Ljiljana Zelen-Karadzic, sa fille Sonja et son fils Sasa au cours de ses années de clandestinité, insiste pour les revoir avant de se retrouver à La Haye devant le Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie qui l'a inculpé il y a 13 ans de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre.
Son frère Luka a demandé mardi à Miroslav Lajcak, le Haut représentant international en Bosnie, de permettre à la famille Karadzic, dont les passeports ont été confisqués en janvier, de se rendre à Belgrade.

Transfèrement "ce week-end ou au début de la semaine prochaine"

Mardi soir, Milorad Dodik, Premier ministre de la Republika Srpska (entité serbe de Bosnie), a lui aussi appelé Miroslav Lajcak à "autoriser la famille de Radovan Karadzic à lui rendre visite". "Les raisons d'empêcher la famille Karadzic de quitter la Bosnie ont cessé" avec l'arrestation de Radovan Karadzic, a déclaré Milorad Dodik à la télévision d'Etat serbe (RTS).
Une fois déposé le recours de l'avocat de Karadzic contre son transfèrement, un panel de juges du tribunal de Belgrade pour les crimes de guerre aura, selon la loi, trois jours pour se prononcer.
L'inculpé ne pourra plus ensuite présenter d'autre recours et le ministère de la Justice pourra alors décider de le transférer au TPI.
Le transfèrement pourrait avoir lieu "durant le week-end ou au début de la semaine prochaine", a estimé Bruno Vekaric, porte-parole du procureur pour les crimes de guerre à la chaîne de télévision B92.

Manifestations de faible envergure

Les réactions internationales ont toutes salué la nouvelle de cette arrestation.
L'arrestation de Karadzic n'a jusqu'à présent donné lieu qu'a des manifestations de protestation de faible envergure. Une centaine d'ultranationalistes criant "Trahison" ont rapidement été dispersés mardi soir par d'importantes forces de police.
Lundi soir, après l'annonce de l'arrestation de Karadzic, une cinquantaine de personnes s'étaient rassemblées, mais la police les avait tout aussi rapidement dispersées.
Radovan Karadzic, psychiatre de formation né en 1945 dans une famille de paysans pauvres du Monténégro, était devenu l'ennemi public n°1 du TPIY. Le tribunal l'a inculpé en 1995 de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité pour avoir orchestré depuis son fief de Pale, avec son comparse le général Ratko Mladic, le siège de Sarajevo, l'épuration ethnique des musulmans et croates et notamment le massacre de Srebrenica en 1995, au cours duquel furent assassinés 8.000 musulmans.

  • Carte de la Bosnie
  • Une fiche sur Radovan Karadzic
  • Une fiche sur Ratko Mladic
  • Acte d'accusation contre Radovan Karadzic et Rakto Mladic du TPIY
  • Acte d'accusation modifié de Radovan Karadzic du TPIY
  • Srebrenica sur le site du Courrier des Balkans
  • La Bosnie en 1995
  • Histoire de la Bosnie
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