Magazine Société

Emmanuel Macron: Laissez Paul Biya tranquille !

Publié le 29 novembre 2020 par Tonton @supprimez

« Le conflit se poursuit dans les régions anglophones du Cameroun et l’opposition est régulièrement réprimée Maurice Kamto en fait les frais.

Il y a un an, vous avez assuré vouloir « mettre un maximum de pression sur Paul Biya ». Que peut la France ? » Voilà la question que le Jeune Afrique, le journal du franco-tunisien, Béchir Yahmed, pose au président français la semaine dernière, à l’occasion de ses 3 ans LA NOUVELLE N° 570 du lundi 30 novembre 2020 passés à la tête de l’Etat français. Une occasion en or pour Emmanuel Macron de régler des comptes au président Paul Biya.
Alors question : qu’est-ce qui peut justifier une telle aigreur du président français à l’endroit du chef de l’Etat camerounais ? Dans son dossier de la semaine, votre journal met le doigt dans la plaie des non-dits de la sortie malheureuse d’Emmanuel Macron à Jeune Afrique.

Dans une interview accordée la semaine dernière à Jeune Afrique, Emmanuel Macron n’a pas manqué l’occasion pour chahuter le président de la République du Cameoun. Surtout qu’il le sait : l’hebdomadaire panafricain n’est pas trop proche du régime de Yaoundé. Son parti pris est flagrant. En fermant les yeux sur les dérives pourtant visibles de certains présidents africains, le président français confirme sa haine à l’égard du régime de Yaoundé.

A l’hebdomadaire Jeune Afrique, ces dernières années on ne peut pas parler du Cameroun en de bons termes. C’est de notoriété publique. il devient donc constant que parmi les médias évoluant sur la place parisienne, J.A. s’est forgé une réputation d’hostilité évidente envers certains Etats de l’Afrique sub-saharienne, notamment ceux du pré-carré français. La mémoire sélective du président français ne pouvait donc pas trouver meilleure tribune que celle de ce canard néocolonialiste du Tunisien Béchir Ben Yahmed, pour abattre celui qui est devenu sa cible préférée en Afrique centrale : Paul Biya. Question de journaliste : « Le conflit se poursuit dans les régions anglophones du Cameroun et l’opposition est régulièrement réprimée – Maurice Kamto en fait notamment les frais. Il y a un an, vous avez assuré vouloir « mettre un maximum de pression sur Paul Biya ». Que peut faire la France ? Réponse de Monsieur Macron : « Et c’est ce j’ai fait puisque je vous rappelle que, pendant très longtemps, le président Biya n’est pas venu en visite officielle en France.

Nous avions eu des contacts par voie téléphonique, mais je lui avais demandé des gestes de confiance avant sa venue à Lyon, en octobre 2019.
Il les avait faits, il y a un an, avec un certain nombre de libérations. La situation s’est de nouveau tendue et j’invite le président Biya à effectuer des gestes d’ouverture. Lui aussi doit préparer le renouvellement et pacifier son pays, d’autant qu’il a un autre défi beaucoup plus grand : celui de l’avancée de Boko Haram. Il faut qu’il réengage au maximum son pays dans la lutte contre le terrorisme aux côtés du Nigéria et surtout du Tchad, qui porte beaucoup de la charge, parfois seul. »

Rien qu’en décryptant de manière cursive ces propos de Macron, le premier constat qui saute aux yeux est navrant et désolant. C’est surtout cette légèreté avec laquelle le chef de l’Etat français aborde des sujets d’une importance avérée que sont la lutte contre Boko Haram et l’insécurité dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest depuis près de quatre années. Parlant par exemple du Noso, Macron se contente avec une légèreté déconcertante d’exciper un simple et banal générique : « gestes d’ouverture ». Que doit-on en réalité comprendre par « gestes d’ouverture » ? Signer sa démission alors que le mandat que le peuple camerounais a confié au président camerounais court encore pour au moins 5 ans ? Libérer les prisonniers coupables d’actes de terrorisme et d’exactions de toutes sortes, et qui sont aujourd’hui condamnés par la justice du Cameroun ? Venons-en aux faits. Voici ce que Emmanuel Macron déclare lui-même : « Avec les terroristes, on ne discute pas, on combat ».

Alors question : pourquoi combat-on ces terroristes ? Puisque ça concerne le Sahel, et non le Cameroun ? Est-ce pour cela qu’on doit exceptionnellement négocier ou dialoguer avec des terroristes égorgeurs d’enfants et de femmes ? D’ailleurs, le chef d’Etat français se fait très précis et péremptoire par la suite : « (…) On ne doit pas dialoguer avec des groupes terroristes qui continuent à tuer les civils et les militaires français. » Alors ici, quoi comprendre donc de cette posture ? Ailleurs, c’est-à-dire au Cameroun, il faut négocier et dialoguer avec les terroristes, mais ici au Sahel où ces terroristes, selon ses propres termes, tuent les civils et les militaires français, on doit les combattre. De deux choses l’une : ou on négocie avec tous les terroristes, ou on combat tous les terroristes…

Génocide

Ensuite, il y a cette condescendance dans le propos qui frise le dédain et l’irrévérence envers un autre chef d’Etat d’un pays souverain qu’il semble vouloir infantiliser en se présentant comme son donneur d’ordres de l’ombre et son directeur de conscience. Pour dire à Emmanuel Macron qu’il n’est qu’un petit enfant à côté d’un patriarche comme Paul Biya… Si les enfants ne respectent pas les ainés en France, ici au Cameroun, on les adule… Enfin, il y a cette sorte d’amalgames avec laquelle le président français met les serviettes et les torchons dans un panier qui lui fait pourtant des rappels pertinents. A savoir, que c’est aux côtés d’autres chefs d’Etat africains (idriss Deby du Tchad, Goodluck Jonathan du Nigeria, Thomas Boni Yayi du Benin) que Paul Biya déclare la guerre contre Boko Haram à Paris en présence de François Hollande au mini-sommet pour la sécurité en Afrique centrale, le 17 mai 2014.

Depuis ce temps, l’armée camerounaise est en pointe, tant sur le sol camerounais ou dans le territoire de ses deux voisins le Nigeria et le Tchad pour combattre les islamistes d’Aboubakar Shekau. Que l’’on prétende donc le contraire aujourd’hui est tout simplement scandaleux. A titre illustratif, le Cameroun contribue à hauteur de 2450 éléments des 8700 éléments que compte la Force multinationale mixte (Fmm) depuis 2015. Le Cameroun abrite d’ailleurs à cet effet à Mora, le commandement du secteur N° 1 de cette force avec tous les résultats positifs que nous connaissons depuis lors sur le terrain des combats.

Depuis le génocide de 1994 (Alain Juppé était ministre des Affaires étrangères), les relations entre la France et le Rwanda sont particulièrement exécrables. Tous les chefs d’Etat français qui se sont succédé à l’Elysée ne se lassent pas, par conséquent de ménager Paul Kagame. Et pourquoi ?
Pour le rôle négatif joué par la France dans ce génocide. Ainsi, toute honte bue, Emmanuel Macron s’ébroue ubuesquement depuis qu’il a accédé au pouvoir, de faire allégeance au Rwandais Paul Kagame. Ceci, malgré la chasse aux opposants qui fait du chef d’Etat rwandais l’un des plus féroces et impitoyables autocrates sanguinaires d’Afrique ces dernières années. Mais cela n’empêche pas à Emmanuel de le caresser dans le sens du poil. Pas un mot de la France sur les assassinats d’opposants rwandais en Afrique du Sud et ailleurs dans le monde.

Démagogie

Quid donc de la Côte-d’ivoire où les évènements post-électoraux du fait du 3ème mandat trop controversé du président Alas sane Dramane Ouattara ont fait plus de 1000 morts en quelques jours. Motus et bouche cousue. Au contraire, ce sont plutôt des lauriers qui lui sont tressés pour donner une légitimité et une onction à sa dernière mascarade électorale. Justification de complice : « Le président Ouattara s’est clairement exprimé en mars pour dire qu’il ne ferait pas de troisième mandat. J’ai tout de suite salué. Un candidat avait été désigné pour lui succéder : le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly. Mais à quelques se maines de l’échéance, il s’est retrouvé dans une situation exceptionnelle avec le décès de ce dernier. Je peux vous dire de manière sincère qu’il ne voulait pas se présenter pour un troisième mandat » pérore avec cynisme et langue de bois le complice français Macron. Comble de démagogie, il indique par la suite avoir eu avec son complice ivoirien une très franche discussion en septembre : « Je lui ai dit ce que je pensais et j’ai entendu ses arguments et son inquiétude pour la stabilité du pays » se défend-t-il ostensiblement pour ajouter : « Ouattara est parfaitement conscient des tensions actuelles qui ont causé la mort de plus de 80 morts.» ici encore, Macron fait preuve d’une myopie scandaleuse lorsqu’il parle de 80 morts.

Un chiffre minoré à dessein. Pour justifier ces yeux doux de Macron vis-à-vis d’Alassane Ouattara, de nombreux observateurs estiment que c’est parce que l’actuel président ivoirien a pratiquement bradé les ressources de son pays à la France. On comprend donc pourquoi aussi à Paris, Paul Biya ne peut pas être logé dans la même enseigne que le président ivoirien Alassane Ouattara. Une situation du reste récemment dénoncée dans une question écrite au parlement par un sénateur français, Pierre Laurent. Membre de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées, le sénateur français ne passe pas par 4 chemins pour dénoncer ce qu’il appelle « une politique de pillage des pays africains ».
Pour ce qui est de la forme, la messe est dite : Macron a tout à apprendre de son métier de président de la République. Si n’importe quel citoyen français peut dire à peu près tout ce qui lui passe par la tête, parlant d’un président d’un autre Etat souverain sans que cela engage automatiquement la France.

Le moindre des propos d’un président de la République est analysé, soupesé et s’impose comme ligne politique de son pays. Dans le fond, pourtant, les propos du président français n’ont pas de quoi surprendre et n’ont en rien dépassé sa pensée néocolonialiste. Heureusement que pour le moment, Macron aboie plus qu’il ne mord…

LA NOUVELLE N° 570 du lundi 30 novembre 2020


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Tonton Voir son profil
Voir son blog

Magazine