Comme l’affirme Milton Friedman : « The government solution to a problem is usually as bad as the problem » [La solution gouvernementale à un problème est généralement aussi mauvaise que le problème]. Et, il semble que les prêts garantis par l’État illustrent parfaitement cette citation.
Sommaire
- I. Le prêt garanti par l’État (PGE) : un prêt peut-être empoisonné financé par le contribuable
- II. Ces prêts garantis par l’État peuvent éventuellement se transformer en prêt d’État en cas de crise financière
- III. Deux points à retenir sur les conséquences négatives possibles des prêts garantis par l’État (PGE)
I. Le prêt garanti par l’État (PGE) : un prêt peut-être empoisonné financé par le contribuable
Face au choc économique de la crise du coronavirus, le gouvernement français a mis en œuvre un « dispositif exceptionnel de garanties permettant de soutenir le financement bancaire des entreprises, à hauteur de 300 milliards € »[1]. Comme le définit le ministère de l’Economie et des Finances, dans le rapport Prêt garantit par l’État Quelles démarches pour en bénéficier ?(2020) : « Le prêt garanti par l’État (PGE) est un prêt qu’octroie à une entreprise ou un professionnel sa banque habituelle, en dépit de la forte incertitude économique actuelle, grâce à la garantie qu’apporte l’État sur une partie très significative du prêt. Le prêt garanti par l’État est un prêt d’une banque à une entreprise : ce n’est pas un prêt de l’État ». Ainsi, « La garantie de l’État couvre 90 % du PGE pour tous les professionnels et pour toutes les entreprises sauf pour les entreprises qui, en France, emploient plus de 5000 salariés ou réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 1,5 Md€, où la part du prêt garanti par l’État est de 70 % ou de 80 % ».
Il s’agit donc pour une entreprise qui demande un prêt à sa banque, d’obtenir une garantie de l’État. L’objectif de cette mesure est d’éviter la faillite à une entreprise dont la trésorerie est fortement menacée à cause de l’épidémie de Covid-19. Mais les effets secondaires peuvent être d’autant plus nocifs que le gouvernement n’en mesure pas les conséquences.
La logique de cette démarche étatique doit être comprise comme une politique de relance (ou de maintien de l’offre) via l’endettement qui permet de pallier le choc négatif d’offre mais également de demande, qu’engendre la crise du coronavirus. La science économique montre que la croissance du crédit est un indicateur fort de possibles crises financières. L’économiste Hyman Minsky souligne que l’endettement a un effet positif à court terme sur la demande et la croissance économique, mais jusqu’à un certain point au-delà duquel il créée des conditions propices au développement de crises.
II. Ces prêts garantis par l’État peuvent éventuellement se transformer en prêt d’État en cas de crise financière
Le mécanisme est le suivant :
1) Supposons qu’un nombre trop important d’entrepreneurs français ne parviennent pas à rembourser leurs crédits au même moment, ce qui est probable au vu de la situation actuelle ou du moins envisageable dans quelques mois.
2) L’État s’étant porté garant d’une somme équivalente de 70 % à 90 % des prêts, il se substituera aux banques à due concurrence. L’Etat deviendra donc créditeur de nombreuses d’entreprises qui ne pourront pas le rembourser. Et cela se fera : (1) soit par un accroissement de la dette publique, (2) soit par une hausse des impôts.
3) Il restera néanmoins 10 % à 30 % des prêts à rembourser aux banques par les débiteurs Or, s’ils ne parviennent pas à payer, que se passe-t-il ?
4) Les banques se trouveront en situation d’insolvabilité. C’est-à-dire qu’elles seront incapables de répondre de leurs propres engagements, ce qui les mènera vers la faillite. Or, la faillite d’une banque, c’est un risque de débâcles en cascade, puisque les banques ont des engagements financiers les unes avec les autres. Cette situation peut mener à une crise de solvabilité d’un plus large nombre d’institutions bancaires.
5) Dès lors, si aucun investisseur privé ne reprend la ou les institutions financières en situation d’insolvabilité, il n’y a alors que deux issues : (1) soit une faillite des banques qui peut gravement déstabiliser le système financier, (2) soit une recapitalisation à partir du budget de l’État qui dégrade les comptes publics.
6) L’histoire nous a montré que c’est en général l’État qui paye, comme lors de la crise de 2008-2009. La France avait alors, par exemple, aidé à la recapitalisation des banques pour 40 milliards d’euros (et cela passe obligatoirement par une hausse de la fiscalité ou de l’endettement public)[2].
III. Deux points à retenir sur les conséquences négatives possibles des prêts garantis par l’État (PGE)
Premier point, les prêts garantis par l’État (PGE) doivent être remboursés un jour ou l’autre par les emprunteurs. Lorsque l’État se dit « garant » de ses prêts, c’est en réalité le contribuable qui se porte garant. Car lorsque l’État paye quoique ce soit, il prend nécessairement cet argent quelque part (par un endettement public que le contribuable remboursera à terme ou via une hausse de la fiscalité que le contribuable supporte immédiatement). Ainsi, le contribuable paie dans tous les cas, directement ou indirectement.
Second point, en facilitant les prêts, l’État augmente lui-même le risque systémique de crise financière. En se portant garant auprès des banques, il les incite à accorder un maximum de prêts, indépendamment des antécédents bancaires ou des situations financières de leurs clients. Des prêts qu’elles accordent sous la pression médiatique et qui les mettront peut-être un jour dans l’embarras…