La fin du cinéma
Je suis fier de dépenser chaque mois la moitié de mon argent de poche dans ce support dépassé qu’est le Laserdisc. Aberration temporelle, grossièreté technologique. 30 centimètres de diamètre, 250 grammes par galette pour 60 minutes de vidéo par face, en basse définition. J’adore. On peut trouver au Japon la plupart des films sortis avant l’an 2000. Je collectionne également d’anciennes revues spécialisées dans le domaine, que je fais venir de France (!). Dans le numéro 57 des Années Laser (octobre 1999), que je viens de recevoir, page 36, une interview de Georges Lucas, qui prophétise, avec une justesse étonnante, la fin du cinéma.
– Vous pensez que dans vingt ans, tout aura changé ?
Lucas : Oui, absolument. Regardez l’évolution des disques laser, de la vidéo, des DVD.
– Quel est le prochain défi technologique ?
Lucas : Internet.
– C’est-à-dire ?
Lucas : On ne sait pas comment le Web va devenir un instrument de distribution des œuvres, quelle forme ça va prendre. Y aura-t-il des canaux de distribution cinéma ? Je le pense. On fera de la publicité pour ces canaux ou dans les journaux, et on s’abonnera.
– Des studios comme Paramount Universal ou 20th centurion fox vont-ils être condamnés à disparaître ?
Lucas : Je ne sais pas. Ils ont déjà du mal à survivre aujourd’hui. Ce sont des corporations commerciales, et leur but est de faire de l’argent. Elles seront donc contraintes, un jour, de tirer des conclusions du marché et de se dire : la distribution en salle ne marche plus.
Deux ans plus tôt, en 1997, le producteur-réalisateur se mettait les fans à dos, en massacrant les bobines originales de sa trilogie culte, à coup de découpages indécents et de scènes grotesques en images de synthèse. Seule la version Laserdisc du film permet aujourd’hui, associée à un bon vidéo projecteur, considération toute subjective, de revoir Star Wars dans des conditions optimales. C’est-à-dire, sans coupures ni numérisation, dans un format cinéma respecté.
Rémi Brun